Chapitre 1

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Il était une fois une petite fée qui ne savait rien de son peuple ni de sa propre identité. Elle vivait depuis toujours dans un monde souterrain plein de tunnels et de galeries dans lesquels la lumière du jour ne perçait jamais ; un monde sombre et froid. Nul ne se rappelait comment ni pourquoi elle était arrivée là, d'ailleurs aucun être du monde d'en bas ne connaissait l'existence des fées. Ainsi était-elle vue comme une créature très laide, et difforme à cause de ses ailes, bien inutiles sous terre.

Sa principale besogne était de creuser des tunnels mais, avec ses petites mains frêles et fragiles, elle avançait très lentement et son peuple d'adoption la rejeta avec mépris.

— Mais ne sert-elle donc à rien ? grognait un vieux troll.

— On ne veut pas de fainéante monstrueuse ici ! rajouta un gnome velu.

La petite fée passa son chemin sans rien dire, comme d’habitude. Elle n'avait connu que ça toute sa vie. Son cœur accumulait pourtant beaucoup de tristesse mais son visage restait impassible. Quand toutes les créatures terminèrent leur travail, la petite fée, les doigts tous abimés, rentra dans son refuge, une grotte étroite, le seul endroit où elle se sentait un peu en paix. Se recroquevillant sur elle-même, elle s'endormit en rêvant d'une famille qui l'aurait aimée...

Après une courte nuit, bien qu'incapable de savoir s'il faisait en réalité jour ou nuit, elle se réveilla, la gorge nouée. Elle avait bien du mal à supporter ces ténèbres viscéralement. C'est donc le cœur lourd qu'elle se rendit dans la galerie en même temps que d'autres travailleurs. Le plus souvent elle tentait de paraître invisible aux yeux des autres mais certains ne pouvaient s'empêcher de la maltraiter car, malgré elle, elle laissait rarement indifférent.

— Tiens voilà le laideron, cria une des créatures.

Elle ignora la remarque et garda profil bas mais, se faisant, elle ne s'aperçut pas du groupe qui s'était formé autour d'elle, menaçant.

— Va-t’en, personne ne veut de toi ici ! Quand le comprendras- tu ?

— Tu ne sers à rien, reste dans ton trou !

Les uns après les autres ils offensèrent la petite fée jusqu'à lui lancer de la terre et des cailloux sur son corps et sur ses ailes délicates.

La malheureuse ne put en supporter davantage. Son cœur, protégé jusqu'alors par une épaisse carapace, se brisa en sept morceaux et libéra toute la rage, la rancœur et la tristesse accumulées depuis des années. Une lumière sombre se propagea tout autour d'elle, terrifiante, et paralysa toutes les créatures sur place. Lorsqu'elle reprit conscience, épuisée et étourdie par tant de pouvoir, tout ce qu'elle put percevoir fut un amas de poussière tourbillonnant. Nulle trace des êtres qui l'avaient meurtrie.

Choquée, elle commença à trembler. Elle ne comprenait pas ce qui venait de se produire. Elle, si innocente, était devenue un monstre. La petite fée courut aussi vite que ses petites jambes lui permettaient, à travers les galeries, afin de fuir cet enfer obscur. Et après ce qu'il lui sembla être des heures, elle s'arrêta enfin, perdue dans les souterrains, et pleura à chaudes larmes pour la première fois de son existence. Quand ses larmes se tarirent enfin, elle ne ressentait plus que du vide, et du froid à l'intérieur d'elle.

Elle était seule et le resterait probablement à jamais.

Mais elle n'était pas seule. Quelqu'un avait aussitôt ressenti le pouvoir de la petite fée. Il s'agissait de l'Esprit de la Terre. D'abord furieux par ce remue-ménage, il finit par éprouver de la compassion pour ce petit être qui n'appartenait pas au monde d'en bas et dont le destin se trouvait ailleurs. Elle était tellement recouverte de terre et de poussière qu'on n'en distinguait plus la couleur de ses cheveux, le teint de sa peau ni la brillance de ses ailes diaphanes. Il décida donc d'apparaître sous la forme d'une taupe, un de ses Messagers, afin de l'aider à regagner le monde des siens.

Ainsi la petite fée fit la connaissance de Mama Taupe, le premier être qui lui accorda de l'attention et une certaine affection.

— Mon enfant, comment as-tu pu te perdre ici ? Regarde-toi comme tu as grise mine, ces lieux ne mettent aucunement en valeur la beauté que tu es.

La petite fée écarquilla les yeux car, si tout le bas monde connaissait son nom, Mama Taupe apparaissait rarement aux êtres vivants. Elle cria :

— Belle ? Moi ? Mama Taupe vous êtes aveugle, que savez-vous de ma beauté ? Si tout le monde dit que je suis hideuse, c'est que cela doit être vrai… Je suis si seule, personne ne me comprend.

Et alors elle lui relata sa vie de solitude et de misère au fond de la terre, sa rage et enfin le vide dans son cœur.

— Ma chère, tu as raison, mes yeux sont incapables de voir ce qui m'entoure, en revanche je vois parfaitement avec le cœur et je peux t'assurer que le tien est pur. Il te suffit juste d'en retrouver les morceaux...

— Mais comment les retrouverai-je ? A quoi ressemblent-ils donc ? Il fait trop sombre ici et je suis toute seule. Je n'y arriverai jamais... gémit la petite fée, désespérée.

Mama Taupe commença à s'éloigner tout en chuchotant :

— C'est une quête que tu dois entreprendre seule. Tu apprendras à avoir foi en toi et à savoir qui tu es vraiment. Même si ton cœur est en morceaux, tu restes liée à lui. Suis ton intuition...

— Non ne t'en va pas ! Ne me laisse pas ! Que dois-je faire ?

La silhouette disparut mais un murmure résonna dans le tunnel,

Une aide est toujours apportée à celui qui en a besoin... Il suffit d'y croire et d'en faire la demande.

Et la petite fée se retrouva à nouveau isolée et perdue dans le noir. Mais elle n'oublia pas les paroles de Mama Taupe ; celles-ci s'insinuèrent dans son esprit jusqu'à y faire germer la pensée que, peut-être avait-elle raison, ici n'était pas la fin mais seulement le début du voyage de sa vie. Elle apprendrait pourquoi ce monde sombre n'était pas le sien, même si au fond elle s'en était toujours doutée. Oui, elle allait rejoindre son véritable foyer et les morceaux de son cœur même si cela prendrait du temps. Mama taupe croyait en elle et elle ne voulait pas décevoir le seul être qui lui avait témoigné de l'aide.

A ces pensées, une faible lueur apparut un peu plus loin. La petite fée s'approcha et ramassa un petit caillou blanc luisant. Alors une douce chaleur emplit son corps et elle retrouva un morceau de son cœur, celui qui avait pour nom "ESPOIR".

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