Chapitre 13 - La cour des messieurs

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Le trajet en limousine se fait plus long que je ne l’aurais cru.

L'avantage de ces longs véhicules, c'est qu'on ne se sent pas à l'étroit. Sauf, lorsque votre patron décide de s'assoir pile entre vous et la pimbêche d'Annabelle alors que la banquette vide en face de vous vous fait de l'œil. Je rougis tellement que je me satisfais de la pénombre de l'habitacle.

Annabelle Justo parle toute seule pour combler le silence. Je ne prête aucune attention à son discours espérant vainement qu'elle parvienne à occuper l'esprit de Riley qui ne se gêne pas pour me reluquer à tour de bras. Fuyant son regard, mon coude me sert d'appui le long de la portière tandis que mes yeux se concentrent sur les lumières flamboyantes de la ville. Je n'arrive pas à savoir ce qu'il pense et cela m'agace fortement.

Au lycée, Riley portait toutes ses émotions sur son visage, surtout dans les yeux. D'un seul regard, j'arrivais à savoir ce qui le tracassait, et c’est là que je ressens le poids des années passées. La vigueur impétueuse et son goût de la vie disparaissent lentement et cela m'attriste.

Le téléphone d'Annabelle n'arrête pas de sonner. Au bout du troisième appel, elle se résigne à décrocher, portant toute son attention sur l'incapacité de son assistante à se débrouiller seule, pour gérer la liste d'invités de la soirée. La Justo fulmine, et son visage jusqu'alors grimace de colère, montrant sans vergogne chaque ridule dissimulée avec soin sous son épaisse couche de maquillage. D'une voix à peine audible, King sort de son mutisme :

— Kira vous...

— Ah, nous sommes arrivés, s'exclame soudainement Annabelle, coupant de ce fait l'élan de courage de notre PDG.

Le tapis rouge d’une soirée en grande pompe comme je me l'imaginais se déploie sous mes yeux ébahis. Deux grands et costauds vigiles à l'entrée, guettent solennellement la foule qui entre et sort du bâtiment. À voir l'architecture de la façade, j'opte pour un ancien casino, transformé en salle de séminaire de luxe.

Annabelle voit vraiment les choses en grand, question événementielle. J'en suis presque à admirer son travail, lorsque son sourire dédaigneux envers une jolie blonde qui passait par là me rappelle qu'elle ne fait rien sans intérêt. Son but ultime étant d'impressionner Riley, elle n'hésite pas à se comporter en première dame en s'illustrant à son bras. Monsieur Kingsrock, lui est droit comme un cierge de pacques et presque aussi pâle.

C'est un autre homme qui vient de sortir de cette limousine après moi. Il ne doit pas apprécier tant que ça, la vie mondaine. Seul l'argent a de l'intérêt, le reste n'est que superficiel et il le sait bien.

— Monsieur Kingsrock, c'est un plaisir de vous revoir. Un homme légèrement plus vieux que moi s'avance vers Riley, qui ne sourit que tardivement.

— Tiens Adam...

Les deux hommes papotent tranquillement, ce qui me laisse le temps d'observer le monde qui m'entoure. La salle dans laquelle nous venons d'entrer est de dominance rouge, avec des dorures autour des encadrements de portes en formes d'arches tout autour de la pièce. Une cinquantaine de personnes se trouvent déjà confinées autour de l'extravagant buffet, et Annabelle se matérialise soudainement devant moi, me sortant de mes songes.

— Monsieur Well, je vous présente Kira Crossley, notre nouvelle collaboratrice Mode, lingerie.

— Ah, c'est donc vous la cause de tout ce chahut ! se moque gentiment l'homme brun, presque aussi imposant que Riley.

Quelque chose de vicieux émane de cet homme, pourtant plutôt bel homme en apparence. Celui-ci tel un gentleman me tend sa main de façon à ce que je pose la mienne par-dessus ses doigts. Je jette un coup d'oeil vers Riley qui ne m'aide pas le moins du monde tant son visage est fermé. C'est Annabelle qui opine à maintes reprises discrètement dans le dos de l'individu pour que je m'exécute.

Le baise-main fait avec toutes les courbettes qui en résultent, j'apprends juste après que ce brun n'est autre qu'Adam Well, l'un des principaux actionnaires du Dress Code King Magazine. Sans discrétion, Annabelle le pousse volontairement dans mes filets en le lançant plusieurs fois sur le sujet des dessous féminins. Même s'il reste très agréable à regarder, cet homme ne m'attire absolument pas au contraire, alors que lui...

Attendant que Riley ne se fasse happer par un de nos collaborateurs de Boston, Adam se penche sur moi, et me susurre d'une haleine anisée :

— Dite après votre présentation, je voudrais bien voir vos dessous...

Levant les yeux, mal à l'aise, je croise le regard dur de Riley qui ne sourcille pas d'un pouce. Il n'a pas entendu Adam, ce qui ne m'arrange pas.

Comment vais-je sortir de ce pétrin ?

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