Se reposer sur ses lauriers

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L'arrivée du général Orguillus dans la ville fut l'événement le plus attendu de l'année. Après trois ans de guerre avec une nation à l'Est, il revenait enfin victorieux dans sa ville natale.

Le peuple était descendu dans la cité, et s'alignait le long des demeures. Certaines personnes, des jeunes femmes pour la plupart, attendaient sur leur balcon, la venue du général. On discutait, riait et pleurait de joie en attendant que l'armée rentre. Partout, on vantait les mérites de l'homme le plus courageux que l'Empire ait jamais porté. On chantait ses louanges, tantôt ses qualités de stratège hors norme, tantôt sa beauté incroyable et son physique à tomber.

Enfin, tambours et trompettes résonnèrent, annonçant l'apparition du cortège. L'armée ne tarda pas à franchir les portes de la ville. Tous acclamèrent alors le général. On criait son nom, on lançait des fleurs, on applaudissait et on chantait.

Assis sur son cheval blanc, le général souriait de toutes ses dents, saluant la foule de son bras. Il était aux anges. Tous ces gens étaient là pour lui, pour le féliciter et pour l'acclamer. Il était le héros de la ville, que dire ! De l'Empire entier. L'Empereur allait très certainement le nommer chancelier après sa victoire. Tandis qu'il traversait la ville à cheval, il s'imaginait déjà assis sur un trône en or, à côté de l'Empereur, grignotant les plus merveilleux mets tout en choisissant celle qui aura la chance de partager sa couche ce soir.

Après un magnifique discours où il ne cessait de vanter le courage dont il avait fait preuve et racontant avec quelle intelligence il avait su deviner les stratagèmes de l'ennemi et les contourner, il arriva enfin à sa demeure. La foule était amassée devant les grilles, et continuait de crier son nom tandis qu'il gravissait les marches menant chez lui. Après un dernier salut de la main, les portes se refermèrent sur lui. Il put enfin souffler et effacer ce sourire plaqué sur ses lèvres. Il ne prit pas la peine de saluer ses domestiques et alla directement dans ses appartements. Là, il se tint devant sa grande psyché. Il s'admira alors dans son armure. Il se trouvait incroyablement charmeur. Et ce n'étaient pas les jeunes femmes qui partageaient de temps à autre sa couche qui allaient dire le contraire.

Puis, il enleva son plastron et fit rouler ses muscles sculptés. Il s'amusa à gonfler ses biceps et à jouer avec ses pectoraux. Il se plut à croire qu'il avait le physique d'un dieu.

Quand il en eut assez, il enfila une tenue plus conventionnelle. Il allait dîner avec l'Empereur, qui voulait tout savoir sur sa victoire.

Lorsqu'il fut prêt, il se rendit en carrosse jusqu'au palais impérial. Là, on l'emmena jusqu'à la salle du trône, où un grand banquet avait été dressé en son honneur.

Il se prosterna devant l'Empereur avant de prendre place à sa droite.

— Allons donc, général Orguillus, ne nous faites pas patienter plus longtemps et contez nous l'ultime bataille qui vous a valu la victoire, s'écria l'Empereur. Bien entendu, vous serez récompensé comme il se doit.

— Votre Altesse sérénissime est trop bonne, répondit le général en inclinant la tête, le sourire aux lèvres.

Puis il se lança dans un récit épique. Il ne cessa de se glorifier, poussant la vantardise jusqu'à se faire l'auteur de certains combats qu'il n'avait pourtant pas mené.

La nuit était déjà bien entamée lorsque le général regagna ses appartements. Il était rassasié, quelque peu ivre, mais une de ses pulsions n'était pas assouvie. Alors, il fit appel à ses réseaux et dans l'heure qui suivit, on toqua à la porte de sa chambre.

Lorsqu'il ouvrit, une jeune femme se présenta à lui. Habillée très légèrement, sa robe était aussi légère qu'une plume, dévoilant ses courbes ravissantes. Le général reconnut sa favorite. Il allait passer une merveilleuse nuit, et cette jeune femme également. Il était le meilleur au lit, et arrivait toujours à satisfaire celles qui se présentaient à lui.

Durant toute sa vie, il avait été le meilleur en tout. Déjà petit, il était voué à devenir un grand homme. Après quelques années à s'amuser en se plongeant dans la luxure et dans la richesse, il avait rejoint l'armée. Son père lui avait mis une épée entre les mains dès qu'il avait eu l'âge de marcher. Dès lors, il n'avait pas mis pas longtemps à gravir les échelons. Adoré du peuple, il avait su attirer sur lui le regard impérial. L'Empereur n'avait pas tardé à le nommer général, prenant ainsi la place d'un vieux bonhomme dégarni qui n'arrivait même plus à monter à cheval. Il avait enchaîné les victoires et les conquêtes au nom de son Empereur. C'était grâce à lui que l'Empire était si puissant, aujourd'hui. Et tant qu'il vivrait, il le resterait.

Lorsque ses besoins d'homme furent assouvis, il renvoya la jeune femme chez elle. Puis il s'endormit dans son lit, rêvant de sa gloire qui ne cesserait de grandir.

Il fut soudain réveillé par un bruit mat, surgissant du couloir. Le bruit retentit de nouveau. Il se leva, se saisit de son épée et sortit. Il descendit à pas de loup les escaliers. La demeure était silencieuse, les serviteurs dormaient et il n'y avait aucun garde qui patrouillait. Il n'en avait jamais eu besoin. Qui était assez fou pour avoir l'audace de s'attaquer au plus courageux général de l'Empire, doublé d'un combattant hors pair ?

Il avançait dans le grand vestibule quand soudain, il sentit une présence derrière lui. Il fit volte-face, prêt à trancher la tête de cet imprudent qui osait le déranger chez lui. Mais il n'en eut pas le temps. Lorsqu'il sentit la dague pénétrer sa chair, il comprit que c'était la fin. Il sentit la vie le quitter, empalé comme un vulgaire cochon sur la dague de son assassin.

Dans la grande salle rouge où se tenaient sept trônes, celui du milieu se mit à briller. Un homme apparût alors. Habillé d'une armure dorée, il tenait dans sa main droite une épée et dans celle de gauche, une couronne de laurier. Sur sa tête, une couronne en or était posée. Le personnage se mit alors à sourire, d'un sourire étincelant qui dévoila des dents de nacre.

Orgueil était né.

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