Planque

3 minutes de lecture

 Silvio continue d’observer la terrasse. Hélène et son ami sirotent leur café. L’agent s’interroge sur leurs mobiles à venir ici à la recherche de deux vieilles personnes. Et si la jeune touriste lui avait dit la vérité. Il rassemble ses informations, essaie de les confronter à l’idée de laisser tomber comme le suggère Agostino, mais trouve plus de faits troublants que d’éléments lui dictant de passer à autre chose.

 Derrière lui, Agostino est en pleine conversation téléphonique avec Pasqualina. Ils échangent des phrases anodines, mais totalement indispensables pour eux. Silvio se met à songer quand une vibration dans sa poche de veste lui indique un appel.

 « Allo !

 — Silvio ?

 — Oui Gabriela.

 — Peux-tu dire à ton grand ami de laisser ma coéquipière travailler ? »

 À son ton, Silvio comprend qu’elle plaisante, la situation l’arrache de ses pensées, il sourit en répondant.

 « En fait, tu t’ennuies, c’est ça ?

 — C’est ça ! Et vous ? Vous faites quoi ?

 — On a retrouvé la touriste de Scalarino.

 — Je croyais que la mission était terminée, elle t’obsède en fait.

 — Non, mais je trouve que… attends, il y a du mouvement, tu va récupérer ta partenaire dans deux minutes. »

 Sur la terrasse, le jeune couple vient de se lever et se dirige vers le Fondamente de l’Arsenal. Silvio réagit, il ne doit pas les perdre de vue. Le quartier est un vrai dédale, même si les touristes ne s’éloignent en général pas des axes principaux, ils ne doivent pas les semer.

 Il attrape la manche d’Agostino, lui fait signe de raccrocher et sans le lâcher, commence à descendre les marches du pont. Son ami, un peu contrarié, range son téléphone et se débarrasse de l’emprise de Silvio d’un geste rageur.

**

 Après un second café, la discussion s’épuise entre Antarès et moi. Son attention est complètement captée, il s’efforce d’avoir l’œil sur le couple de MIB tout en conservant un air détaché. Quant à moi, je tente de mémoriser leurs traits.

 Ils ont laissé tomber leur veste, elles reposent sur le dossier de leur chaise. Ce sont de beaux spécimens de la race humaine, sportifs, bronzés, habitués au grand air. L’homme est coupé en brosse courte, il se tient raide comme un piquet, ses avant-bras imposent le respect, je ne pense pas pouvoir en faire le tour avec mes deux petites mains. La femme semble faire attention à son apparence, ses cheveux châtains mi-longs dessinent un impeccable carré qui met en valeur un joli visage qui aurait gagné à sourire plus souvent. Pas de traces de leurs yeux, cachés par des lunettes de soleil vintages à montures plastiques, noires il va sans dire.

 D’un coup, je les sens se raidir, Madame se lève et lisse son pantalon. Son compagnon se redresse, enfile sa veste et en sort quelques pièces qu’il jette négligemment sur la table. Au passage, il récupère la facture du café et la range avec soin dans son portefeuille, certainement pour la note de frais.

 Je comprends vite la source de leurs émois, la porte de la pension vient de laisser passer le vieux couple. Leur chat marche devant. L’homme donne son bras à son épouse d’un geste à la fois anodin et touchant, il contient une grande tendresse. Elle pose sa main sur le support ainsi offert et lui sourit avec affection. Après tout, Venise est la ville des amoureux, non ?

 Je regarde Antarès, il n’a pas bougé et fait semblant de n’avoir rien remarqué.

 « T’as vu comme c’est beau ? Lui lancé-je sans préavis.

 — C’est une très belle place en effet.

 — Oui, mais je parlais de cet amour conservé intact depuis tant d’années.

 — Je te garantis que ces deux-là ne s’apprécient pas du tout, me répond-il en m’indiquant le couple de MIB.

 — Idiot de la pampa ! Je parlais des deux vieux. »

 Ceux-ci suivent leur chat, laissé libre sur les pavés du campo. Le félin les mène devant les statues de lion qui gardent l’édifice militaire, ses maîtres s’arrêtent et les contemple, avant de les prendre en photos.

 Les deux agents en noir se tiennent à distance, à l’affût de leurs moindres mouvements.

 Antarès pose sa main sur mon bras, me jette un regard digne de la meilleure comédie romantique. Par contre, ses paroles ne sont pas, mais alors pas du tout dans le ton.

 « Nous sommes fixés, les maybe suivent le vieux couple, nous allons suivre les gens en noir, on se lève dès qu’ils quittent la place.

 — Que fait-on du troisième ? Il va nous repérer.

 — Verevckine t’a bien formé, jeune apprentie. » 

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire GEO ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0