Les juges
La pénombre régnait dans salon vide dépourvu de meubles. Alors que l’entrée d’un couloir sombre attirait son attention, il perçut du coin de l’œil un mouvement au centre de la pièce. Un microscopique scintillement était apparu, le temps d’un battement de paupière.
Le clignotement disparut aussitôt, laissant place à une grande table, lui offrant ainsi l’effet d’un fondu sur scène comme dans un de ces logiciels d’images qu’il utilisait en diverses occasions. Un tressaillement intérieur s’empara de Sam tandis qu’il distinguait vaguement dans l’obscurité l’ébauche de silhouettes autour de cette table. Son frisson se mua en appréhension lorsque les formes devinrent plus consistantes. Une lueur sinistre, jaillissant de nulle part, embrasa soudain ce décor irréel.
Une dizaine d’individus vêtus de tuniques archaïques, assis telles des statues antiques, le fixaient avec froideur. Leurs visages émaciés et ridés reflétaient des vécus inaccessibles, des choses que nul ne devait voir. En un geste ample et gracieux, l’un d’eux lui fit signe de prendre place à leurs côtés. Ce vieil homme, il l’avait rencontré quelque part auparavant. Les autres continuaient à le dévisageait sans sourciller. Ce qui s’ensuivit ébranla tout son Être.
Une sensation de dualité accompagnée de nausée le submergea lorsqu’une partie de lui jaillit de son corps et se matérialisa devant ses yeux. Ce double resta un moment dos à lui, immobile, puis avança sans se retourner en direction des centenaires. De l’endroit ou il se trouvait, Sam observa avec effarement cette scène irréaliste, luttant pour ne pas se laissait envahir par une profonde terreur. Aussi incroyable qu’invraisemblable, il était cet Autre et lui-même simultanément, ce qui lui offrait ainsi le plus spectaculaire visionnage de deux points de vue différents.
Les anciens s’adressèrent à son alter ego dans un dialecte étrange. Subitement, quelque chose comme une sorte d’ectoplasme transparent s’extirpa du front de son homologue. À l’intérieur de celle-ci Sam vit des pans entiers de sa vie, de ses choix et de ses actes s’incarnaient sous la forme d’images tremblotantes qui se figeaient et s’étiraient, telles des bulles immatérielles. Il reconnaissait sans peines les scénarios qui s’y déroulaient. Des évènements passés qui étaient revenus le hanter ces derniers temps. Il réalisa avec frayeur l’ampleur du cauchemar ou il se trouvait.
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