Une malédiction royale

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Il était une fois, dans un pays lointain, un royaume à la force faiblissante. Le roi et la reine se désespéraient de l'absence de tout enfant, puisqu'enfin sans héritier, la lignée s'éteindrait, et le pouvoir passerait aux mains d'obscurs cousins lointains.

Les années passèrent ; enfin, le berceau royal se rendit utile. Une petite princesse, blonde comme les blés et d'une grâce féérique naquit. On la prénomma Aurore, pour l'éclat de sa vie qui faisait rayonner ses parents de bonheur.

Bien sûr, ils auraient préféré un prince ; mais enfin, une fille ouvrait des perspectives d'alliances avec l'empire avoisinant, qui ne manquait de rien.

Un grand baptême fut organisé au sein du château vieillissant pour fêter sa naissance, et tout le monde fut convié... Tout le monde, hormis une harpie centenaire qu'on surnommait Maléfique pour sa magie d'une malfaisance redoutable.

Les fées du royaume, trois marraines ailées aux allures débonnaires et aux robes rouges, vertes et bleues, ouvrèrent la marche des cadeaux qui seraient donnés ce jour-là à la petite Aurore. Flora, une créature délicate au sourire chaleureux et aux habits carmin, s'avança la première pour se pencher et caresser le front rosé de l'enfant :

  • Aurore, je te fais don d'une beauté extraordinaire, qui saura charmer chaque personne croisant ton regard. Chaque sujet t'adorera, et tu ne manqueras pas de plaire à chaque prince de ce Monde !

Le couple royal la remercia d'un regard reconnaissant tandis qu'elle esquissait quelques gestes du bout de sa baguette magique. Un éclat surnaturel en surgit et enveloppa le berceau avant de disparaître. Pâquerette, une fée couverte d'un beau vert forêt, lui offrit le don d'une voix charmante, qui serait toujours écoutée et respectée. La dernière, Pimprenelle, s'avança enfin :

  • Belle princesse, je te donne le don de la pensée. Tu seras la plus instruite des femmes, et tes réflexions ne manqueront jamais...
  • Pimprenelle ! s'écria soudainement Pâquerette, faisant sursauter la petite fée et son orbe magique (qui alla s'écraser aussitôt sur le couffin). Prends garde, Maléfique est...

Une lueur smaragdine enveloppa soudain les froids murs de pierre du donjon, et la brutale apparition d'une silhouette aux yeux d'absinthe l'interrompit en pleine phrase. La nouvelle venue esquissa une révérence moqueuse envers les souverains, ses ailes noires frôlant le sol du bout des plumes, avant de se retourner pour offrir un sourire glacial au trio féérique.

  • Seigneur... Vous recevez beaucoup de monde ici, votre Majesté ! La noblesse, l'aristocratie et... Oh, comme cela est aimable de votre part, vous avez même convié les vilains ?
  • Silence, suppôt de Satan ! protesta Pimprenelle, qui rougissait sous la colère.

Maléfique l'ignora superbement, se tournant à la place vers le roi pour lui adresser un regard accablé :

  • Hélas, j'avouerai que votre oubli d'invitation m'a terriblement froissée.
  • Alors sachez-le, rétorqua à sa place la petite femme vêtue de bleu, votre présence n'était pas désirée.

Cet affront surprit grandement la harpie, qui se figea l'espace d'une seconde. Son visage osseux se para de mélancolie tandis qu'elle soupirait :

  • Indésirée, vous dites ? Oh... Quelle honteuse méprise, et moi qui espérais être simplement victime d'une étourderie !
  • Je vous en prie, interrompit la reine d'un ton qui se voulait conciliant, votre Excellence... excusez-nous pour cet incident, nous sommes désolés...
  • Bien sûr, votre Majesté... Je vous pardonne volontiers. Et pour le prouver, j'offrirai moi aussi un présent à la princesse !

Elle s'approcha à pas lents d'une Aurore endormie, et les trois fées firent instinctivement barrage de leurs corps. L'intruse fronça les sourcils.

  • Écoutez-moi bien ! lança-t-elle, pointant un doigt crochu comme une serre sur le couffin.

L'assemblée frissonna d'horreur ; le père et la mère s'étreignirent les mains, catastrophés. Maléfique, quant à elle, semblait se délecter de leur désespoir.

  • La princesse, commença l'harpie en souriant, sera certes pleine de grâce comme de beauté. La contrée n'aura jamais vu une perfection si grande dans chacun de ses traits, et nul n'échappera à ses charmes. Hélas ! Elle n'éprouvera jamais d'amour pour les princes du monde entier, et ne s'intéressera ni aux hommes ni au devoir marital. Aurore mourra sans enfant, et sans trône !
  • Non ! hurla le roi, la voix emplie de détresse, alors que la magie émeraude de la sorcière frappait de plein fouet l'enfant.

Les marraines rouvrirent les yeux : le sort qu'elles avaient invoqué n'avait pas agi. La malédiction de Maléfique était bel et bien plus puissante que leur magie...

  • Gardes, s'écria la reine, saisissez-la !

Trop tard : en un éclair couleur de jade, Maléfique s'était éclipsée, et le château fut plongé dans la plus grande des consternations.

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