Quatorze

6 minutes de lecture

Lena-rose

- Tu joues à quoi, la sainte nitouche ? Tu caches bien ton jeu en fait !

Un violent coup donné au niveau du pied de la chaise où je suis assise, dans la loge, me fait sursauter.

Je me retourne, et bien sûr, je tombe sur elle.

- Quoi ? C'est quoi ton problème avec moi Emy ? rétorqué-je agacée.

- Oh mais c'est que madame monte sur ses grands chevaux ! Mon problème c'est toi ! dit-elle en ricanant.

- Fais comme si je n'étais pas là! Ça nous arrangera toutes les deux. Ok !

Cette fille commence vraiment à me gonfler.

- Oh ! Crois moi, j'aimerais vraiment que tu ne sois pas là ! On se portait bien mieux avant ton arrivée ! Juste un petit conseil chérie, laisse Marco tranquille !

Mais de quoi elle parle, elle est malade celle-là !

- Marco ? Qu'est ce qu'il à avoir là dedans ?

- Ne me prends pas pour une conne ! Depuis le premier jour, j'ai remarqué ton petit manège avec lui. Tu essaies de lui mettre le grappin dessus, en lui faisant tes yeux doux de petite française naïve et bien sage.
Mais Marco est à moi !

- Ça ne va pas ! Je ne fais pas du rentre dedans à Marco ! Je suis juste polie et lui m'aide à mieux connaître le boulot, c'est tout.

- Tu penses vraiment qu'il est le genre d'homme à aider les jeunes filles par charité ? Si c'est le cas, tu es encore plus naïve que ce que tu en as l'air ma pauvre fille. Il veut juste te mettre dans son lit. Il m'a même dit que tu étais très gentille avec lui, alors arrête tout de suite ton cinéma ! Sinon je te jure que ça ne va pas le faire !

Les autres filles n'ont pas dit un mot. Elles sont retournées à ce qu'elles faisaient comme si de rien n'était. Pour ma part, je suis restée assise là, sur ma chaise, dans la loge, en état de choc.

Après le départ d'Emy, Yvanna s'avance vers moi et me dit tout bas :

- Fais attention à toi ! Emy est folle de Marco. Tout le monde le sait ici et cette fille est folle tout court.
Tu n'es pas comme les autre filles, je ne sais pas ce qui t'amène ici, mais reste sur tes gardes. Il y a beaucoup de choses que tu ne sais pas sur ce lieu.

Elle ne me laisse pas le temps de répondre et sort de la loge.
Je suis un peu sonnée par ce qu'elle vient de me dire.
Les mots d'Emy tournent en rond dans ma tête : « Marco lui a dit que j'étais gentille avec lui... »
Il faut que j'aie une discussion avec lui. Entre ça et la façon dont il m'a balancé dans les bras d'Hayden comme une vulgaire traînée...
Je pense que oui, effectivement, je suis bien trop naïve !

Au moment de monter sur scène, Nick, notre directeur artistique m'interpelle :

- Lena rose, ça fait un petit moment que tu es là maintenant. Il est temps de jouer un peu plus le jeu et de changer de garde robe pour les shows à present Tu mettras des portes jarretelles et des hauts transparents, parce que c'est ce que les clients veulent voir.

- Nick... C'est que...

- Ce n'est pas une suggestion ! Tu comprends ?

Sur ce, il m'ordonne de monter sur scène, sans me laisser l'opportunité de plaider ma cause.
C'est donc avec une boule à l'estomac que je commence ma soirée de travail.

Le rêve américain m'échappe...

Ça fait déjà presque une heure que je suis sur scène. Encore une danse à la barre avant ma pause, je l'aurais bien méritée. Je n'ai que deux minutes pour passer d'une scène à l'autre, je n'en peux vraiment plus.

En attendant, je fais ce que l'on attend de moi, comme une marionnette qui n'est pas libre de ses mouvements.
J'en profite pour regarder les personnes qui sont assises sur les tabourets devant la scène. C'est quand on est aux barres que l'on est le plus proche du public. Je ne sais pas pourquoi, peut être pour m'évader quand je danse, j'essaie de comprendre quel genre d'hommes ou même parfois de femmes , aiment passer la soirée dans cet endroit. J'essaie d'imaginer qui ils sont et ce qu'il se passe dans leur vie...

Au moment où je balaie le devant de la scène du regard, je tombe sur cet homme. Ça fait plusieurs fois que je le vois cette semaine. Il est assez bizarre. On a l'impression qu'il s'ennuie, qu'il ne prend aucun plaisir à être là. Il me regarde pourtant, mais pas comme les autres. Il n'y a aucune trace d'excitation, ni de désir dans ses yeux. En plus, j'ai l'étrange impression de l'avoir déjà vu ailleurs, c'est assez perturbant.

La fin de la musique me fait sortir de mes pensées. Je vais enfin avoir quinze minutes de répit.

Je ne repasse pas par la loge comme je le fais d'habitude, je me dirige vers le bar, près de la scène où je suis sûre d'y trouver Marco.

Bingo ! Qu'est ce que je disais ! Il est accoudé au bar, comme très souvent, en grande discussion avec un homme qui me tourne le dos.
Je n'aime pas être impolie, mais cette fois, tant pis, il faut absolument que je lui parle.

- Excusez-moi de vous déranger messieurs, mais serait-il possible que je vous parle Marco ?

Je vois Marco hausser les sourcils, pour me faire comprendre qu'il n'apprécie que très peu mon intervention.
Au même moment, l'homme qui discute avec lui se tourne vers moi. Mon souffle se coupe. Will Colins me fais face !

- Oh ! Ma petite Lena rose ! Comme c'est agréable de te voir, d'autant plus dans cette tenue ! me dit Will avec son regard pervers.

- Monsieur Colins... Je... Heu... ne pensais pas vous voir ici, dis-je perturbée.

- Comme quoi tout arrive ma jolie ! A plus tard Marco ! De toute façon je dois y aller. Je te laisse en bonne compagnie avec cette charmante demoiselle, dit-il en me tournant les talons.
Je reste bouche bée , sans bouger, devant un Marco agacé d'avoir été interrompu dans sa discussion.

- Je t'écoute! me dit sèchement Marco.

- En fait... C'est que... Voilà... Vous savez, je ne veux surtout pas de problème mais... C'est que...

C'est pas vrai, je n'arrive pas a aligner deux mots.

Marco s'avance doucement vers moi, fait le tour et se positionne dans mon dos.

- Je n'ai pas toute la soirée, alors dépêche toi !

Son ton n'est pas menaçant mais il n'est pas comme d'habitude non plus. Il est beaucoup plus froid, plus tranchant.
Je me retourne vers lui et ma poitrine touche son torse par inadvertance. Sans m'en rendre compte, je me suis mise dans une position compromettante. Vu de l'extérieur, on pourrait penser que je lui fais des avances.

Je recule de deux pas et lui dis d'un souffle :

- Il y a un mal entendu. J'aimerai éclaircir la situation. Emy m'a dit que vous et elle... Enfin...
Je vous le répète, je ne veux pas de problème, mais sachez que je ne vous fais aucune avance. Je pensais que vous vouliez m'aider à me familiariser avec ce milieu donc bon... Enfin, vous comprenez ?

Il me regarde comme un animal en cage. Il s'avançe vers moi, m'oblige à reculer dans le coin de la salle, prise entre les colonnes du bar et les rideaux de la scène. Il se colle à moi et me dit tous bas :

- Je ne suis pas avec Emy. Je baise qui je veux quand je veux, d'accord ? Et si ce boulot ne te convient pas, la porte est grande ouverte !

Ma respiration est saccadée et la peur commence à me paralyser.
Il me regarde alors dans les yeux et finit par m'achever en disant :

- C'est vrai ! Tu ne peux pas démissionner ! Sinon, tu vas te retrouver à la rue, sans personne pour t'aider... Tu es seule ici,
n'est ce pas ?

Mes yeux me piquent, mes poumons me brûlent, je suffoque d'avoir retenue aussi longtemps ma respiration...
Je ferme les yeux pour ne plus rien voir et essaie de me calmer.

Je sens alors sa main agripper mon menton, son souffle effleurer ma joue et sa bouche se poser sur le coin de mes lèvres.

Quand je rouvre les yeux, il n'est plus là. La bile me monte à la bouche. J'ai à peine le temps de courir jusqu'aux toilettes pour rendre le peu que j'arrive à avaler ces derniers temps.

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