Chapitre 10

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Royaume d’Arionnore. Gybor.

 Jad poussa la porte en bois grinçante du bar puis parcourut la salle du regard. Ses yeux se posèrent sur une chevelure châtain, il devina sur-le-champ à qui elle appartenait. Ses pas franchirent les quelques mètres faisant distance entre eux. Sa sœur dormait sur l’une des tables meublant le bar. Avec sa main il tapota son épaule pour la réveiller et l’appela par son nom.

 — Kara !

 Ne s’y attendant pas la jeune fille sursauta.

 — Tu es en retard, ronchonna-t-elle.

 — Nuance, tu es en avance, opposa-t-il en appuyant fortement sur le « tu » avant de s’asseoir face à sa sœur. Moi je suis pile à l’heure. Tiens c’est pour toi. Elles viennent des Montagnes Ancestrales.

 Jad sortit une multitude de pierres d’un sac et les tendit à Kara.

 — Oh tu es trop mignon, merci beaucoup !

 — Pas de quoi. Au fait tu as réussi à les joindre ? se renseigna Jad en se repositionnant sur son siège.

 — Oui j’ai pris contact avec celui dont je t’avais parlé, tout m’a été indiqué.

 — Et pour le logement ?

 — Normalement c’est un dortoir commun. A notre arrivée ils décideront des tâches que l’on aura à accomplir.

 L’adolescent passa une main dans ses cheveux châtains puis hocha la tête.

 — Tu seras sûrement retenue pour les attaques directes.

 — Sans doute mais n’aies pas de soucis pour moi, je suis certaine que tu auras une bonne place pour les aider. Peut-être à l’infirmerie ? supposa Kara.

 — J’n’en sais trop rien. Je me débrouille pas mal pour les soins mais c’est tout. Et pour la nourriture ? s’enquit Jad en triturant un des boutons de sa veste.

 — On est nourrit en échange de notre participation. Il m’a expliqué le cheminement et quelques lieux à éviter mais je te le dis demain matin. Kara bailla fortement. J’espère que tu as réservé une chambre parce que je suis crevée.

 — D’accord. J’ai pris trois lits chez Max avant de venir te voir.

 — Trois lits ? s’étonna sa sœur.

 Cette fois-ci le garçon s’empara d’un second bouton qu’il fit maltraiter entre ses longs doigts.

 — J’ai rencontré un gars dans les Montagnes Ancestrales en venant à Gybor.

 — Et tu fais confiance aussi facilement à cette personne ? s’affola Kara. Imagine que ce crétin n’est pas ce qu’il dit, qu’il nous mente. Si c’est le cas on peut dire adieu à notre plan.

 — Ce crétin s’appelle Jenson pour commencer et oui j’ai confiance en lui. Il a besoin d’aide autant que nous on en a besoin.

 — Sérieusement Jad, tu ne peux pas faire venir quelqu’un comme cela ! Tu le connais à peine.

 — Ecoute j’ai failli me faire manger par une créature horrible mais ce gars m’a sauvé la vie, je pense qu’il en vaut la peine. Figure-toi d’ailleurs que j’en connais pas mal à son sujet. On a eu le temps de bien discuter ensemble.

 — Comment cela tu as failli mourir ? broncha sa sœur jumelle.

 — Une chose nous a attaquée mais il a réussi à envoyer son poignard dans la tête de l’animal.

 D’un regard dans le vide Kara sembla réfléchir intensément.

 — Je le sens pas ce type mais dis-moi au moins ce que tu as appris à son sujet. Je me ferais un avis en le rencontrant ensuite.

 — Tu n’es pas juste avec lui, il m’a tout de même aidé à porter tes pierres ! se plaint exagérément Jad.

 — Dis plutôt que tu l’as forcé.

 — Juste très faiblement. Je sais qu’entre son père et lui ce n’est pas l’amour fou. Je qualifierais même son père de fumier pourri jusqu’aux entrailles ou plutôt de charogne abject. Non ! De rat misérable baignant et partageant sa propre pisse…

 — Je pense avoir compris le message et ensuite ? trancha Kara.

 — Eh bien Jenson est poursuivi par des éteints.

 — Ce n’est pas rien dis-donc et pour quelle raison ? coupa de nouveau sa sœur.

 — J’allais y venir. Il s’est enfuit de chez lui car son père a l’attention de faire de lui un éteint.

 — Je vois. Son père est bien un pourri. Je sens que tu ne me dis pas la totalité Jad.

 — Prends-le bien je t’en prie. Je sais que tu n’approuveras pas sa venue parmi nous ensuite.

 — Balances, exigea Kara.

 — Jenson qui est un courageux, adorable, lent, malin mais pas toujours, gentil gars est le fils de l’usurpateur.

 Manquant de s’étouffer Kara se partagea entre l’envie brusque d’étrangler ce Jenson ou son frère.

 — Pardon ! tempêta Kara.

 — Ne le juge pas trop vite et apprends à le connaître pour sa personne et non pour les actes de son père. De plus si tu veux savoir je l’ai déjà frappé. Le coup m’a échappé donc pas besoin de vengeance personnelle je pense qu’il paie déjà trop de conséquences.

 — J’essaierais de me contrôler du mieux que je peux. En revanche je te jure que si sa franchise n’est qu’une illusion il regrettera d’être né avec une langue.

 — Donc tu le rencontres calmement et on décide si oui ou non il nous accompagne au camp.

 Sur cet accord les jumeaux quittèrent le bar afin de regagner Jenson. Dehors l’air pur les embrassa paisiblement, seulement il n’y avait aucun Jenson en vue.

 — Il ne devrait pas tarder, on s’était fixé rendez-vous ici une heure plus tard.

 — Qu’il se dépêche je fatigue moi.

 Après vingt minutes d’attente, au bout de laquelle aucune apparition du jeune ne se fit voir, Kara en eu assez.

 — Ne fais plus confiance aussi aveuglément aux gens que tu croises. On s’est bien fait avoir, râla Kara.

 — Il doit avoir une bonne raison.

 — Oh que oui ! Et il s’est bien fichu de toi.

 — Je voulais dire qu’il a dû se perdre dans la ville, ou a tout simplement oublié de venir. Si cela se trouve il est retourné à l’auberge de Max et s’est assoupit sans le vouloir.

 — On peut faire un tour pour s’en assurer mais c’est de la perte de temps, à mon avis il est déjà loin.

 Les jumeaux s’orientèrent vers l’auberge malheureusement Jenson n’y était pas et Max ne l’avait guère remarqué dans les parages. Ils poussèrent leur recherche aux extrémités de la ville. Jad dut se rendre à l’évidence que toutes traces de Jenson avaient belle et bien disparu, l’adolescent s’était noyé dans l’obscurité la plus totale. Consterné, Jad continua inlassablement la recherche du jeune homme. Une recherche qui n’aboutit à rien, là était bien le problème. Aucun éléments ou indices s’avéraient être en possession des jumeaux Kara et Jad.

 — Vraiment Jad je n’en peux plus. J’ai rarement dormis ces derniers jours, la fatigue m’envahit. Je suis persuadée qu’il saura se débrouiller seul ton copain.

 — Je ne t’empêche pas d’aller te coucher moi je continu encore un peu.

 — S’attacher aux gens ces temps-ci n’est pas forcément bon tu sais ?

 — Je le sais... prononça Jad.

***

 Epuisé par la recherche ininterrompue de Jenson, Jad se décida enfin à rejoindre sa sœur jumelle. Lassement, la porte de la chambre réservée auprès de Max fît naître l’image d’une Kara assoupie sur un matelas trop étroit. Jad ne tarda pas à s’écrouler sur le second matelas de la pièce. L’aube illuminait quelque peu les cloisons par le biais des fentes du volet de la fenêtre. Tant de temps utilisé pour parcourir Gybor de fond en comble sans aucun signe, trace, indice nulle part. Le lit vide à côté du sien ne faisait qu’encourager des sentiments d’incompréhension, d’abattement et peut-être bien aussi de trahison. Kara ne tarda pas à sortir de son sommeil.

 — Tu ne l’as pas trouvé ?

 La question paraissait plutôt comme une évidence à son ton employé.

 — Non. Cet abruti n’est indéniablement plus ici-même, dans cette ville.

 — Donc on part, sans lui, ce midi chez les résistants, déclara Kara posément. Profites des quelques heures de repos, on a un bon voyage qui nous attend.

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