Chapitre 10 (1/2)

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En arrivant à la forge d’Udiir, Artha ne put qu’être stupéfaite. Comme tous ses sujets, elle connaissait la réputation de cette montagne et de la vallée qui se trouvait derrière. Jamais elle n’aurait pensé que quelqu’un puisse vivre dans un endroit pareil, encore moins construire une forge. Pourtant cet étrange individu l’avait fait depuis plus d’une décennie. La curiosité de la reine pour le chaman ne s’en trouvait que renforcée.

─ Votre majesté, dit alors la paladin, je n’aime pas cet endroit, je sens une présence inconnue, comme si nous entrions dans la juridiction d’une autre divinité.

─ Je suis d’accord, ajouta la magicienne, je sens les énergies primales qui parcourent la montagne et la vallée voisine, elles sont à leur paroxysme ici.

Prenant en compte ces remarques, la reine parcourut le plateau rocheux du regard. Elle vit alors, à l’opposé de la forge, les quatre monolithes dressés en cercle. À la vue des pierres, la reine éprouva un étrange mélange de peur et de respect. Le chaman, de son côté, s’afférait à retirer la selle de sa monture. Il entendit alors la reine l'interpeller pour lui demander :

─ Je pense qu’il est temps que nous abordions la question de tes pouvoirs Udiir.

Il se contenta d’acquiescer. Cette fois la question fut posée par la mage :

─ Tu n’es pas un mage, n’est- ce pas ?

─ Non, en effet dame mage, je suis un chaman.

─ Peux- tu être plus clair, demanda la reine ?

Udiir expliqua donc ce que signifiait sa vocation, son lien avec les esprits des éléments et ses pouvoirs. Lorsque le chaman eut terminé son récit, la guerrière sacrée eut un petit rire et dit :

─ Tu penses vraiment nous faire croire que les éléments sont vivants ? L’eau n’a pas de conscience, pauvre fou.

Udiir ne répondit pas, il se contenta de froncer les sourcils. Puis il se plaça au centre du cercle et prononça les mots suivants :

─ Bal’Ash, Aquos, Ignis, Gaïa, je vous demande d'apparaître ! Entendez mon appel !

Aussitôt ces paroles prononcées, les éléments se manifestèrent : la foudre zébra le ciel, la terre trembla et enfin les quatre seigneurs primordiaux apparurent sur le plateau.

À la vue des quatre esprits, les gorges des spectateurs se nouèrent et le sourire de mépris qu’affichait Silpha la paladin s’effaça aussitôt. La reine serra son trident à en faire blanchir les articulations de ses mains. Tous sentirent la puissance implacable, des entités qui se dressaient devant eux. Ils se tenaient en présence d’êtres, aussi anciens que le monde de Gaï-Rox lui-même, et lorsqu’ils prirent la parole, plus d’un chancela sous la force de leur voix.

─ TU NOUS AS APPELÉS CHAMAN ?

─ En effet esprits, je tenais à prouver votre existence auprès de ces charmantes personnes.

Les esprits fixèrent leurs yeux immatériels sur Artha et son escorte.

─ Ah, la dirigeante d’Erganane, dit Aquos.

─ Et une guerrière de Bal’Dar, ajouta Ignis.

Silpha était tétanisée, sa voix était bloquée dans sa gorge. Elle eut toute les peines du monde à parler :

─ Que…Qu’est-ce que vous êtes.

Gaïa s’esclaffa et son rire fit trembler le sol.

─ Nous sommes les seigneurs des éléments petite elfe et celui qui se tient en face de vous est un chaman. Notre bras armé et porte- parole dans le monde matériel.

─ Alors ne t’avises pas de remettre son statut en doute, ajouta Bal’ Ash.

Terrorisée, Silpha tomba à genoux et se mit à prier. La reine se plaça devant sa subordonnée et s’inclina brièvement devant les esprits.

─ Veuillez excuser Silpha, grands esprits.

Udiir sourit, dévoilant ses dents blanches et pointues, il ressentait un plaisir coupable de voir la guerrière sacrée perdre son masque de fierté et d’arrogance. Il respectait certes les guerriers sacrés de Bal’Dar, mais il n’appréciait guère le comportement arrogant, et l’attitude supérieure que certains d’entre eux développaient à cause de leur statut. Leur tirade terminée, les quatre esprits disparurent. Silpha tremblait encore comme une feuille, sa camarade mage tentant de la calmer. La reine Artha reposa ses yeux verts-marins sur le jeune forgeron. Bien qu’il se trouvât en sa propre demeure, Udiir se sentit tout à coup en insécurité. Il appréhendait la décision de la reine à son sujet.

─ Jeune Udiir, tu as d’autres réponses à me donner, dit la souveraine.

─ Je vous écoute Majesté.

Durant les longues minutes qui suivirent, Artha interrogea le chaman sur les événements qui l'avaient amené à intervenir sur le champ de bataille. Udiir résuma donc minutieusement ce qu’il c’était passé, notamment sa vision et sa perception des énergies démoniaques. Ayant été témoin de ses pouvoirs, la reine ne trouva aucune raison de douter de ses dires.

Artha posa alors la question que Udiir et tout sa famille attendait :

─ Une chose me taraude : d’où viens-tu ?

À quel peuple appartiens-tu ? De quelle race es-tu ?

Allisya intervint :

─ Je pense qu’il me revient de raconter cette partie de l’histoire, Altesse.

La sorcière raconta alors toute l’histoire. Elle n’omit aucun détail : elle expliqua comment Garam était arrivé au village, sa mort et ses dernières volontés. Puis comment son mari, et elle, avaient fait d’Udiir un membre de leur clan, ainsi que leur fils.

À la fin du récit de la sorcière, la jeteuse de sorts accompagnant la reine Artha prit la parole. Son ton trahissait son inimitié vis-à-vis du chaman et de sa famille :

─ Je ne vois pas en quoi votre histoire permet de prouver vos dires. Qu’est-ce qui nous prouve que votre « fils » n’est pas un espion envoyé par l’ennemi.

Udiir serra les dents jusqu’à se faire mal et ses yeux s’enflammèrent. Personne n’avait le droit d’insulter son clan et sa famille ainsi. Les deux s’étaient toujours montrés loyaux envers le royaume. Il dû se faire violence pour ne pas gifler cette magicienne qui osait insinuer le contraire.

Artha frappa le sol de son trident. Le tonnerre fit trembler la terre, et une bourrasque surpuissante souffla sur le plateau de pierre.

─ Il suffit Saskia ! Dit la reine en dardant un regard courroucé sur sa subordonnée.

─ Mais…Votre Altesse…Balbutia-t-elle.

─ J’ai dit suffit !

Devant la fureur de sa souveraine, la magicienne plia et se tut.

Artha se racla la gorge :

─ Alyssia, Roy, excusez la grossièreté de Saskia, elle se retourna vers Udiir, toutefois, je n’ai pas eu de réponse claire au sujet de tes origines jeune… « homme ».

─ C’est une question à laquelle je ne peux donner de réponse concrète.

─ Comment ça ?

─ Suivez-moi, je vais vous montrer quelque chose qui expliquera mieux ce que je veux dire.

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