Ch 7 (2/2)

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L’esprit de l’eau et de la terre attaquèrent de concert cette fois. Le premier projeta une rafale de sphères aqueuses tandis que l’autre faisait jaillir des pics de roche du sol.

- RASH’ANGUE GAÏA !!

Udiir avait prononcé ses mots de pouvoirs à toute allure. La terre se mit à vibrer, avant qu’une violente onde de choc ne fracasse les dards rocheux. Le chaman prononça à nouveau des paroles gutturales de son étrange dialecte, au moment où les obus aqueux fondaient sur lui avec la vitesse et la puissance d’une baliste. Le temps sembla alors ralentir, Udiir se plongea dans l’énergie primordiale de la montagne. La magie afflua comme un geyser dans son corps. Il s’appropria le pouvoir et prononça les mots porteurs de force et de pouvoir :

- MAL’ANGUE AQUOS !!

L’incantation s’acheva au moment même où l’attaque de l’élémentaire l’atteignait et au lieu de le blesser, les globes d’eau éclatèrent et se dissipèrent en plusieurs flux tournant en spirale autour du chaman. Plongé dans sa transe temporelle, Udiir contre-attaqua alors que tout autour de lui semblait être au ralenti.

- ZA’LANKO AQUOS !!
Le sort fut lancé et aussitôt les flux aqueux se muèrent en une lame d’eau qui déferla sur l’ondine avec la force d’un raz-de-marée, tranchant la roche du plateau comme du beurre, avant de provoquer une violente détonation. L’esprit de l’eau hors-jeu, le temps reprit ses droits et Udiir réalisa qu’il avait le souffle court et transpirait à grosses gouttes. Il avait lancé plusieurs sorts très puissants sans temps mort. Habituellement, il jonglait entre les sorts et le combat physique, laissant ainsi son énergie mentale se restaurer.

Le chaman sentit alors la peau de son dos chauffer. Il savait pourquoi ses tatouages s’étaient mis à briller. Ces étranges tatouages faits d’entrelacs et de runes, représentaient l’identité même du chaman, les quatre éléments y étaient représentés. Chacun des symboles était apparu lorsqu’il avait réussi à communier avec l’élément correspondant.

Après chaque épreuve, les symboles brillaient et il accédait à une nouvelle incantation, un nouveau secret. Mais c’était la première fois que les quatre symboles s’illuminaient en même temps. Les quatre esprits mineurs disparaissaient cédant alors la place à leur Seigneurs respectifs. Les quatre esprits, fixèrent le chaman de leur regard millénaire.

Aussitôt, un flot d’images traversa l’esprit de Udiir. Il vit les quatre forces se mêler en un seul courant pour ensuite déchaîner une irrésistible déflagration d’énergie primordiale pure.

- AHR'QUAN PROK RASH !!

Tels étaient les mots de cette incantation, et jamais ces mots ne quitteraient le chaman. Udiir expira longuement, laissant la tension de son corps retomber. Les esprits disparurent aussi vite qu’ils étaient apparus. Le chaman maugréa, il n’aimait pas cette manie des éléments. Il aurait voulu les questionner à nouveau sur ses origines et sur les raisons qui avaient poussé son géniteur à fuir les amazones jusqu’à cette montagne, ou encore leur demander simplement le nom de son peuple et sa race.

Mais il savait déjà que les esprits ne lui répondraient pas, selon eux ce n’était pas leur devoir de donner cette réponse à Udiir, mais au jeune chaman de la chercher lui-même. Il ne connaissait qu’une partie de la réponse : la raison pour laquelle son père biologique l’avait amené sur ce territoire.

Udiir se détourna du cercle monolithique, pour se diriger vers la paroi de la falaise opposée à sa forge. Il posa sa main calleuse sur la pierre et dit :

- MAL’ANGUE GAÏA !!

La roche se disloqua en 2 blocks, formant une porte s’ouvrant sur un tunnel creusé dans les entrailles de la montagne. Udiir s’y engouffra. Tout le long du couloir, des braséros étaient disposés. D’une simple incantation, le chaman les alluma. La lumière des flammes illumina le corridor.

Après 5 minutes de marche, Udiir arriva dans une large pièce de forme circulaire. Là encore des braseros étaient disposés sur les murs. Il les alluma tous laissant apparaitre des murs de roche couverts de runes primordiales et de peintures rupestres. Elles représentaient des scènes de batailles, ou encore des rencontres entre des peuples. Ce qui ne faisait pas sens pour le commun des mortels était limpide pour Udiir.

La première partie de la fresque racontait les origines du clan Arginane. Il y a plus de 700 ans, aux alentours de l’an 1450, les ancêtres des Arginanes avaient atteint la montagne. Ils y avaient établi leur campement, mais à leur grande surprise la Montagne et la vallée environnante, étaient déjà occupées par une race inconnue. Les humains nomades et le peuple inconnu s’entendirent bien. Les seconds apprirent aux premiers l’art de la forge et de l’agriculture. Le récit évoquait également un étrange pouvoir que ce peuple exerçait sur l’environnement.

Cette coexistence dura pendant près d’un siècle, après quoi les membres du peuple mystérieux avaient quitté les terres du futur Erganane. Mais avant de partir ils auraient laissé un cadeau, ou plutôt ils auraient « béni » la montagne et les mines des Arginanes.

La seconde partie, plus récente, datait du début de la grande guerre qui avait opposé l’empire d’Inguadia à la coalition des clans humains, vers 1720. Apparemment un membre de cet étrange peuple était revenu s’établir sur la montagne des éléments et avait assisté les Arginanes dans leur lutte contre les amazones esclavagistes de l’époque. Les peintures racontaient comment il déchaînait la foudre depuis le sommet du pic ou encore comment il avait fait jaillir les montagnes et le feu des entrailles de la terre sur le champ de bataille.

Il y avait une scène qui intriguait Udiir. Elle représentait l’ermite de la montagne en compagnie de deux silhouettes humaines. La première, masculine, était marquée par l’emblème du clan et la seconde, féminine, par un sceau similaire à celui que la famille royale arborait aujourd’hui. La scène en elle-même montrait ces trois personnages forgeant un trident. À côté du schéma de l’arme, on pouvait y lire ce qui sans doute était le nom de la lance : PARK’TLOS, « Qui transperce la tempête ».

Ce qui troublait Udiir était la deuxième partie de la fresque. Certes, plusieurs légendes faisaient référence à cet étrange personnage, mais les historiens du royaume avaient toujours démenti son existence. De plus aucun récit ne disait qu’il avait pris part à la création d’un trident avec le clan des guerriers-forgerons. Le seul trident que les Arginanes avaient forgé à cette époque était celui de l’ancêtre de la reine Artha et le nom public de cette arme était Triguane. Il se demandait sans cesse si la reine ne cachait pas des informations. Pourtant le plus important de l’histoire de la fresque ne résidait pas dans cette étrange scène, mais dans la nature du mystérieux peuple.

Udiir porta son regard sur la peinture censée représenter les membres de cette race. On pouvait voir un immense portrait détaillant les contours d’un faciès bestial pourvu de défenses et d’oreilles pointues. En somme, le portrait craché du jeune chaman.

Lorsqu’il avait découvert cette grotte il y a 2 ans au cours de son apprentissage, il en avait aussitôt informé sa famille et les y avait emmené. Tous en étaient restés bouche bée. Ces peintures confirmaient la véracité de beaucoup de légendes. Mais surtout celle du fameux peuple Primordiale qui aurait béni le minerai de la montagne.

Cependant, la partie concernant la guerre Amazone-Erganienne, en laissa certains dubitatifs en dépit de l’authenticité de la fresque. Après tout, personne à part la reine n’avait eu le luxe d’inspecter son trident, il était donc difficile d’en vérifier la nature.

Toute cette histoire offrait cependant une réponse à Udiir : Garam était venu ici avec son enfant afin de le cacher sur cette montagne, là où leurs ancêtres avaient vécu. Mais probablement surtout en raison des pouvoirs que son fils allait développer. En effet le pic et la vallée située de l’autre côté étaient enveloppés par une puissante énergie magique, et d’après Arya, le chamanisme de Udiir provenait de la même énergie.

L’énergie que Udiir dégageait en usant de ses pouvoirs de chaman était détectable par n’importe quel mage suffisamment entrainé, ou tout autre personne sensible à la magie. Garam devait le savoir et par conséquent son fils devait être caché là où l’on ne pouvait pas le repérer. Il avait donc mis le cap vers la montagne des éléments pour finalement y mourir en confiant son enfant au clan Arginane.

Udiir essuya ses yeux, une fois encore ils étaient devenus humides en pensant à son père biologique. Il s’assit sur le sol froid de la caverne et resta ainsi pendant de longues minutes.

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