Chapitre 38

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Paris

Comme souvent, Julie s’était couchée très tard, après avoir passé une bonne partie de la nuit à dialoguer avec des collègues et amis outre-Atlantique. Ce fut la sonnerie de son portable qui la réveilla peu avant dix heures. Il lui fallut un moment pour pleinement réaliser et mettre la main sur l’appareil. Trop tard, la messagerie avait pris le relais. La jeune femme se dit qu’il valait mieux qu’il en fût ainsi, elle ne se sentait pas au top de ses capacités au saut du lit. Elle reconnut le numéro d’Ange Ségafredi et écouta le message. Il était minimaliste. « Merci de me rappeler ».

Julie choisit d’attendre un peu avant de retourner l’appel. Le temps de prendre une douche et de se préparer un café.

Elle ôta la vieille chemise qu’elle avait portée pour dormir et se dirigea vers la cuisine pour lancer la cafetière. Elle n’ignorait pas que sa tenue risquait d’attirer les convoitises de quelques vieux voisins solitaires, mais elle n’en avait que faire. Elle se savait attirante et assumait pleinement sa nudité.

Quinze minutes plus tard, une serviette serrée autour de la poitrine et les cheveux encore humides sur les épaules, elle appela le policier. Celui-ci répondit aussitôt.

— Il y a du nouveau pour l’affaire des quatre femmes. Nous pensons avoir identifié les membres du groupe, du moins les plus actifs, et nous allons lancer une opération synchronisée.

— Bonjour à vous aussi, monsieur le policier, répliqua la journaliste avec espièglerie. Dois-je prendre cet appel pour une invitation ?

— J’ai parlé au procureur hier soir, et aussi avec le commissaire ce matin. Ils ont accepté de jouer le jeu jusqu’au bout, mais avec quelques conditions.

— Lesquelles ? demanda Julie immédiatement.

— Premièrement, vous ne devez en aucun cas vous exposer à quelque risque que ce soit. Nous ne pensons pas qu’il y aura une réaction violente, mais on n’est jamais certains de rien. Gilet obligatoire, et vous restez toujours derrière moi.

— J’ai travaillé en zone de guerre, je sais ce que peut faire une balle perdue.

— Justement, pas question que votre ami joue les Capa ! Et puisqu’on parle de photos, il est hors de question que vous publiiez des images des personnes interpelées ou des vues reconnaissables de nos équipes. Des plans d’ensemble, pris depuis l’arrière, la préparation de l’intervention, sans visages, OK. Mais dans l’action, je ne peux pas vous sentir dans mes jambes. Est-ce qu’on est bien d’accord ?

— Ce n’est pas négociable, je pense.

— En effet, et il va me falloir beaucoup de persuasion pour vendre ça au reste de l’équipe, ajouta le commandant.

— Je comprends. Je vais en parler avec John, mais je pense qu’il n’y aura pas de problème. Sur le terrain, c’est moi qui dirige et il ne fait que ce que je lui demande.

— Très bien. Je ne peux pas vous autoriser à suivre notre briefing ce soir, pour des raisons évidentes de confidentialité. Je vous fais confiance, mais il y a des limites que je ne peux franchir. Je vous communiquerai en début de soirée l’heure et le lieu du rendez-vous, mais je peux déjà vous dire que ce sera très tôt.

— Pas de soucis, nous sommes des professionnels.

— Je vous dis à demain alors. Je dois vous quitter, comme vous l’imaginez, j’ai une journée chargée.

— Ange, le diner que tu m’as promis hier, c’était sérieux ?

Le policier remarqua le changement de ton.

— Oui, c’était sérieux, Julie, mais pour le moment, il faut vraiment que je te laisse. Si tout se passe bien, dans quarante-huit heures, tout sera plus facile.

— Je serai patiente, conclut la jeune femme en mettant fin à la conversation.

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