Gun & Jeff

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Les habitudes rythmaient notre quotidien sur le campus. Outre cet éternel chemin vers les bâtiments de cours, bercé par la Lettre à Élise de Beethoven, nous avions chacun nos rituels et nos sorties, en solitaire ou entre amis.

Le dimanche, je profitai de l’accalmie pour faire quelques séances de badminton avec Gun et Jeff. Ces deux gaillards m’avaient fait aimer ce sport au premier semestre puis le détester au second. En cherchant à me mesurer face à des Chinois, la frustration prenait le pas sur le plaisir.

Gun représentait le vétéran de mes amis proches. Coréen aguerri et indépendant, ses épaules solides soutenaient une tête froide d’une extrême gentillesse. Sans lui, je n’aurais d’ailleurs pas pu survivre en Corée du Sud, mais c’est une autre histoire. Je garde encore contact avec lui, il a même rencontré mes parents au cours de leur séjour à Séoul.

Trilingue, il trouvait des solutions à tout le monde sur le campus. Notre rencontre a été l’une des plus fortuites de mon échange, et j’en remercie le destin. Avant la rentrée, Na et moi avions décidé de faire le tour de la petite place près des logements, où se retrouvaient les étudiants pour faire la fête. Fraîchement arrivé, je ne connaissais personne, et le nombre de Coréens inscrits limitait mes choix de nationalité, ce qui n’était pas pour me déplaire.

Après un rapide coup d’œil, je proposai à Na de rejoindre un groupe de Coréens autour d’une table ronde. Cette sélection aléatoire m’amena à une des amitiés les plus durables de mon expérience.

Et, accessoirement, me confia le surnom universel du « Blanc qui parle coréen ».

Jeff est anglais, de la banlieue de Londres. Nous avons fait connaissance bien plus tard, dans le gymnase, par le biais de Gun. C’est un compétiteur né : il aime les défis, n’a pas peur de de surpasser et bosse dur pour arriver à ses fins. J’ai pu le constater lorsque nous travaillions ensemble sur l’épreuve du HSK 5[1]. Pas un seul jour ne passa sans qu’il ne décroche de ses livres, sauf bien sûr lorsqu’il s’agissait de badminton.

En bon anglais, il aimait également sortir et boire de l’alcool. Mais loin de là l’idée du stéréotype, il n’a jamais eu d’altercation avec qui que ce soit, malgré le nombre de personnes éméchées au mètre carré dans des bars étroits.

Contrairement à nous, Jeff suivait une licence à l’université et avait signé pour quatre ans. C’est une personne dont j’apprécie grandement la compagnie : tolérante, droite dans ses bottes, la tête sur les épaules, soucieuse des autres. Il est un humain à part entière, qui œuvre pour faire le bien, bien qu’il souffre à l’étranger de l’image négative de son pays. Conscient de ses défauts, il s’attèle à redorer le blason de la reine.

Entouré par ces acolytes de confiance, et pour tous les autres mentionnés en amont, le quotidien à Dalian se coloriait de nuances diverses, exposé à une multitude de cultures et de visions du monde, elles-mêmes confrontées à mon expérience.

[1] HSK = Hanyu Shuiping Kaoshi (汉语水平考试) , « Test de niveau de chinois ». Le niveau maximum est de 6.

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