(MEN TIR) ce n'est jamais bon

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Revivre ses souvenirs lointains me fait énormément de mal, parce que je me rappelle qu'à une période de ma vie, j'ai été très heureuse ici. Et bien malgré moi cela me provoque immédiatement de nouvelles larmes que je peine à contenir. Je fuis l'oliveraie aussi vite que mes jambes le peuvent. Et chaque pas que je fais est aussi malhabile et pénible que mon cœur qui saigne. J'ai la sensation de suffoquer, d'être à bout de souffle comme si une pression venue de nulle part me comprimait la poitrine.

C'est pénible d'être là sans pouvoir oublier cet amas de sentiments confus qui m'emprisonne l'esprit dans une rancœur tenace. J'ai beau me mentir à moi-même, je n'arrive pas à me sortir le passé de la tête. Absolument, tout me ramène aux événements d'il y a six ans. Quoique je puisse murmurer du bout de mes lèvres. Mon cœur, connais la vérité et sait que la blessure que je porte en bandoulière est immense. Papi Lou à raison, je les hais. Mais est-ce une bonne chose ?

Avant même de réaliser ce que je fais, je me retrouve dans ma chambre avec une des lettres de mon grand-père à la main. Si je veux en savoir plus sur cette histoire et comprendre comment tout cela à commencé, il me faut absolument prendre connaissance de ces cent cinquante-deux lettres. L'antipathie de ma famille à mon encontre ne peut pas uniquement venir de l'accident provoqué par Viviana.

Je suis certaine qu'il y a bien plus que ce que je sais pour le moment. Ce qui n'est définitivement pas chose aisée, car j'ai l'impression de violer une intimité qui ne m'appartient pas de pénétrer. Or, il semble que ce soit le seul moyen de saisir ce qui a pu se passer sur le domaine Laugier il y a soixante-cinq ans de cela. On dirait que ce lieu renferme beaucoup de secrets malheureux et pour être honnête, j'ai peur de ce je pourrais découvrir d'autres.

C'est avec une curiosité manifeste teintée de respect que je me permets d'ouvrir la première enveloppe. Mon cœur bat la chamade quand je me rends compte que ce n'est pas mon grand-père qui l'a écrite, mais ma grand-mère maternelle. La fameuse Cassandre, cette femme que Papi Lou semble avoir beaucoup aimée.

Mercredi 18 Mars 1953

Mon cher Louis,

Depuis ce bal de printemps, je n'arrive pas à te repousser. Dis-moi comment y parvenir ? Car bien que je te sache promis à une autre, mon cœur lui reste accroché à cet instant volé dans l'oliveraie. Je sais que je n'aurais pas dû m'enfuir après notre nuit d'amour mais sincèrement je ne savais pas quoi faire d'autre. Toi et moi voulons des choses qui sont impossibles et je pense que nous ferions mieux de nous résigner.

En te regardant de loin sans pouvoir être à tes côtés, je me blesse constamment. Regardons les choses en face Lou, nous ne pourrons en aucun cas vivre notre amour au grand jour. À quoi te sert-il de persister ? Nos familles n'accepteront jamais ce que nous représentons. Penses-tu vraiment que nous pourrions tout abandonner pour être ensemble ? Nous n'avons pas le droit d'être si égoïste, nous ne pouvons pas faire du mal autour de nous, Louis.

Je sais déjà ce que tu me dirais si j'étais auprès de toi. Mais avons-nous seulement le droit de ne penser qu'à nous ? Je t'aime Louis. Je t'aimerai jusqu'à mon dernier souffle, mais j'ai pris ma décision, nous devons en finir. Nous n'aurions même pas dû commencer. Plus que nos problèmes de famille, je ne souhaite pas être l'autre femme. Parfois, l'amour ne suffit pas toujours.

S'il te plaît, Lou soit heureux et oublie-moi.

Cassandre.

Je relis la lettre un bon nombre de fois. Sauf que je peine à comprendre pourquoi une histoire qui avait tout juste commencé devait être voué à se terminer aussi rapidement. Alors que je me creuse les méninges, des coups frappés à la porte de ma chambre m'interrompent. À travers l'épaisseur de celle-ci, j'entends quelqu'un m'appeler.

- Aélys, tu es là.

Je distingue la voix de Léo, que j'invite à entrer. Mon cousin pousse la porte et s'assoit près de moi sur le lit. Je sais parfaitement qu'après mon coup d'éclat de cette après-midi une discussion s'impose. Sauf que je ne me sens pas d'humeur, mais j'ai la certitude que Léo ne lâchera pas l'affaire.

- Putain Lys, quel bordel !

J'éclate d'un rire sarcastique et lui demande.

- Sérieusement, tu t'attendais à quelque chose d'autres ?

Il souffle, passe la main dans ses cheveux et me répond comme abasourdie.

- À beaucoup de choses, mais certainement pas à un scandale de cette taille. Bordel Lys, tu leur as juste lâché des missiles sur la tête.

Je hausse les épaules comme si j'étais d'une indifférence pure.

- Que voulais-tu que je fasse ? Je ne pouvais plus faire semblant.

Il contre de suite mon propos.

- Il y a plus que ça et tu le sais bien Lys. Avoue plutôt que grand-père Lou malgré lui t'a offert au nom de la vérité une superbe vengeance sur un plateau d'argent. Je me demande s'il savait que tu utiliserais ces informations à cette fin.

Il arbore une mine dégoûtée.

- Sérieusement, j'ai cru pendant un moment que Diana et Viviana allaient t'arracher les yeux. Après ton départ, la salle à manger s'est transformé en vrai marché aux poissons. Il y a eu des cris, des disputes, des accusations. Bon Dieu, ma belle, une véritable maison de fous !

J'entrevois le tableau qu'il tente de me décrire, mais je préfère hausser les épaules comme si ce n'était rien. Or, je mens comme une arracheuse de dents, car toute cette merde me touche profondément. Léo reprend et m'informe tout de même de l'étendue des dégâts.

- Notre famille est au bord de l'implosion, Lys. Tu viens d'apposer un coup de pied magistral dans une putain de fourmilière. Et même si, la tête décomposée de ces deux salopes valait son pesant d'or, tu dois reconnaître que tu n'y es pas allé avec le dos de la cuillère chérie.

J'observe mon cousin en affichant un rictus mauvais et rétorque quelque peu méchante.

- Mentir ce n'est jamais très bon.

Il ricane, puis me balance moqueur.

- Et c'est toi qui dis ça, Lys ?

Je le regarde perplexe.

- De quoi tu parles enfin ?

Il éclate vraiment de rire cette fois.

- J'espère que tu réalises que tu aimes toujours Arnaud. Tu comptes arranger les choses avec lui ?

J'examine Léo avec dédain.

- Tu plaisantes, j'espère. Il n'en est pas question. Si je suis revenu à Aix, ce n'est certainement pas pour renouer avec lui. Je viens juste d'apprendre que des gens que je pensais connaître m'ont menti toute ma vie. Crois-moi quand je te dis que nous deux, c'est de l'histoire ancienne.

Il m'observe comme s'il ne croit pas un mot de ce que je dis, mais je m'en fiche.

Pensive pendant une minute, je lui sors la même phrase que grand-mère Cassandre a servie à Papi Lou.

- Parfois, Léo, l'amour ne suffit pas toujours.

Mon cousin secoue la tête.

- C'est quoi ces conneries ? Tu as toujours de l'amour et tes sentiments en toi Aélys, ils ne vont pas disparaître parce que tu es en colère.

- Mais de quel côté es-tu ?

- Du tien, toujours du tien.

Puis sans demander son reste, il s'en va.

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