Chapitre 4 - “L’adolescence est comme un cactus.”

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Violette Kohler glissa ses orteils fraîchement manucurés sous sa housse de couette tartan.

Pour une fois qu’elle se retrouvait seule dans sa maison bourgeoise ! Quel pied !

Joséphine, sa sœur aînée, dormait chez Steph', une de ses camarades de classe et ses parents, quant à eux, squattaient pour la journée la villa des Muller, leurs amis de longue date. Au programme : pendaison de crémaillère, huîtres et messes basses.

Une fête des plus alléchantes ! ironisa-t-elle.

À l’heure qu’il est, ils étaient probablement sur le chemin du retour. Cette pensée mina Violette qui s'était réjouie à l'idée de braver quelques interdits.

Elle porta un verre de Schnaps à ses lèvres, profitant de ses derniers instants de solitude. L’adolescente grimaça.

Elle détestait les alcools forts...

Or, si elle souhaitait que sa première année de lycée se déroule sous les meilleurs hospices, elle devait tenter de nouvelles expériences. Elle n’avait qu’un an pour briller. Sirotant son verre, elle visualisait déjà son entrée en seconde. Elle porterait un top de coton noir suffisamment moulant pour dévoiler ses formes assorti à une jupe courte qui laisserait entrevoir sa petite culotte.

Un scandale !

Encourrait-elle l'expulsion ?

Qui sait...

Son corps entier s’émoustillait face à cette perspective.

Elle songea à l'image qu'Alo s'était fait d'elle, celle d'une adolescente douce, intelligente, se contrecarrant de l'opinion d'autrui. Il n'approuverait très certainement pas son petit manège. Mais comment lui dire, sans le briser, que celle-ci n’était que le fruit de son imagination ?

Contrairement à ce que croyait Alo, Violette aimait être une reine des abeilles. Elle cultivait l'espoir de se faire des amies qui la propulseraient sous le feu des projecteurs. Bien qu'elle ne voulait pas faire une croix sur Knut et Alo et qu'elle ne tenait nullement à ce que leur amitié vole en éclats, elle ne pourrait plus se permettre de chasser les extraterrestres avec eux. Et ce, même si elle s’en sortait bien mieux que la moitié de Bitterburg ! Ses escapades nocturnes passeraient désormais au second plan.

Elle attrapa ses épaisses lunettes rondes qu’elle avait délaissées.

Il n’y avait rien de plus terrible que de réfléchir sans rien voir !

Le téléphone sonna au moment où un grêlon s’écrasa contre la fenêtre. Violette enfila ses pantoufles en tissu duveteux vert d’eau, descendit les marches quatre à quatre et s’empara du combiné.

— Chérie ? Tu m’entends ? brailla Frank Kohler.

La ligne grésillait, la faute à ces intempéries.

— Brièvement, répondit la jolie brune, peinant à masquer sa déception.

Elle aurait aimé qu’un ou une de ses camarades de classe lui souhaite un joyeux anniversaire ou que l'un d'entre eux lui propose de sortir boire un chocolat chaud au Café de Devi. Manque de pot, ce ne serait pas pour ce soir.

Violette enroula le cordon à spirales entre ses doigts.

— Les Muller nous ont proposé de rester pour la nuit.

Le combiné, prêt à rendre l’âme, émettait une tonalité aussi faible que soit le débit.

— Il pleut des cordes là-bas, impossible pour nous de prendre la route.

Violette manqua de perdre l’audition lorsqu’un son strident retentit.

— Papa ? Allo ?

Hors service.

Manquait plus que ça ! rouspéta-t-elle, en rongeant l'ongle de son pouce. Et pour couronner le tout, sa propre famille semblait avoir zappé son anniversaire. Pas de cadeau cette année…

Elle raccrocha dépitée.

***

Bill Sutter, la soixantaine bien entamée, porta une Philip Morris à ses lèvres et s’installa sur son rocking-chair. Bien que l’orage battait son plein, la nuit lui semblait douce. Le vieil homme expira la fumée par le nez. Pilot, son berger allemand, se coucha à ses côtés en gémissant.

— Bah alors mon vieux, que t’arrive-t-il ? C’est encore ton satané arrière-train ?

L’animal le fixa, sans un bruit.

— Mouais. Encore un de tes caprices pour attirer notre attention. Vilain bougre !

Pilot dressa l’oreille gauche, feignant de ne pas l'entendre. Quelque chose d'autre semblait capter son attention.

— Quoi encore ?

Le berger allemand fixait avec insistance la maison voisine : le joli pavillon des Kohler.

— Qu’as-tu vu ? lança Bill, tout en écrasant sa cigarette sur le perron.

Le vieillard se redressa, croisant les doigts pour que Marthe, son épouse, ne s’en aperçoive pas. Alors qu’il s’apprêtait à camoufler les restes de son mégot, il la vit : cette Golf1 Cabriolet postée devant l’entrée des Kohler.

Une vraie beauté.

Sacrés veinards ! songea-t-il.

Pourtant Bill rêvait de s’offrir ce "bijou"depuis des années.

— Laissez cette petite merveille sur un trottoir. Quelle indécence ! maugréa-t-il. Allez viens Pilot, rentrons.

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