J’ai tant imaginé ce moment (2/2)

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J’entends la femme fredonner, allumer la lumière et, après quelques pas qui la mènent jusqu’à moi, poser quelque chose, me semble-t-il.

Le frottement qui parvient à mes oreilles me pousse à croire qu’elle prend un objet métallique. Soudain, un détail me revient. Si personne n’est à côté de moi, pourquoi, moi, ai-je été emprisonnée ? Est-ce qu’elle tentait de se calmer tout à l’heure pour ne pas me frapper ? Et surtout, il est évident que ce n’est pas à moi qu’elle parlait, mais alors, à qui d’autre ?

J’en suis là de mes réflexions quand elle enlève mon bandeau avec brutalité.

À demi aveuglée, je me retrouve nez à nez avec une femme, comme je m’en étais douté. Elle tourne la tête et je remarque ses cheveux remontés en un chignon impeccable. Son maquillage est sans défauts et ses lèvres d’un rouge sang.

S’est-elle douchée et faite belle rien que pour moi ? Tout à l’heure, elle frappait comme une diablesse, et maintenant, elle est toute pimpante ?

Cela dit, rien de tout ça ne lui va. Avec son nez de travers, sa cicatrice qui court tout le long de sa joue et son regard qui me fait froid dans le dos… Peut-être qu’autrefois elle était belle, mais aujourd’hui, elle a le visage maigre et ses yeux laissent transparaître une femme détruite.

Elle fredonne de nouveau en s'observant dans le reflet de l’objet qu’elle tient entre ses doigts : un couteau. Une goutte de sueur froide coule le long de mon dos et je me liquéfie sur place.

— J’ai tant imaginé ce moment… Et ne t’inquiète pas. J’ai de l’expérience dans ce domaine.

Afin de me prouver ses dires, elle soulève son gilet et mon regard est attiré par le nombre incroyable de cicatrices qui jalonnent sa peau. Je pâlis et un haut-le-cœur me prend.

C’est ce qu’elle compte me faire subir ?

Je n’arrive pas à détacher mes yeux exorbités de ses multiples marques, certaines plus claires que d’autres. La bile me monte à la gorge et je commence à m’étouffer.

— Pas terrible, hein ? dit-elle en regardant son propre ventre. Et, sais-tu pourquoi j’ai subi tout ça ? Car je suis allé en prison, pour le meutre de mon mari que je n’ai pas tué. Mais toi, tu dois bien le savoir, hein ? Alors ? Comment est-il mort ? s’écrie-t-elle.

Je ne sais pas… et je m’en fiche, car je me dis que finalement, je vais décéder, là, sans avoir vécu la torture qu’elle me prévoit. Et j’en suis étrangement soulagée. Je crois que je ne serais pas de taille à le supporter alors je préfère encore en terminer maintenant, en m’étouffant dans ma propre bile.

Elle arrache mon scotch d’un coup sec et violent. Par instinct de survie, j’expulse le contenu de ma bouche et respire une grande goulée d’air.

Elle me regarde, mi-exaspérée, mi-agacée et se lève. Elle passe la porte, mais la laisse ouverte. Elle va revenir. Mais pourquoi s’en aller ?

Je profite de son absence pour regarder si je peux me détacher. J’étudie la chaise et constate qu’il y a en effet une chaîne à un des pieds. Puis j'observe partout dans la pièce. J’ai l’impression d’être dans un petit entrepôt bas de plafond. Il y a quelques cartons, mais ce qui accroche le plus mon attention est ce sac de frappes. Aucun corps par terre, et aucune souris

La femme revient, je la vois apparaître dans l’encadrement. Elle referme la porte d’une main tandis qu’elle tient une bassine de l’autre.

Une fois en face de moi, je n’ai pas le temps de me questionner qu’elle m’asperge d’eau glacée.

Puis, elle prend une serviette qui traînait par là et commence à me sécher. Je me mets à trembler misérablement.

Mais que me veut cette femme, bordel ?

— Je ne tiens pas que tu meures d’une pneumonie, dit-elle d’une voix aussi froide que l’eau. Mais que tu succombes à tes blessures.

Alors, elle jette la serviette aussi trempée que moi au loin, et empoigne le couteau. Elle soulève délicatement mes vêtements pour caresser mon ventre du bout des doigts. Je la regarde faire, pétrifiée. Puis, d’un geste vif, elle fait glisser la lame sur le long de ma peau, juste en dessous de mon nombril, en une ligne horizontale. Pas assez profonde pour me tuer, mais assez pour me faire hurler de douleur. Et ce n’est que le premier coup d’une interminable série.

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