Pour quand… voilà quoi ! (1/2)

4 minutes de lecture

Vert ? Tu es sûr de ton coup, là ? me demande Lucas.

— C’est soit ça, soit un jaune tournesol… Je n’en ai pas d’autres, ils sont tous au sale, marmonné-je comme si Lucas était à côté de moi…

Dix minutes que j’ai « accepté » (ou toléré ?) sa présence que je commence déjà à être flippante.

Carrément. En attendant, si tu comptes toujours porter ton débardeur blanc, mets le soutien-gorge jaune. Le vert va se voir dessous… Logique. Trop logique. Elle n’a pas la fibre de la mode ? Ce n’est pas une fille ?

– Oh ! Le cliché ! m’insurgé-je. Je me fiche de la mode, nuance.

Mon Dieu !

– Non, moi c’est Rachel, mais merci.

Pff ! et je le ressens vaguement lever les yeux au ciel.

– Je prends ce qui me vient sous la main, confessé-je. Et puis c’est tout. Pas la peine de passer des heures entières à me préparer.

Hun, hun… J’imagine.

– Du moment que je ne suis pas ridicule… Allez, de toute façon, il caille, je prends un gilet.

Quoi ? Tout ça pour ça ? s’exclame-t-il.

– Hé ! C’est toi qui en as fait tout un plat, je te rappelle ! D’ailleurs, t’es vraiment un mec ? C’est la première fois que j’en vois un si calé en mode…

Et c’est elle qui parle de clichés…

Mince ! Et moi qui condamne le sexiste... me réprimandé-je.

C’est parce que je dois me farcir les émissions de ma mère de temps en temps, m’explique-t-il.

Je souris jusqu’aux oreilles, très amusée. Et avant qu’il ne m’attaque de nouveau sur mon style vestimentaire, je frappe en première :

– Sinon, tu restes couché au lit encore longtemps ? Tu ne vas pas en cours ? Allez, hop, hop, hop, c’est à ton tour de te ridiculiser !

Nan… la flemme. Je suis bien, là…

– Paresseux !

Je glousse et me sers un bol de céréales sans faire de bruit pour ne pas réveiller mes parents. Ils sont rentrés tard, ils ne se lèveront que vers midi.

Pourquoi ?

– Ils travaillent souvent de nuit à l’hôpital.

Ah. Tu les vois de temps en temps ?

… Non.

– Oui. Ils ont parfois leur week-end.

… D’où le chien, pour me tenir compagnie.

Tu sais… j’entends tout, dit une voix gênée dans ma tête.

– Ouais, bah, fais comme si ce n’était pas le cas. Merci.

Hé ! Boude pas, ricane-t-il.

Mes lèvres s’étirent en un sourire de chat.

Oh, oh !

– Exactement. Tu vas voir quand viendra ton tour…

En écho au sien, mon cœur fait un bond et je sursaute, surprise.

– Quoi ? Tu as tant de choses que ça à cacher ?

Tu n’as pas idée… dit-il, malicieux.

– Du moment que tu n’es pas un sérial killer… enfin, nan, me dépêché-je d’ajouter de peur de vexer un hypothétique meurtrier. Que tu le sois, c’est OK, mais dans ce cas, s’il te plaît, ne m’approche pas.

L’amadouer pour ne pas me faire tuer…

Serial killer… T’es vraiment une comique, Poupée.

Il a beau en rire, j’ai une sensation de malaise qui m’oppresse, mais je n’arrive pas à saisir son origine.

Je reste attentive à ses pensées et ses émotions, sauf que je n’y comprends plus rien. Elles sont comme brouillées.

Écoute, reprend-il tout à coup très sérieux, à tel point que je ne le reconnais presque pas. Nous avons tous les deux des jardins secrets, tu l’as dit toi-même cette nuit, et je préférerais qu’ils le restent. N’essaye pas de comprendre, et j’en ferai de même.

– Désolé, m'excusé-je, un peu piteuse et douchée.

Il est lunatique, ou… ?

– Cependant..., tenté-je. Tu conviendras que penser est inconscient et il y a peu de chance pour qu’on puisse vraiment se contrôler.

En effet. À ce sujet, j’ai réfléchi à un truc, dit-il, plus léger. Tu as des écouteurs et de la musique ?

Je sors mon casque de mon sac d’école qui attend par terre près de la porte d’entrée de la maison, ayant compris où il veut en venir.

Bien. Pas besoin d’expliquer donc, pense-t-il pour lui-même. Mettre les écouteurs… Quelle musique ? Une bien forte. Ah, oui, celle-là.

Mes pensées s’accordent aux siennes.

— Je suis prête, dis-je tout haut, avant de me rappeler que je suis toujours chez moi.

OK. On fait tourner dix secondes, puis on revient aux nouvelles. Ça te va ?

– Oui, Chef !

Non, moi, c’est « Maître », Poupée. Retiens bien : « Maîîître », articule-t-il exagérément.

– Crève !

Je ne peux m’empêcher de rire. Lui aussi.

Allez go. À dans dix secondes.

Je monte le son.

Je l’entends toujours. Monter encore un peu.

Je l’imite.

– Allo ? Et là ? Tu m’entends ? vérifié-je.

Rien. Le silence total. Enfin, si on fait obstruction de la musique qui me dynamite les tympans. Oh ! Mais, c’est que ça marche vraiment en fait ! C’est une idée de génie !

Je rebaisse le son, histoire de faire mon rapport, et de me soulager un peu, tandis qu’il est fier comme un paon.

Elle m’a qualifié de « génie » ! jubile-t-il, avant de rire d'un air machiavélique.

Alors comme ça, il peut percevoir mes pensées même si je ne capte plus les siennes ? Il a dû arrêter le son avant moi. Intéressant…

– Du calme, repris-je. Je t’entends, et puis, tu vas finir par me faire peur.

Eh bien, elle mettra le son, dans ce cas, dit-il pour lui-même.

Personnellement, je n’ai rien entendu, explique-t-il à mon intention.

– Idem.

Donc, élément indispensable pour quand… voilà quoi !

« Voilà quoi » résume en beauté nos petits secrets gênants – ou pires…

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