Il n’est plus là.

Il n’est plus là ?

Il n’est plus là !

Je fais le vide dans mon esprit. Je ne sais même plus quoi penser. Il était présent dans ma tête, et soudain, il a disparu. Mais, si je suis folle et que je mène la danse, je devrais pouvoir le ramener, non ? Mais, est-ce que je le veux réellement ? Non, non, non ! Je veux juste qu’il disparaisse. Pour toujours. Sauf que j’ai besoin de savoir ce qu’il m’arrive.

– Lucas ? Lucas, tu es là ? l’appelé-je en pensée.

Le silence perdure et je retente ma chance.

– Lucas ! Reviens !

Bon Dieu, si c’est moi qui l’ai créé, je devrais être en mesure de le ramener, alors pourquoi n’est-il plus avec moi ?

Parce qu’il ne provient pas de ton imagination ? soupire la petite voix de la raison dans ma tête.

Impossible !

Je me frotte les tempes, puis l’arête du nez. Je sens déjà venir la migraine…

C’est un véritable cauchemar. Je ne sais même pas si j’ai envie d’avoir une réponse à tout ce bazar, ou si je préfère rester dans l’ignorance toute ma vie, sous réserve qu’il ne remette jamais les pieds dans mon crâne.

Et s’il s’avère que je suis vraiment folle ? Que vais-je devenir ? J’imagine déjà un lit blanc, quatre murs grisâtres, des barreaux aux fenêtres, et une camisole de force. J’en aurais bien ri… mais j’en suis malheureusement incapable.

Est-ce que cette horreur va se reproduire ? Et ce, avec toujours la même voix ? Combien de temps cela dure-t-il et va-t-il durer encore ?

Et pourquoi ? Pourquoi moi, bon sang ?

J’enfonce mes ongles dans mes paumes et lorsque toutes mes pensées sont accaparées par la douleur, je me lève nettoyer les petites plaies à l’eau froide. Je me focalise sur elles, le temps de reposer un peu mon esprit. Mon chien me suit, curieux.

Cinq minutes et deux pansements plus tard, je m’assoie dans le canapé du salon et l’invite d’un tapotement sur le cuir. Il bondit à mes côtés.

— Viens Jonto… l’appelé-je. Qu’est-ce que je vais devenir, si ça recommence ?

Il me regarde avant de s’allonger, la tête sur mes cuisses. Je le caresse distraitement, faisant jouer mes doigts dans ses poils.

— Je dois rêver… dis-je à voix haute, le regard dans le vide.

Je sursaute devant cette révélation.

— Mais oui ! C’est ça ! Je suis en train de rêver ! Je vais me réveiller. Je vais me réveiller et tout ira bien… Mais oui, ça ne peut être que ça ! Que je suis bête ! Pourquoi n’y ai-je pas pensé plus tôt ?

Je frappe frénétiquement dans mes mains, soudain très soulagée avant de gémir et grimacer. Aïe, mes paumes…

Et mes espoirs fondent comme neige au soleil. J’ai mal. Et c’est bien connu, quand on dort, on ne ressent pas la douleur, pas vrai ? Je gémis, mortifiée.

Je ne rêvais pas… Je ne dormais pas. Ça s’était vraiment produit, puis tout s’est arrêté. À vrai dire, ça fait une heure que je caresse mon animal de compagnie. Pas de doute, lui, tout va bien. Mais moi… je patauge en plein délire. J’ai l’impression d’être devenue folle.

À raison, peut-être. Bon, OK, sûrement, même.

Là, je n’entends plus rien, cela veut-il dire que j’ai eu une hallucination ? Très franchement, ça a beau être dingue, je n’y crois plus. Même si j’ai un peu d’imagination, réussir à m’incruster des pensées sans que je ne m’en rende compte… Non. Un point c’est tout. Je ne veux pas concevoir être folle à ce point-là.

Alors, quoi, je lis ses pensées, et ? Je sauve le monde ? Pourquoi moi ? Et pourquoi m’avoir donné cette faculté ? Ai-je subi une opération secrète durant mon sommeil ? Me suis-je assise dans le bus sur un siège radioactif sciemment contaminé par les aliens ?

Enfin… là, je suis toute seule dans ma tête. Pouvoir mode « off », donc. Est-ce que c’est un « off » définitif, ou… ?