L'aube (1.2.1)

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Tome 1 > chapitre 2 > partie 1

Anaelis

Sciscere

Capitale de la Calistrie

J’ai longtemps cherché ma valeur, persuadé de ne pas en avoir, la guettant dans le regard des autres, faisant tout pour en acquérir.

J’ai fini par comprendre qu’elle était déjà là, grande, intime, suffisante.

Anaelis ne distingue pas le sillage d’or de la comète cette nuit-là. Il l’observe longuement puis baisse les yeux sur la magnifique cité devant lui. Elle, par contre, scintille comme le ciel : les bougies des maisons, les braseros des temples, les lanternes d’hybre rayonnent en chaque endroit. Les lumières allumées la veille brilleront jusqu’au lendemain. C’est l’une des traditions du solstice d’été, ce jour magique qui n’appartient à aucune semaine, à aucun mois, et au lendemain duquel commence l’année nouvelle.

Anaelis attend le lever du soleil depuis plusieurs heures, comme il le fait chaque année, pour fêter à sa façon le renouveau. Il s’agit bien plus d’une révolution personnelle que d’un cycle autour du soleil. Un moment à soi, où repenser à l’année passée, constater le présent, souhaiter un futur.

Il a escaladé le temple puis la colonne portant l’immense statue de la princesse d’antan, sauveuse de la Calistrie, et se tient assis contre elle. Tous deux regardent l’horizon. Parfois, il lui parle, questions envoyées aux vents.

— Je n’ai toujours pas approché Thémis. Trois ans que je rêve d’elle. Quel fier guerrier je fais, mis à terre par une demoiselle. Cette année : promis, dit-il avec un petit rire nerveux.

Il sent la pierre dans son dos, les pans de la robe que porte la statue. Il lève les yeux vers son épée tendue bien haute, dans une pose de déesse guerrière.

— Toi tu avais plus de courage hein. T’opposer à l’ancienne Impératrice. Moi, je crains jusqu’à perdre mes illusions.

Ils restent pensifs, attendant que l’aube vienne.

Voilà que le ciel prend des couleurs plus chaleureuses. Le soleil se lèvera dans quelques instants. Anaelis le sent et change d’attitude. Il chasse cette impression d’être une personne fade, éteinte, inexistante. Il se voit de nouveau comme il est en réalité. Assuré, volontaire, puissant, avec ce quelque chose de doux dans le sourire et le regard, dans ses yeux rares et changeants. D’un centre noisette vers l’émeraude en périphérie, ou à d’autres moments des iris d’un ocre orangé tendant au bleu saphir sur l’extérieur. Comme si ses yeux hazel révélaient sa personnalité : pluralité de l’être, richesse du caractère, changement des attitudes. Comme si ces nombreuses couleurs reflétaient sa volonté de tout vouloir être, tout pouvoir faire, tout souhaiter embrasser.

— Aujourd’hui c’est les crayées. Les nominations si tu préfères, de ton temps tu l’appelais comme ça. Regarde bien mon entrée triomphale à l'académie des Sanges. Tu aurais cru, quand tu l’as créée, que j’y serai un jour ?

La princesse d’antan ne lui répond pas.

Il aime cette solitude, il s’y sent bien, sur l’un des lieux élevés de Sciscere, capitale de l'empire de Calistrie. Il ferme les yeux et murmure pour lui :

— Les Chevaliers Sanges.

Apparaissent les uniformes incarnant la force, la sagesse, le Bien.

— L’équilibre.

Surgissent sa faiblesse et sa violence.

— Thémis.

Se dévoile cette jeune femme idéalisée.

— La liberté.

Jaillit un tourbillon d’images.

Le soleil apparaît. Il ouvre les yeux. Sous la lumière nouvelle, ses iris sont d’or.

* * *

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