Chapitre 41

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Joren jeta un bref coup d'oeil à ses bottes lustrées. L'épaisse verdure qui tapissait le cœur de la cathédrale avait été arrosée le matin même et des gouttes d'eau scintillaient sur le cuir. Le sol était mou, l'arbre au-dessus de sa tête dégageait une odeur entêtante, la musique funéraire était des plus émouvante et la lumière du dôme magnifique. Les vitraux projetaient sur les murs des fresques de couleurs éclatante et les suspensions, décorées de fleurs et de branches, se balancaient doucement.

Cela aurait pu être vraiment magnifique, si mes deux frères ne projetaient pas de m'éliminer dans les prochaines minutes..., pensa-t-il cyniquement en fixant, impassible, la foule endeuillée qui s'étendait sous ses yeux.

Par dessus les têtes qui lui faisaient face, un chapeau aux larges bords ourlé de voilettes noires attira son attention. Ce dernier semblait pris de frémissements ou de hoquet. Les gens se tournèrent discrètement vers la propriétaire de la capeline richement décorée pour constater qu'elle faisait un malaise. Une confusion émergea et des murmures agitèrent les nobles assis en rangs serrés. Un moment de flottement eu lieu, le temps d'évacuer la dame ayant perdu connaissance. Apesentie par sa robe et ses atours, les quelques personnes essayant de la dégager eurent le plus grand mal à le faire en toute discrétion. Joren observa la scène sans sourciller, son père était étendu là à quelques mètres de lui.

La Papesse Hildegarde, sans doute devenue aveugle par son grand âge, ne remarqua rien du tout. Elle se recula après le chant d'un cantique en faisant signe aux prêtresses de retirer la couche funéraire. Le coeur de Joren se serra en voyant son père partir. Allait-il pouvoir assister à la mise en terre ? Ou allait-il devoir quitter les lieux avant ? Il serra les poings, ignorant précisément le plan de ses frères. Quoi qu'il advienne, il était prêt.

Une nouvelle musique commença, suivant le protocole, lui et ses trois frères se levèrent une dernière fois et s'avancèrent pour chanter.

— Joren Primtis est innocent ! hurla une voix d'homme dans les rangs, du côté des pilliers droits.

Un homme en costume complet bleu et à la cravate dorée se leva et monta sur sa chaise. L'interruption inopinée fit froncer les sourcils et certains regards se tournèrent vers lui.

Joren plissa les yeux, il ne reconnut pas l'agitateur.

— Que justice soit rendue, le peuple ne se pliera pas ! Gloire à l'Héritier ! Gloire à la Gueule de Lion !

Des gardes et des prêtresses s'avancèrent pour le faire descendre, les nobles autour de lui s'écartèrent, outrés.

— Qu'est-ce que ceci ? vociféra Dusan.

Joren sentit le regard accusateur de son jeune frère sur lui.

Des personnes se mirent à crier d'indignation et on lui demanda de faire silence.

— Une honte !

— Faites le taire !

— De quoi parle-t-il ? murmurèrent d'autres en s'échangeant des regards interrogateurs.

Déjà, des journalistes s'approchaient.

L'homme se dégagea quand on tira sur sa veste pour le faire descendre, Joren retint son souffle en voyant autour de sa ceinture, une étrange veste où pulsait en son centre une lueur violine.

Deux femmes reculèrent en poussant des cris stridents. D'autres firent de même, comprenant le danger et des chaises se renversèrent. La musique et les chants cessèrent, l'attention entière de la cathédrale se tourna vers la scène.

— Par les Dieux, évacuez ! évacuez ! s'écria un garde en faisant de grands signes avec ses bras.

Les nobles se levèrent brusquement en même temps, retenant leurs manteaux, chapeaux et jupons, et se reculèrent avec effroi.

Joren s'avanca, cherchant du regard ses hommes. L'agitateur vêtu de bleu fit un tour sur lui-même en exposant sa veste, chacun pu alors voir l'énérite qui brillait contre lui. Une sueur glacée glissa dans le dos du prince, il se souvint alors des recherches d'Hubert Willburt.

— Joren Primtis est le seul successeur de l'empire ! s'écria l'homme en poitant les mains vers lui.

— Saisissez-le ! hurla un garde en se jettant en avant.

Pendant que les autres reculaient, d'autres purent voir le perturbateur appuyer sur un rebord de sa veste.

— Attention ! hurla une femme en se couvrant le visage de ses bras.

L'instinct poussa toutes les personnes autour à se reculer et à détourner la tête. Joren en fit de même et au même-instant, le souffle énorme d'une explosion le projeta en arrière.

Une violente lumière violine aveugla ses yeux, un bruit assourdissant éclata ses tympans. Il sentit chacun de ses membres tressaillirent sous la vivacité de la douleur. Ses pensées allèrent à son corps meurtri qui roulait contre le sol froid de la cathédrale et constatant qu'il était encore en capacité de penser, elles se tournèrent ensuite aux personnes prises dans la détonation. Combien de morts, de blessés ?

Il perçut des cris et des tremblements dans le bâtiment. Après plusieurs minutes passées allongé par terre, il tenta de se relever en chancelant. Son corps, façonné par ses entraînements et ses activités physiques régulières, parvint à se redresser. Il cligna des paupières, un fumée épaisse enveloppait les colonnes et le monument. Il toussota, grimaça de douleur. Sans aucun doute, quelques côtes étaient fêlées. Il secoua la tête et vit pendant quelques secondes, un tissu coloré s'agiter sous ses yeux. Le scintillement d'une lame le fit reculer par réflexe.

Devant lui se tenait un chevalier de la garde impériale, l'épée au clair. L'homme avait la tête sanguinolente, ayant sans aucun doute souffert lui aussi de l'explosion. Il se jeta sur lui. Joren sortit de sa manche une dague effilée et para à la dernière seconde.

— C'était une attaque prévue de longue date, ou vous a-t-on ordonné de me tuer à l'instant ? demanda-til avec sévérité.

— Les Princes vous accusent d'avoir voulu les tuer, nous avons ordre de vous éliminer, vous et vos hommes.

Mais Joren ne vit que ses lèvres s'agiter dans le vide, rendu sourd par l'explosion, il ne comprit pas sa réponse. Il para encore et sentit ses membres se durcir, prêts à riposter.

Il avait atterri dans le fond de la cathédrale, derrière l'arbre gigantesque qui s'enflammait peu à peu. Il comprit rapidement qu'il devait sortir. Il prit le chevalier à revers et observa que ce dernier n'avait pas croisé le fer de façon sérieuse depuis longtemps. En quelques gestes, il le fit chuter au sol et lui arracha son épée.

— Je n'ai rien entendu à votre réponse, chevalier, car mes oreilles sont en sang. Quittez les lieux avant que la cathédrale ne s'effondre, je ne sais pas pourquoi tout ceci a eu lieu, mais je reste un prince de sang donc prenez garde à ne pas prendre les ordres de mes frères au pied de la lettre.

Le chevalier hésita et articula avant de s'enfuir :

— Pardonnez moi, Votre Altesse. Je suis le chevalier Hanz Bernabe et je n'oublierai pas vos paroles.

Joren fronça les sourcils à nouveau sans entendre ses mots et le regarda partir.

Il tourna sur lui-même et avisa au travers de la fumée qui s'épaississait, un groupe d'hommes en plein combat.

Il se précipita en avant, l'épée en main. Il retrouva ses deux frères, entourés par leurs gardes. Des prêtresses s'agitaient en faisant des signes vers une porte ouverte.

Damjan, le visage couvert de poussière blanche, hurla dans sa direction :

— Empêchez l'Héritiez de nous suivre !

Une déflagration résonna dans l'air et une balle effleura la joue de Joren, qui sentit la brulure écorcher sa chaire et la chaleur du sang couler sur sa joue. La main de Damjan Duatis s'abaissa, le canon de son arme fumait légèrement. Durant un bref instant, le temps s'arrêta. Les yeux azur de Joren pénétrèrent ceux de Damjan et en quelques secondes et dans le plus grand silence, tout fut dit entre eux.

Un craquement terrible de pierre et de bois se fit entendre, des pierres commencèrent à tomber du plafond et le pilier d'une arche vacilla. Dusan et Damjan reculèrent, tirés par leurs gardes et disparurent derrière la porte.

Les hommes de l'Héritier, voyant leur prince blessé, bondirent en avant et transpercèrent les chevaliers armés leur faisant barrage. Ce fut le début d'un carnage.

Joren savait ses hommes en minorité et en état de faiblesse. Pour respecter le protocole et leur entrée dans la cathédrale, sa garde personnelle devait être désarmée. Sachant la situation dangereuse, ils n'avaient conservés sur eux que de simples poignards et autres lames courtes. Mais c'était sans compter leur entraînements ainsi que leur expérience de terrain. Qu'étaient ces chevaliers, après tout ? De simples fils de nobles, habitués aux draps de soie et à manger à leur faim. Ils n'étaient rien comparés à ses hommes aguerris, d'âge mûr et ayant passé leurs dernières années en mer. Certains étaient d'anciens mercenaires, d'autres des contrebandiers et parmi eux d'anciens camarades issus de l'école militaire. Les fringants chevaliers ne firent pas le poids.

— Allez, Votre Altesse ! s'écria l'un d'eux, partez en avant, nous vous suivons !

Joren se précipita vers la sortie, talonné par ses hommes. Son cœur battait à tout rompre, un mélange de colère, de rancune et de peine lui tenaillait l'estomac. Ses frères pensait-ils réellement qu'il était à l'origine de cette explosion ? Où était-ce encore un coup monté contre lui, afin de décrédibiliser ses soutiens aux yeux du monde ?

Dans le couloir, ils furent bloqués par un groupe en rang serrés, portant des pistolets à leur ceinture.

— Ils nous empêchent d'évacuer vers la bibliothèque ! cria l'un de ses hommes en esquivant une estoc malhabile. C'est notre seule issue !

Joren comprit par les gestes et tenta de faire entendre raison aux chevaliers, cependant, la confusion était telle que ces derniers attaquaient certainement plus par la motivation du désespoir que par obéissance. Effrayés par la détermination de la garde de l'Héritier, ils s'agitaient en tout sens, paniqués, criant leur code de chevalerie à tue-tête pour se donner une contenance. Les plus courageux bloquèrent la route à Joren et ses hommes, pensant protéger les princes d'une attaque fratricide.

— Nous devons tous sortir ! s'écria son capitaine en faisant de grands gestes.

Des craquements se firent entendre, les regards irrités se levèrent en direction du plafond. Les combles du monuments étaient en proie aux flammes.

Chacun se mit à tousser et à regarder aux alentours, précipitamment, les hommes prirent le chemin de la sortie, se donnant des coups au passage.

Joren courut, rugissant des ordres à ceux qui pouvaient l'entendre. Il avait vu les cadavres démembrés au sol, les corps déchiquetés par l'explosion et des victimes de cet assaut traître.

— Par Kertion, pourquoi faire encore des morts après un tel crime ? rugit-il en bousculant les chevaliers belliqueux.

La débandade dura quelques minutes, chacun se mit à courir pour sauver sa vie, en direction des autres bâtiments de la cathédrale. Ils traversèrent plusieurs salles, se cognant au passage les uns contre les autres, épaules contre épaules, poings contre poings.

Ils croisèrent plusieurs prêtresses, hurlant dans tous les sens, effrayées par la violence des combats et par les épée ensanglantées.

Dans l'angle d'une bifurcation, un groupe armé de fusil fit son apparition, le capitaine eut un geste :

— Passez par ici, nous allons les retenir !

Joren fut poussé par ses hommes dans un couloir menant vers une chapelle, à présent seul, il se mit à courir droit devant lui, cherchant un moyen de sortir :

— Ils nous ont enfermés comme des rats ! Jamais je ne leur pardonnerai !

L'héritier ouvrit plusieurs pièces et ne tomba que sur des salles de prières sans fenetre. Un tremblement terrible secoua la bâtisse et il du se tenir à un mur pour se maintenir debout.

Par les Dieux, quelques chose de lourd s'est effondré ! Tout risque de s'écrouler d'un moment à l'autre. Je prie pour que tout le monde soit sauf, je dois faire vite.

Rageusement, il continua. Ses pas le menèrent dans une grande salle de prière, décorée de statues d'animaux et de plantes grimpantes. Au plafond, une coupole en verre, semblable à celle qui couvrait les églises et le toit de la cathédrale. Il traversa la pièce, figée dans le temps et dans une ambiance bien éloignée de ce qui régnait quelques mètres plus loin, pour longer un petit couloir. De la fumée sortait de sous les portes et piquait ses narines, l'incendie par le toit se propageait plus vite qu'il ne l'imaginait. Il les ouvrit une à une et tomba sur une chapelle dédiée au culte de Ménée. Le cœur battant, il vit le vitrail derrière la statue et constata qu'elle donnait sur un jardin.

Soudain, il fit un écart. Derrière lui, une présence se fit sentir. En un geste, il se retourna et esquiva dans un grognement de douleur l'attaque d'un homme en chemise. A son allure, Joren comprit qu'il n'était ni soldat, ni chevalier. L'homme l'observait avec un regard furibond, les cheveux en désordre, sans aucun doute était-il un simple homme de main, chargé de s'assurer qu'il ne devait pas quitter les lieux en vie. L'inconnu s'avança et malgré sa taille imposante et la puissance de son attaque, il ne fut pas de taille contre la riposte implacable de Joren.

Le prince quitta quelques instants la chapelle et revint sur ses pas afin de s'assurer que cet homme était venu seul pour le surprendre. Il avait trouvé une sortie, il pouvait enfin y guider ses hommes. En retournant à la salle de prière, des nuages de fumée et une forte chaleur le prirent à la gorge. De l'autre coté de la pièce, il trouva Giselle.

La jeune femme avançait dans les couloirs en trottinant, relevant sa jupe mauve et s'essuyant les yeux d'un revers de bras. Elle entendait au loin les éclats de voix d'une violente bagarre, effrayée mais sachant la cathédrale condamnée, elle continua en avant, au risque de se retrouver au milieu du combat entre les hommes de Joren et ceux de Damjan.

Combien de personnes ont pu être évacuées ? Combien ont été piétinées par le mouvement de panique ? Elle tenta d'ignorer ces questions, avançant le plus vite possible.

Si je continue tout droit je vais tomber sur la bibliothèque et les salles de prières. Il y a également la cantine, le cloître et...

Elle cessa de réfléchir, interrompue par la vision des chevaliers de la garde impériale morts sur le sol. Elle enjamba les cadavres et continua.

Giselle ne s'était rendue qu'à de rares occasion à la cathédrale Sainte Augusta mais se rappelait tout de même des lieux. L'ensemble était immense, construits succéssivement sur plusieurs niveaux et à différentes époques. Le monument était connu par tous les habitants de Lengelbronn. À quelques mètres derrières les hommes de Joren, elle constata que ces derniers prenaient la mauvaise direction, sans aucun doute guidés par les chevaliers qui voulaient leur perte.

L'odeur de bois brulé envahissait l'air, des courant d'air chaud soulevaient ses ourlets et ses cheveux bouclés. Derrière un lourd rideaux brodé à l'effigie de Lykion, elle trouva une porte qui la mena directement vers la salle de prière.

Sans aucun doute, Dusan et Damjan étaient passé par là.

Ils ont certainement été guidés dans les sous sols, le chemin passe sous le boulevard et mène au Palais de la Cardinale Garance. J'espère que d'autres personnes ont pu les suivre pour fuir. Je ne pense pas que Joren ait pensé à cela.

Giselle, conservant tout son sang froid, marcha le long de la pièce en rassemblant ses souvenirs. La salle de prière était en libre accès, il y avait forcément une issue vers l'extérieur. Elle se figea en voyant de loin deux hommes lui tourner le dos, gardant la sortie.

Par Ménée, les chasseur et l'intendant de Hautebröm ! réalisa-t-elle en se tassant sur elle-même.

La peur envahit ses membres, le souvenir de sa fuite dans la forêt ressurgit et elle plaqua ses mains contre sa bouche pour calmer son souffle.

L'avaient-ils vue ? Elle l'ignorait.

Elle se cacha derrière un pupitre et ne bougea plus, fermant les yeux. Elle rassembla sa jupe autour d'elle et se fit minuscule. L'odeur de fumée devint plus forte que jamais.

Ils ne peuvent pas rester ici, la cathédrale brûle et touts les bâtiments avec elle.

Décidée, elle attendit.

Elle tenta pendant plusieurs minutes de percevoir les paroles entre les deux hommes mais rien ne vint. Des échos de cris et de bruits éclatés se répercutaient contre les couloir de pierres polies. Assise par terre, les bras entourant ses genoux, elle resta immobile.

Des secousses firent trembler le sol, les deux hommes se mirent à crier de surprise :

— Le toit de la cathédrale à dû tomber !

— Combien de temps faut qu'on reste encore ici ?

— Chut, on vient !

Giselle garda la tête baissée, croisant les doigts de demeurer invisible par le nouvel arrivant. Le plafond de verre illuminait chaque chose dans les moindre détails.

Elle entendit les hommes quitter lentement la pièce, sans vouloir se faire repérer. Elle termina sa prière et prit une grande inspiration.

Giselle ne perdit pas une seule seconde, une fois seule, elle se redressa et courut vers la sortie enfin libérée.

Elle tourna la poignée en fer et la tira vers elle mais rien ne se produisit. La porte ne bougea pas. À sa plus grande horreur, Giselle constata que les deux hommes étaient partis en fermant à clef.

Un souffle brulant sorti de la bouche de Giselle, un frisson froid parcourut son corps. Elle réalisa avec horreur qu'elle était piégée.

Dieux, pourquoi n'ai-je pas la force de faire sauter cette porte branlante ! Elle est déjà tant abimée, si je pouvais avec un simple coup de pied !

Giselle constata cette sortie à la fois si proche et si éloignée d'elle avec un regard rempli de rage. En colère contre ce corps si faible, impuissante, elle fit demi-tour en priant qu'il lui reste du temps pour passer par ailleurs. Elle s'essuya le visage, aveuglée par la fumée qui se répandait de plus en plus dans tous les bâtiments.

Je ne me souviens plus si la bibliothèque donne sur...

Une main se posa sur épaule et la força à se retourner. Horrifiée, Giselle reconnut le garde chasse de Hautebröm.

— Et bien vous, ici ! s'écria-t-il avec une surprise non feinte. Kertion est avec nous, restez tranquille !

L’homme lui saisit les poignets et un gémissement de douleur sorti de ses lèvres.

Giselle se débattit brutalement. De ses jambes, elle lui percuta les genoux, des larmes dans les yeux, essayant de lui mordre les mains. Elle sentit ses dents arracher sa peau et dans sa bouche se répandit le goût du sang. L’homme se dégagea et lui balança un coup si violent qu’elle chuta à terre.

Giselle regarda brièvement autour d’elle, déjà, une partie des poutres tombaient en morceaux du plafond.

Son agresseur se baissa vers elle et la saisit par la gorge, légère, il la souleva d’une main et se dirigea vers un pupitre.

Il va me tuer ici et emporter mon corps…, réalisa-t-elle. Personne ne saura que je suis morte, je suis...

Les pieds dans le vide, la jeune femme rua du mieux qu’elle put.

Elle ferma les yeux, cherchant le moindre souffle d’air.

Elle tomba brusquement au sol, l’homme la relâcha violemment et bascula en arrière. Crachotant, Giselle se releva en vacillant pour découvrir Joren.

— Qu’est-ce que vous faites ici ? demanda-t-elle.

Le sang afflua dans ses oreilles, elle tangua en arrière et se retint à une sculture.

— Vous devez partir ! articula-t-elle. La porte est fermée...

— La voix est bloquée, mes hommes sont en train de se battre avec la garde de Damjan. Nous sommes coincés ! Les issues sont gardées, d’autres sont effondrées !

— Par les Dieux, dit-elle en ne pouvant s’empêcher de se tenir la gorge.

Joren saisit la tête de l’homme et lui fracassa le crâne d’un coup sec. D’un geste vif, il jeta au loin une coupe dorée, dont le socle en marbre était à présent couvert de sang.

— Vous allez bien ? demanda-t-il en s’approchant.

Elle se recula, l'œil mauvais :

— Ne me dites pas ce que c’était votre plan pour vous échapper ? hurla-t-elle d’une voix cassée. Cette explosion horrible !

Joren secoua la tête, il avait les cheveux poisseux de sang et une balafre sanguignolante sur la joue.

— Bien sûr que non ! Vous êtes aussi têtue que Menée ! s’écria-t-il en se retournant, nous allons briser un vitrail et sortir par la chapelle !

Son costume brodé était taché de sang par endroit et une de ses tempes était gonflée. L’odeur de l’Héritier envahit encore Giselle, subitement bien plus forte que celle de bois brulé.

— Je vais retrouver mes hommes, brisez le vitrail et quittez les lieux !

Une nouvelle secousse fit trembler les murs, ils perdirent de nouveau l’équilibre. Joren se redressa en se tenant aux parois.

— Une arche vient de s’écrouler… Le toit est en train de tomber… vous devrez…

Un craquement assourdissant jaillit du ciel, ils levèrent les yeux aux plafonds. Un morceau de pierre se détacha, suivi d’un autre. Ils se mirent à courir vers la chapelle. Un terrible bruit de verre brisé éclata au-dessus d’eux. Les fragments de la coupole chutèrent. Joren attrapa la jeune femme par le bras.

Giselle ne put s’empêcher de le repousser en arrière :

— Joren !

La jeune femme sentit un choc contre son crâne et tout son corps se ratatina sous le poids des gravats. Étourdie par la douleur, l’air expulsé par ses poumons compressés, Giselle perdit connaissance.

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