Chapitre 12 - Final

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Samedi 27 Juin 2015

L'aube claire pointait à l'horizon, une clarté naissante teintait le ciel d'une lueur de bronze aux couleurs rouges.

L'hélicoptère s'approchait des faubourgs nord de New York. Le trajet avait durée un peu plus d'une heure et demie, l'appareil était maintenant en train de descendre vers un terrain de football jouxtant le Lycée de la ville. En contrebas, sur le parking de l'établissement deux véhicules attendaient, une voiture de police et un 4x4 beige. L'hélicoptère se posa sur le terrain enherbé et coupa ses turbines, mais avant que les pales ne s'arrêtent complètement, Sylvia et Terrence bondirent de l'appareil. Deux hommes s'avancèrent à leur rencontre, celui de tête était un homme avenant d'une trentaine d'années en costume cravate alors que le second était en uniforme de police, il avait la quarantaine grisonnante et semblait plus renfrogné.

L'homme en costard tendit la main et salua Terrence et Sylvia.

« Bonjour, je suis l'agent spécial Connelly et voici le sergent Farell de la police de Elmsford. Nous sommes là pour vous assister. »

Terrence répondit.

« Bonjour. Nous devons retrouver Mary Delauney et il semble qu'elle ait été repérée ici ? »

« Affirmatif, elle a été aperçue sur les caméras de surveillance d'une station service. C'est le sergent Farell ici présent qui a fait la recherche sur les bases de données nationales suite à une altercation et des coups de feu. »

« Félicitation sergent Farell, vous nous aidez grandement. Pouvez-vous nous amener à cette station service. »

Le sergent Farell répondit froidement.

« Suivez moi. »

Ils embarquèrent dans la voiture banalisée du Bureau, Connelly conduisait. Ils suivirent la voiture de police de Farell dans les rues encore endormies de Elmsford. A peine quelques minutes plus tard, ils s’arrêtèrent à la station service. Le lieu était sous bonne garde, deux voitures de police et des agents encadraient le périmètre.

Terrence et Sylvia entrèrent dans la station service et visionnèrent les images des caméras de surveillance. Terrence fût sidéré lorsqu'il découvrit la vidéo, dans les premières images la jeune femme était blonde et ne ressemblait pas à Mary Delauney. Elle s'approcha furtivement derrière un motard en train de faire le plein de son véhicule et lui bondit dessus avec une agilité inhumaine. Des griffes luisantes à la lueurs des néons jaillirent de ses doigts et manquèrent d'égorger sa victime mais l'homme bougea et reçu le coup en plein visage. L'homme roula au sol et sortit de sous sa veste un revolver, la jeune femme qui était clairement Kristen Williams bondit à nouveau, elle reçut la balle dans l'épaule et tomba lourdement. L'homme se releva pour achever la femme mais elle roula de coté et le renversa. La forme de la jeune femme changea et se mua en une horreur indescriptible, un grotesque mélange d'être humain et de fauve, elle décocha un nouveau coup de griffes et blessa gravement le motard. Celui-ci dans un ultime effort se saisit de son arme et tira encore une fois. La créature reçut le coup en pleine poitrine et hurla de douleur, elle tomba en arrière puis s’accroupit alors que ses traits reprenaient ceux d'un être humain, c'était le visage de Mary Delauney ! Bien que gravement blessée elle était encore consciente et vive, la jeune femme se redressa d'un bond et s'enfuit dans l'obscurité de la nuit sous les coups de feu.

Pour la première fois Sylvia découvrit sur le visage de Terrence un véritable désarroi. Il regarda Sylvia d'un air interrogateur.

« C'est quoi ça ? »

Terrence et Sylvia n'étaient pas seuls dans la pièce et la jeune femme regarda Connelly et Farell.

« Vous n'avez parlé à personne de ces images ? »

L'agent Connelly répondit le premier.

« Non. Je… ne les avais pas encore vu, c'est ?. »

Sylvia ne lui répondit rien et se tourna vers le sergent au visage assombri. Le sergent répondit sèchement ;

« J'ai fait les recherches avec ces images, l'agent Foley les a aussi vu. »

Sylvia parla avec cette voix assurée et autoritaire que Terrence avait déjà entendu.

« Je tiens à vous avertir messieurs que ces images font parties d'une enquête fédérale et que vous avez un devoir de réserve. Vous ne devez en parler à personne. De plus nous allons récupérer toutes les vidéos. Vous avez bien compris ?! »

Étonnés les deux hommes échangèrent un regard avant de répondre.

« Bien sur Madame. »

Sylvia sourit d'un air satisfait.

« Très bien messieurs, vous pouvez sortir maintenant, je dois parler avec mon partenaire. »

Les deux hommes sortirent de la station service laissant Terrence et Sylvia seuls. Sylvia scruta du regard Terrence, cherchant un signe de peur ou de faiblesse. Mais son partenaire avait repris contenance, il affichait son visage calme et son attitude austère.

« Très bien. Je te l'ai dit, notre responsable Sydney Montana enquête sur des affaires hors-norme, maintenant j'espère que tu me crois. »

Terrence hocha la tête.

« Je vois ça. C'est donc véritablement un comment... tu l'as appelé ? Un Endguo... »

« Un Wendigo, une créature métamorphe qui se nourrit de sang et de chair humaine. »

« Et Mary Delauney, Kristen Williams ? »

« Kirsten Williams est sans doute morte dans le Pick-up de Andrew Ribot et Mary Delauney est contrôlée par cette entité. »

« Tu sais comment l’arrêter ? »

« Visiblement la créature est gravement blessée, et si elle n'a pas pu se nourrir elle est peut être déjà morte. »

« Et Mary Delauney aussi je suppose. »

« Affirmatif, mais si on la retrouve en vie je peux peut-être la sauver. »

« Tu as un truc, des balles en argent ou une amulette ? »

Sylvia rit.

« Non rien de tout cela. »

« Tu va t'y prendre comment alors ? »

Sylvia sourit.

« Ne t’inquiète pas, c'est mon domaine. Mais avant j'ai besoin de toi, tu dois trouver où elle se cache et la retenir le temps que je m'occupe de l’entité.»

Terrence et Sylvia sortirent de la station service et échangèrent quelques mots avec le sergent Farell. Il leur indiqua jusqu’où ils avaient suivit la piste de Mary Delauney au bout d'une petite rue sombre bordée par une large haie sauvage.

Terrence trouva des traces indiquant par où Mary était entrée dans la haie. Il aperçut des branchages cassés et des traces de sang laissées sur des ronces et remonta cette piste. Sylvia suivait son partenaire en murmurant des paroles inintelligibles pour Terrence qui de tout manière était concentré sur la piste. Terrence entendit alors des bruits plus en avant dans la végétation épaisse du lieu, il s'arrêta net et sortit son arme doucement. Il entendait un léger bruissement de végétation et en tendant l'oreille une respiration lourde et malaisée. Il aperçut alors une branche bouger à quelques mètres devant lui. Il indiqua l'emplacement à Sylvia. Elle se pencha à son oreille pour lui dire quelques mots.

« Je dois la voir pour utiliser la formule. »

Terrence hocha la tête et s'avança lentement pour ne pas effrayer la jeune femme ou ne pas alerter la créature. Terrence contourna la zone qu'il avait repérée et avança en se pliant le plus possible. Enfin Terrence aperçut une forme allongée au milieu des herbes folles, des ronces épineuses et sous les branches de sombres arbustes. C'était une belle jeune femme aux longs cheveux bruns, elle avait de beau yeux noirs en amandes, des pommettes saillantes et de fines lèvres vermeilles. Son corps était athlétique et galbé, mais son torse était couvert d'une large tâche vermeille. C'était Mary Delauney.

Mary avançait pour sortir de sa cachette, elle écrasait sur son passage les herbes sèches et s’égratignait sur les ronces acérées, des larmes roulaient sur ses joues alors qu'elle était à bout de force. Elle avait mal et elle sentait sa volonté de vivre s'échapper comme des grains de sable dans une main fermée qui tentait de les retenir. Elle s’arrêta enfin, lasse de lutter, elle se retourna sur le dos et regarda à travers la végétation un coin de ciel qui luisait de la clarté du matin. Elle entendait les bruits diffus de la vie autour d'elle, le chant des oiseaux, les écureuils dans les arbres et le vacarme étouffé de la vie urbaine. Mais tout à coup elle entendit une voix claire au-dessus de ces bruits, une voix de femme s'éleva à quelques mètres seulement d'elle.

Ô Taytacha llapa atiq ! Inti Yanapa nuqa.

Laquina Pongo runaq Kkillur Aukka.

Mary ressentit alors cette douleur au crâne qui lui était devenue familière et elle hurla autant de colère que de douleur.

« Non ! »

Elle tenta de se relever, échoua et se retrouva à genoux. Elle regardait maintenant dans la direction de ces paroles incompréhensibles. Elle découvrit les yeux luisants d'une jolie jeune femme rousse, à la peau pâle qui psalmodiait ces prières blessantes. Son regard se focalisa sur cette cible et ne fit pas attention à l'homme qui était à ses cotés. Mary résista mais la bête, dans un ultime sursaut, repris le contrôle. Des griffes jaillirent aux bouts des doigts de Mary, des crocs garnirent sa bouche qui s’agrandit dans des proportions démentes et elle se releva d'un bloc en hurlant de rage.

Ô Taytacha llapa atiq ! Inti Yanapa nuqa.

Laquina Pongo runaq Kkillur Aukka.

La créature bondit à une vitesse ahurissante vers Sylvia, Terrence eu juste le temps de tirer pour tenter de sauver sa partenaire. Il toucha la créature à la jambe disloquant un genoux. Elle s'effondra aux pieds de Sylvia qui recula non sans continuer à réciter ses étranges paroles.

Ô Taytacha llapa atiq ! Inti Yanapa nuqa.

Laquina Pongo runaq Kkillur Aukka.

Mary sentit la douleur exploser dans sa jambe et elle s'effondra, elle lutta davantage pour s'extraire du contrôle de la bête. Elle sentait cette créature en elle disparaître et elle l'entendait hurler de rage et de frustration alors qu'une volonté supérieure l’enjoignait de quitter son corps. Subitement Mary ressenti un haut-le-cœur et un grand vide, une vague de fatigue la submergea et elle sombra dans l'inconscience.

La créature repris forme humaine, elle ne bougeait plus et Terrence se précipita. Terrence retourna avec précaution le corps meurtri de la jeune femme et découvrit les traits de Mary Delaunay. Elle avait le visage fatigué, cerné, pâle, les lèvres bleues et pourtant Terrence discerna à cet instant une expression curieusement apaisée, sereine.

Mary se sentait bien, elle était enfin elle même, libre, délivrée, elle pouvait enfin se reposer. Elle expira une dernière fois alors que ses lèvres dessinèrent un étrange sourire.

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