Planète

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Les derniers mots de l’Esgardien résonnaient en écho dans l’esprit distrait de Vallia. A l’évocation du nom de son bien-aimé, plus aucune autre de ses phrases ne l’avaient atteinte. S’étant détournée de l’épée redevenue inerte, elle s’était empressée de relater sa discussion pour enquérir l’avis de ses amis, même si le sien était déjà fait.

Ses explications finies, l’Eraienne prit la main de Leon et marcha vers l’aerogliss, sans attendre leur réaction. Tous la suivirent, abasourdis par les révélations et par leur réflexion sur que faire. A bord de l’engin propulsé à l’amatia, Guidomex tenta un débat mais peu de mots furent échangés. La décision de chacun était prise.

L’aerogliss s’éleva du sol, la poussière se soulevant à la propulsion des forces électromagnétique du moteur, et s’élança hors de la citée des cieux.

« Où allons-nous ? demanda Hellie, intriguée.

— Au terrain de jeu de Sirux. » répondit Haria.

***

Au loin, à mesure qu’ils s’enfonçaient dans les plaines agricoles d’Aliard, un amas métallique émergea de l’horizon pour en briser l’horizontalité parfaite. Chaque mètre parcouru faisait grossir la carcasse d’acier, jusqu’à ce que ses formes devinssent reconnaissables par tous.

Leon fut le premier à s’élancer au dehors de l’aerogliss pour admirer l’énorme vaisseau stationnant à proximité d’un hangar en piteux état. Les yeux du petit Eraiens mirent plusieurs minutes à parcourir toute la coque arrondie et lisse de l’aéronef. Son apprentissage de la lecture étant encore en cours, plusieurs secondes lui furent nécessaire pour déchiffrer les lettres peintes sur la coque : H-A-R-Z-E-R-E-Z-H

« Un lointain souvenir de notre combat. expliqua Vallia en regardant Leon, avant de se tourner vers Sirux. Tu l’as gardé depuis tout ce temps ?

— Je me suis dit que ça servirait bien un jour. répondit-il en levant les yeux au ciel. Il a vécu pas mal de chose mais il fonctionne encore bien.

— Qu’est-ce qu’on attend ? Allons-y ! » lança Guidomex en s’engouffrant sur la passerelle déployée.

Une petite file se forma sur la plateforme et les huit Eraiens s’engouffrèrent, tour à tour, dans l’aéronef qui leur avait servi à défaire la Communauté, cinq ans auparavant. A l’intérieur, comme mû par une habitude qui jamais ne s’était estompée, Sirux se précipita aux commandes de l’engin pour en faire vibrer les réacteurs d’amatia. Et rapidement, dans un grondement sourd accompagné d’une agitation cliquetantes de sa carcasse, le vaisseau s’éleva dans les cieux pour s’aligner sur le cap de l’île de l’ira, lieux du portail du continent oublié.

Installés dans le hub, Leon et Arius en train de jouer avec ce qu’ils trouvaient, les Eraiens entamèrent une discussion qui leur brulait les lèvres depuis les révélations de Vallia.

« Tu penses que Belenok souhaite nous voir parce que les Axems sont toujours une menace ? demanda Guidomex.

— C’est certain. répondit Vallia, sûre d’elle. Mais je suis sûr qu’il n’y a pas que ça.

— C’est-à-dire ?

— Je suppose qu’il souhaite nous parler de l’endroit où se trouve Ashron.

— Vallia. Nous ne savons même pas s’il est vivant. rétorqua Hellie, les yeux empathiques.

— Il n’a pas tort. commença Guidomex en fixant Vallia. Ne te méprend pas, je souhaite vraiment qu’Ashron soit encore en vie mais cela fait cinq ans que nous sommes sans nouvelle. Il est peut-être temps de se faire une raison.

— Je sais. Mais cette raison dont tu parles ne me concerna pas. Il n’est pas mort, c’est la seule vérité à laquelle je crois. contredit Vallia calmement.

— Elle a raison. Ashron a disparu mais il est toujours en vie, quelque part. Sinon, nous aurions retrouvé son corps non ? sembla approuver Haria

— Oui mais… voulut encore justifier Guidomex

— Je sais que tu souhaites m’éviter une désillusion mais tu ne me feras pas changer d’avis. » coupa Vallia, un timide sourire aux lèvres.

***

Plusieurs horas défilèrent avant que Sirux n’aperçût l’île de l’ira surgir au milieu du bleu défilante sous l’aéronef. A son survol, l’Eraien fit parler sa dextérité de pilote pour doucement poser l’engin à proximité de la stèle permettant de rejoindre Esgard. Dans le hub, une palpable effervescence, surtout venant des deux jeunes Eraiens qui comprenaient à peine l’enjeu du périple, accompagnait les préparatifs de chacun. Une fois dehors, le groupe resta quelques instants devant la stèle.

« J’espère que ça va être moins éprouvant que la dernière fois. annonça Haria.

— Moi, j’espère pas ! contredit Liegor

— Nous verrons bien. » conclut Vallia en s’avançant vers la petite colonne.

Décidée, l’Eraienne y posa une main ferme et à son contact, la pénombre envahit les alentours pour entièrement les englober, comme la dernière fois. Soudain, de vives lumières émergèrent des ténèbres pour s’allonger en grands filins lumineux flottant tout autour d’eux. Puis, les secousses succédèrent aux lumières, comme prévu, et ce fut leur dernière sensation.

***

« Veuillez nous suivre, habitants d’Era. » raisonna une voix dans la tête de Vallia.

Deux gardes Esgardiens prirent formes en face des yeux de Vallia qui s’ouvraient doucement. Péniblement, l’Eraienne se releva et aida Leon à en faire de même. Mais pendant que tous reprenaient leurs esprits, les deux gardes avaient déjà tourné les talons et s’éloignaient dans le couloir cylindrique de verre.

Avec hâte, tous s’évertuèrent à rejoindre les deux Esgardiens visiblement pressés, tout en laissant leurs yeux admiratifs parcourir le continent oublié. Derrière les vitres incurvées s’étalaient toujours ses immeubles aux courbes marquées et reliant ciel et terre, les cylindres de cristal qui jumelaient chaque bâtiment maculé de blanc, et sa végétation cachant le sol de cette étrange terre.

Plusieurs portes automatiques plus tard, la demeure de Belenok leur faisait face et les deux gardes les laissèrent planté là, sans mot dire. Vallia s’approcha de l’entré pour toquer mais les battants s’ouvrir avant que ses phalanges ne les effleurassent. Les six compagnons entrèrent alors et furent accueillis par Belenok qui se tenait dans l’entrée.

« Bienvenue mes amis ! Cela fait bien longtemps ! s’exclama-t-il en s’avançant vers eux. Mais entrez, entrez.

— Heureux de voir que tu te portes bien. répondit Guidomex.

— Bonjour Belenok. ajouta Vallia.

— Asseyez-vous tous, nous avons à parler. » fit Belenok en les invitant d’un geste chaleureux.

L’intérieur révélait une décoration aussi épurée que tout ce qu’ils avaient pu voir d’Esgard. Les murs immaculés n’arboraient pas de tableau et aucun bibelot ne venait briser cette harmonie de blanc. Trois canapés rectangulaires et bleus azurs étaient disposés au centre de la pièce, accompagnés d’une table basse faite de cristal. Il déménage ou quoi ? se demanda Vallia en parcourant la pièce du regard.

« Nous t’écoutons. commença l’Eraienne qui décida de garder ses critiques décoratives pour elle.

— Je vais être direct. Je sais où se trouve Ashron ! s’exclama Belenok.

— Comment?! Où ça ?! demanda Vallia, affolée par cette révélation inespérée.

— Du calme, du calme. Ils ne se trouvent pas sur Era. tempera Belenok. Vous devez d’abord comprendre une chose. Comme je le supposais, les Axems existent toujours. Je ne sais pas vraiment ce qui est arrivé à ceux ayant tenté l’invasion d’Era mais il en existerait d’autres qui n’auraient rien à voir avec Skyva.

— Encore des explications incompréhensibles. coupa Liegor.

— Laissons parler Belenok. demanda Vallia en appuyant son regard vers l’Omiardien.

— Comme vous le savez déjà, l’existence des Axems appartient à un autre plan que le nôtre, l’Arvilia. Dans celui-ci, ils n’ont aucune interaction physique entre eux mais peuvent vivre et communiquer presque comme nous. D’après ce que j’ai appris, certains s’en seraient accommodés et deux courants de pensée en auraient émergé: Les Axems souhaitant vivre reclus dans l’Arvilia et ceux souhaitant retrouver une existence dans l’Ervilia. Skyva guidait ceux faisant partis du deuxième courant. expliqua Belenok

— Ca me parait improbable. répondit Vallia. Des Axems seraient donc en contradiction avec ce qu’a fait Skyva ?

— Apparemment… mais ça n’aurait pas empêché une nouvelle croisade des Axems sur une autre planète.

— Une autre planète ? demanda Guidomex, interloqué. Une autre Era ?

— Oui. commença Belenok en fixant le regard perdu de ces interlocuteurs, signe qu’une explication ne serait pas de trop. Vous devez comprendre qu’il existe certainement un nombre infini de cycles de la Via et donc, de planètes, dans le vide sidéral. Et les Axems auraient pris pour cible un autre cycle habité. Et d’après ce que je sais, ils auraient emmenés Ashron avec eux.

— Tu veux dire qu’Ashron était prisonnier des Axems pendant tout ce temps? interrogea Vallia, surprise.

— C’est plus que probable. Après avoir vaincu Serath et Skyva, Ashron a eu sa Via aspirée et emmenée dans l’Arvilia par Skyva.

— Alors elle est toujours vivante ?

— Je ne peux pas en être sûr mais c’est probable. C’était une de mes hypothèses lorsque vous combattiez la Communauté. Mais Ashron n’a pas voulu que je la lui expose.

— Donc Ashron est toujours vivant ! Nous devons aller le chercher ! s’exclama Vallia en se levant d’un bond.

— Mais attends. tempera Guidomex. Comment veux-tu qu’on se rende sur cette autre planète ?

— Guidomex a raison. reprit Belenok. Je ne sais pas comment faire pour aller sur cette planète, ni même où elle se trouve.

— Tu sembles savoir beaucoup de chose et rien à la fois. D’où tiens-tu ces certitudes ? demanda Sirux en posant un regard suspicieux sur l’Esgardien.

— Un Axem.

— Comment-ça un Axem ?

— Ces derniers temps, j’ai beaucoup étudié les pierres de Via utilisées par les Axems, lorsqu’ils cherchent à pénétrer dans l’Ervilia. Et à mesure que mes recherches avançaient, j’ai réussi à comprendre les flux de transfert inter cycle. Je suis un expert en science hudienne cyclique maintenant. Se vanta Belenok avant de voir que ces explications n’intéressaient pas grand monde. J’en ai capturé un. conclut-il déçu.

— Tu es sérieux ? Ou est-il ?! lança Liegor en relevant les poings, comme prêt à se battre.

— Du calme, il ne peut rien nous faire. Nous l’avons enfermé dans une pierre de Via modifiée.

— Je veux lui parler ! s’exclama Vallia qui devenait presque incontrôlable.

— En es-tu sûr ? Les Axems sont des maîtres dans l’art de la manipulation et pour communiquer avec lui, tu dois te laisser posséder. Cela comporte un risque. Mes discussions avec lui sont teintées de mystères. J’ai constamment l’impression qu’il manipule la vérité à sa guise. Même ce que je viens de te dire peut tout à fait être une altération de la vérité.

— Après ce que je viens d’entendre, je ne peux pas rester là sans aller lui parler.

— Très bien, tu sembles sûre de toi.

— Je ne l’ai jamais autant été ! s’exclama Vallia en laissant son regard se poser sur Leon »

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