Muselée

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On lui avait signalé des disparitions soupçonneuses dans le coin et il avait eu vent d'un docteur qui s'adonnait à de sombres pratiques occultes. Intrigué et persuadé qu'il ne s'agissait nullement d'un tueur en série lambda, il se précipita sur les lieux de la disparition lors d'une des absences du "docteur bec". Au fil de ses observations, il avait déniché une liste sur laquelle figurait le nom des patients de ce praticien de l'ombre. Convaincu que les cobayes du docteur peste étaient enfermés ici quelque part, il poussa son enquête plus loin dans les corridors du vieux manoir. Il retrouva chacun des prisonniers. Parfois, ils paraissaient sains d'esprit, parfois complètement déments. Pour ne pas éveiller les soupçons et alerter cet horrible médecin, il se contenta de vérifier les identités. La libération serait pour plus tard. Lorsqu'il arriva devant la dernière pièce, il ne perçut aucune forme de vie. Seul un silence plombant résonnait dans la pièce. Surpris, il tenta de déverouiller le lourd hayon de bois. Heureusement, celle-ci était ouverte. Il entra et explora la pièce. Rien. Il pressa le pas vers le lit orné d'une couverture rouge en velours ras. Intact, il avait l'impression que personne n'avait dormi là depuis des lustres. Un objet blanc tranchant avec le cinabre de la couette attira son attention. Une missive attendait d'être lue.

"Que se passe-t-il ? Pourquoi suis-je incapable de bouger ? Pourquoi aucun son ne sort de ma gorge ? Pourquoi me sens-je si ankylosée ? Quelle est cette pierre qui m'immobilise ? Est-ce mon corps ? Est-ce des liens ? Pourquoi ai-je cette misérable impression d'impuissance ? Que s'est-il passé pour que je me retrouve dans cet état léthargique, inapte à lever le petit doigt ? Suis-je morte ? Suis-je emprisonnée ?

Allongée dans les ténèbres abyssales, je ne peux voir, entendre, parler,crier. Muselée, je ne peux que regarder ma déchéance, observer une poupée sans âme prendre ma place et épandre l'ombre maléfique de Satan.

Ô comme j'aimerais retrouver ma vie d'avant. Oublier ces crises, oublier ce pacte infernal qui me lie aux créatures de l'ombre. Comment ai-je pu être aussi bête et le laisser manipuler ma vie, me transformer en un assassin. Comment ai-je pu le laisser insuffler la folie dans ma tête et détraquer la moindre parcelle de mon être ?

Victime de mon ignorance, ma vie ne sera désormais que souffrance, le poids de mon fardeau sera trop lourd à porter, mon chemin de croix ne se terminera jamais. Même la pénitence ne pourra m'amener au pardon, le péché sera mon tombeau, les eaux du Styx mon caveau et L'Eden jamais je ne m'y rendrai.

Le silence pour seul compagnon, il me reste tout de même un peu de raison, pour espérer rejoindre celui qui m'attend, le prisonnier solitaire de Lucifer, son martyr involontaire.

Finalement n'est-ce pas mieux de rester ici, avec le silence pour unique ami ? "

Anatole Fanthomme termina la lecture de la missive qu'il venait de trouver, posée sur le lit. Pourtant aucun encrier, aucune plume ne se trouvait sur le petit bureau usé par le temps. Un étrange sentiment s'empara de lui et il se mit à réfléchir.

Seul dans la pièce vidée de toute essence vitale, la lettre encore dans la main, l'étrange détective observa les alentours à la recherche de preuves ou d'indices. En parcourant la pièce délabrée, il découvrit, caché sous l'oreiller, un lapin blanc élimé. Sur la chaise, une magnifique cape en velours blanc attendait sagement son propriétaire. Il continua ses investigations et découvrit un autre papier blanc, cette fois-ci plié en deux. Il s'en empara et le fourra dans sa poche, sa lecture attendrait. Il chercha d'autres indices, mais ne remarqua rien de plus. Il se dirigea alors vers l'entrée de la vieille bâtisse. Il avait à peine descendu l'escalier et foulé le sol aux allures de damier qu'une silhouette toute de blanc vêtue se posta à l'entrée.Totalement immobile sur une dalle noire, caché sous son masque de corbeau, il fixait son opposant. Fanthomme répondit à sa provocation par un sourire :

  • Que la partie commence...

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