Chapitre 42

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La progression s’avéra délicate dès les premiers instants. La visibilité était quasi nulle et les marches étaient rendues glissantes par une matière poisseuse d’origine inconnue. On ne pouvait pas s'appuyer contre le mur pour s’aider, car une substance gluante le recouvrait. Ce qui aurait dû s'accomplir en un quart d’heure leur prit presque une heure.

Britess sentait la présence de choses à l’orée de ses sens, sans pouvoir les distinguer. Une marche harassante pour les nerfs.

— Vous tenez bien le coup, Britess. Nous allons entamer le sixième niveau. Même trajet pour le début. Par contre, une fois en bas, il faudra couper en diagonale pour chercher l’accès suivant, situé au milieu de la salle. Si les sceaux sont encore intacts, nous pourrons y trouver une stase protégée et nous y reposer en toute sécurité.

Britess hocha la tête, s’essuyant le visage d’une main tremblante. Elle détendit ses doigts. Elle s’était agrippée à la lanterne avec la force du désespoir priant pour qu’elle ne s’éteigne pas. Le conservateur lui tapota l’épaule pour lui faire signe qu’il était prêt.

Dès le premier pas, elle comprit que jusqu’ici cela avait été une véritable promenade de santé.

Le sol n’était plus glissant, mais collant. Elle approcha la lumière du mur : il était tapissé de bouts de chairs en putréfaction et s’agitait de spasmes irréguliers.

— Il n’y a rien, dit le conservateur d’une voix forte. La paroi est lisse, intacte. Ce n’est qu’une illusion, quelle que soit votre vision. Mais vous avez raison d’être prudente. Il est difficile de distinguer la réalité des pièges qu’on va nous tendre.

Ils avancèrent en silence. Chaque enjambée coûtait.

L’aventurière arriva enfin au bas de l’escalier.

Une force invisible tapa dans la lanterne pour la faire valdinguer le plus loin possible. Heureusement Britess la tenait d’une poigne désespérée. L’espace d’un instant, le parchemin que le conservateur y avait fixé brilla intensément et une forme apparut devant la guerrière qui dégaina son épée et trancha de haut en bas. La bête hurla et s’effondra à leurs pieds, inerte.

— Ces entités détestent vraiment la lumière. Le sort les fera fuir, s’ils attaquent un par un, la renseigna le conservateur. Ne nous arrêtons pas. La lueur grise que vous percevez là-bas, c’est le refuge.

Haletants, ils reprirent la pénible marche. L’ennemi était partout, bien qu’indistinct. Ils avaient compris qu’ils ne feraient pas le poids face à ces deux-là. Soit. Ils attendraient une erreur ou les laisseraient aux autres, là-dessous, plus forts, plus féroces.

Exténués, l’humain et la nomic rallièrent enfin l’îlot de tranquillité promis.

C’était une bulle grise, transparente. Elle vibra quand ils la traversèrent. La surface était assez grande pour accueillir quatre personnes allongées. Il y avait un petit tas de bois, des ustensiles de cuisine, et un coffre. Chaque chose était estampillée d’un morceau de parchemin. Le conservateur s’agenouilla et alluma un feu, prenant soin d’utiliser les bûches sorties de sa sacoche.

Britess resta debout, scrutant les alentours, épée à la main. La lame n’était pas demeurée inerte. Dès qu’elle l’avait brandi, le métal avait viré de la couleur ordinaire à un jaune orange apaisant.

— J’ai fait chauffer de la tisane. Tenez. Détendez-vous, ici nous n’avons rien à craindre. Nous allons nous accorder une bonne heure de repos. Nous attaquerons ensuite le septième niveau.

— Pire que celui-ci ?

— Cela va crescendo. Quand ils comprennent que nous n’allons pas céder à la panique, ils laissent tomber. Plus bas, c’est la force brute qui nous sortira de là.

Il but une longue gorgée.

— Vous avez peur de quelque chose Britess ?

— Pas vraiment. Je suis comme n’importe quel être.

— J’ai peur des sangsues. Alors que je n’ai jamais eu affaire à ces bestioles. Le parchemin sur ma sacoche est une protection contre cette terreur. Il y a un être, sous nos pieds, qui peut projeter et donner corps à notre pire cauchemar.

— Si je connais ma frayeur je pourrai la vaincre, c’est cela ?

Il hocha la tête.

Britess fouilla dans ses souvenirs. Elle n’avait jamais eu à subir de terreur nocturne, pas la moindre peur étant enfant. Un visage s’imposa. Avec des yeux où crépitaient littéralement de minuscules éclairs.

Étoile de Ferriers.

Son instructrice et commandante en chef de la Compagnie de la Vérité.

Britess but tranquillement sa tasse. Affronter cette peur-là n’était pas une perspective réjouissante.

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