Chapitre 34

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Dimanche 25 août

Je vais éprouver des difficultés à boucler mon programme dans les délais que je m'étais fixés. Il me reste une semaine tout juste et autant d'étapes que de nuits. Et la dernière au moins me demandera deux journées de route. Une halte du côté de Poitiers ne serait peut-être pas éloignée de la mi-chemin. Mais je me connais : lorsque l'arrivée à la maison se profile, j'ai tendance à brûler les arrêts ; c'est l'appel de l'écurie, disaient les conducteurs de chevaux de poste au temps des diligences.

Dans l'immédiat, il s'agit de me rendre à Saint Rémy de Provence. Je voudrais revoir la "cathédrale d'images" installée dans les anciennes carrières de pierre des Baux. Albert Plécy, journaliste au Parisien, s'émerveilla lorsqu'il découvrit en 1975 le cadre des carrières de calcaire désaffectées du Val d'Enfer. Deux ans plus tard, il y ouvrait un spectacle permanent de diapositives sonorisées projetées sur les parois du site.

C'est ce même été que Jeanne et moi avions découvert ces diaporamas qui nous avaient époustouflés : une centaine de projecteurs carrousel Kodak vous immergeaient dans une "cathédrale d'images", en effet, tandis qu'une batterie d'enceintes acoustiques diffusaient une musique venue de partout, elle aussi, pour un effet prenant et très réussi. Plusieurs montages audiovisuels se succédaient, sur des thèmes divers : paysages, fleurs, monuments, peinture. Je me souviens notamment d'un sur Picasso, décédé à Mougins quatre ans plus tôt. En presque vingt ans, tout cela a dû être notablement perfectionné, l'informatique aidant. Je suis curieux de voir et entendre le résultat.

Je voudrais aussi retourner sur le site de Glanum, situé à la sortie de Saint-Rémy. Non pas que je sois un fanatique des ruines antiques, mais cette ville, qui fut gauloise, puis grecque avant d'être romaine m'avait bien plu, sans que je sache trop pourquoi. Son Arc de triomphe et le Mausolée des Jules, bien entendu, spectaculaires et uniques témoins de l'existence de la cité durant des siècles, mais aussi la ville que les fouilles ont restituée, avec ses thermes, la maison des Antes ou les colonnes élancées survivantes des temples géminés...

Je voudrais enfin rendre visite à l'hospice Saint Paul de Mausole qui accueillit Vincent Van Gogh pendant plus d'une année entre 1888 et 1889, avant qu'il ne s'installe à Auvers-sur-Oise. C'est un de mes peintres préférés et tout ce qui le concerne m'intéresse. J'ai lu que la commune avait installé des reproductions des paysages qu'il y a peints dans le cadre même où ils furent exécutés sur le motif. Cette mise en abîme pique ma curiosité.

Voilà mon programme. C'est curieux, mais au fil des jours, je m'aperçois que je prends un peu plus de libertés avec notre passé, à Jeanne et moi, m'attachant davantage au présent et à l'avenir. Je suppose que c'est bon signe. Mais, en même temps, cela me culpabilise encore un peu. L'œuvre du deuil est toujours douloureuse, non ?

J'ai réglé mon écot, bouclé ma valise, chargé la voiture, baissé la capote, car il fait beau, et salué mes hôtes. Je reprends la route.

Vincent, me voilà !

Je n'ai qu'une petite heure de conduite. Je vais passer par le Pont du Gard, Beaucaire et Tarascon. Je préfère éviter les encombrements d'Avignon. La 50e édition du Festival est terminée, mais en été la ville n'est pas trop aisée à traverser, autant qu'il m'en souvienne. Je ne reverrai pas le pont Saint Bénézet ! Tant pis.

(à suivre)

©Pierre-Alain GASSE, janvier 2018.

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