VOYAGE DANS LE PASSE

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LEY 

Mes yeux s'attardent sur le bouquet, sur la carte, puis se lèvent en direction de V. Même si je dois reconnaître que cette attention me touche, je ne sais que dire. Je n'ai aucune envie de discuter de Lucas actuellement. Pour être franche, je ne cesse de penser à lui depuis que je l'ai rencontré et c'est déjà beaucoup trop à mon sens. Chaque fois que l'on se croise, on ne peut s'empêcher de se jeter l'un sur l'autre.

C'est comme si un gigantesque brasier prenait vie et que mon cœur fragilisé n'était pas préparé à un tel ouragan. Heureusement, une partie raisonnable de moi refuse de m'impliquer avec lui. Je crois que c'est parce que je le trouve beaucoup trop intense pour mon équilibre mental. Et puis, comment m'impliquer avec un homme qui possède une âme aussi tourmentée que la mienne ?

D'un côté comme de l'autre, nos secrets sont beaucoup trop dangereux pour nous permettre de respirer normalement. Je secoue la tête en direction de V, pour lui faire comprendre que cette histoire est une folie sans nom. Une aventure dans laquelle il est préférable de ne pas m'embarquer.

- Je ne peux pas.

Je voudrais avancer et ressentir d'autres sentiments, sauf que seule la peur et la déception sont ancrées en moi.

V me regarde intensément et reprend la parole.

- Je ne te pousse pas dans ses bras, ma belle. Je veux seulement te faire comprendre que ce n'est pas un monstre. Peut-être tient-il sincèrement à toi ? Y as-tu seulement songé, Ley ?

Je comprends ce qu'elle espère de moi.

Que je rencontre un homme qui me rende heureuse de toutes les manières possibles. Sauf que moi, je ne crois plus au prince charmant depuis longtemps. J'ai déjà traversé l'enfer une fois et je n'y ai pas laissé que des plumes. J'y ai perdu mon âme, ma liberté, mon innocence, ma dignité, ma sœur.

Je ne peux me permettre de perdre plus. Je ne peux plus m'égarer dans des ténèbres qui finiraient par m'engloutir. Désir ou pas, je dois résister à cette attirance indéfectible que je ressens dès que Lucas est en ma présence.

- Non, je ne peux pas, V. Cette histoire risque de m'anéantir. Notre envie à tous les deux est beaucoup trop dévastatrice pour notre propre bien.

- Alors, tu refuses cette alchimie entre vous par peur ?

Elle hausse un sourcil, prête à en découdre.

- Je ne te laisserai pas faire ça. Et tu sais pourquoi ?

Je n'objecte rien, alors elle n'hésite pas à me donner son avis.

- Cet homme cherche à te conquérir désespérément, donne lui une chance. Je ne te demande pas de l'aimer, Ley. Je te supplies juste de vivre.

- Pour quelqu'un qui ne veut pas me pousser dans ses bras, tu soutiens sa cause dit donc.

- Je ne prêche pas pour sa paroisse.

- Ah non ?

- Bien sûr que non !

- Et tu crois que quelqu'un comme lui peut tomber amoureux de moi? Je ne suis pas naïve au point de le penser, car je ne suis pas quelqu'un de bien, V.

En le disant, je baisse la voix et une larme solitaire dévale mes joues.

- Comme je te l'ai dit, j'ai toujours respecté ton silence. Mais je suis sûre que peu importe ce que tu as pu faire, Ley Carré, tu l'as fait pour une raison. Moi, je t'aime inconditionnellement et je serais toujours là pour toi. Te trouver dans cette ruelle abandonnée, à moitié perdue au milieu de ces ordures, était la meilleure chose que j'ai accomplie de ma vie. Tu devrais oublier et te guérir de ce passé douloureux.

Dans les yeux de V, je peux lire la sincérité, l'amour et la compassion qu'elle ressent pour moi. Sauf que c'est bien ça le problème, je ne sais pas comment me guérir ou même relever. Je me mets à pleurer à chaudes larmes.

- Je n'y arrive pas.

Ma poitrine me fait mal. Mes sanglots sont les plus déchirants que j'ai versés. Je n'arrive pas à occulter cette plaie qui me rend vide et malheureuse. V me prend dans ses bras, nous nous allongeons et mes yeux se ferment d'eux-mêmes sans que je m'en rende compte.

Cauchemard ...! Je cours... Je cours... Je cours aussi vite que me le permettent mes jambes. Mon cœur cogne dans ma poitrine comme un fou et mon souffle est court, mais je pousse l'effort. Il ne doit pas me rattraper... Je suis terrifiée ! Je tremble de peur.  Je suis persuadée que les larmes qui me brouillent la vue me feront chuter, mais je ne prends pas le temps de ralentir. Mes vêtements s'agrippent à des branchages, sauf que je cours sans prendre une seconde pour regarder où je vais. J'entends au loin sa voix se rapprocher et mon cœur déjà limite se déchire en deux.

- Chérie ? Chérie ? Chérie ? Je vais t'attraper ! Tu ne pourras pas me fuir bien longtemps ! Tu sais à quel point ce jeu m'excite ! Am, je t'ai eu !

- Nonnnnn !!!!! Am non pas Am ! Am est morte ! Nonn !!!!! S'il te plait, Damian, nonnn !!! Laisse moi ! Va t'en ! Nonnnnnnnnnnnnnnnnn ! !!!!!!

Je me réveille en sursaut, transpirante, quand V déboule affolée dans la chambre d'amie. Je suppose qu'elle avait dû retourner dans sa chambre. Elle se rapproche de moi rapidement, me prend dans ses bras pour que je me calme.

- Mon Dieu, ma poupée, qu'est ce que ce type t'a fait ? Il n'est pas là, ma chérie, c'est finie.

Je resserre mes bras autour d'elle et je me mets à pleurer. Décidément, je suis une vraie mauviette.

- Pardon, V..... Je te demande pardon..... j'ai peur... j'ai si peur qu'il revienne, si tu savais !

- Là, ma belle. Il n'est pas ici. Il ne peut pas te faire de mal !

Je ferme les yeux aussi fort que je le peux, alors que V caresse mes cheveux. Je glisse dans les bras de Morphée à nouveau.

Quand je me réveille, la journée est très avancée. Je me force à me lever. Une feuille tombe à mes pieds, je la ramasse et y trouve un mot de V.

" Il est sans doute très tard, ma belle, mais Lillia ma gouvernante est à ta disposition si tu souhaites manger quelque chose. Je ne voudrais pas te contrarier en abordant les sujets qui fâchent, mais Jay Lagrange t'attend à son cabinet du 16e Rue Michel-ange pour dix-sept heure précise. Je sais déjà ce que tu vas dire, mais s'il te plaît, fait le, je t'en prie. Isaac est aussi à ta disposition, il va t'y conduire. Je n'ai pas pu rester avec toi ce matin, car j'ai dû me rendre avec Héléna chez le traiteur pour la soirée " Black Mask" mais je te supplies d'honorer ce rendez-vous. V "

Putain, le connard de Lagrange ! Je comprends enfin son allusion.

"- C'est certain, réponse à tout, intellectuellement snob, look d'Aloïs Alzheimer, prescription massive d'antidépresseurs ! Je ne suis pas de ceux-là ,mademoiselle Carré, et je ne vous demande pas de vous y faire. À bientôt, Mademoiselle Carré, j'ai comme l'impression que nous nous reverrons sous peu."

Ce saligaud de psychiatre savait que nous allions nous revoir ! J'ai toujours eu la certitude que ce genre de médecin était sournois. Je soupire de dépit et me dirige vers la salle de bain attenante à la chambre afin de prendre une douche salvatrice. Après ce moment de détente, je me rends compte qu'il est quinze heure trente .

Si je veux me rendre au cabinet de Lagrange, je dois me préparer maintenant. Je m'apprête à demander à Lillia d'aller dans mes quartiers pour m'apporter un ensemble quand je constate qu'une de mes combinaison Valentino vert kaki et mes escarpins noirs m'attendent sur le lit qui a été refait. Décidément, V a laissé ses instructions afin d'être certaine que je me rende chez ce psychiatre.

Je suis toujours septique quant à la nécessité de m'ouvrir à ce médecin. Sauf que, je n'éprouve aucune envie de me prendre la tête avec V. Je vois déjà la scène d'ici. Et puis, pourquoi ne pas m'amuser un peu, le côté provocateur de cet imbécile de praticien a piqué ma curiosité.

Sans compter que je ne refuse jamais un défi. Si cet aliéniste sot croit qu'il va me faire parler, il est en plein délire. Je suis les directives de V et me retrouve dans la salle d'attente bleu clair de ce cher docteur. Le décor est reposant, moderne et élégant, je peux dire avec certitude que tout est de bon goût.

Une blonde s'approche avec discrétion et s'adresse à moi.

- Vous êtes très certainement, mademoiselle Carré ?

- Effectivement, je suis Ley Carré.

- Le docteur Lagrange ne va pas tarder à vous recevoir.

- Merci.

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