QUETES DES MASQUES

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Lucas

La journée a débuté depuis longtemps et je suis tenu de me consacrer pleinement à mon travail. Mais je n'y arrive pas. Mes pensées partent dans tous les sens, comme si j'étais incapable de les ordonner. Assis à ma table de travail, je n'ai jamais été aussi nerveux de ma vie.

- Monsieur Lambert, votre rendez-vous de dix heures est arrivé.

Perdu dans mes réflexions, je n'ai même pas entendu Moira s'introduire dans mon bureau. Depuis ma conversation avec Landry Duchemin, je suis tourmenté. Je suis si angoissé que j'ai fini par postposer beaucoup de mes certitudes concernant ma relation avec Ely. Et de fait, mon imagination à navigué dans tous les sens sans saisir les réponses à mes multiples interrogations. La terreur m'étreignait tellement que je n'ai pas réussi à dormir convenablement, hanté par les évènements d'il y a cinq ans.

Même si certains détails de notre histoire me sont apparus clairement, je n'ai pas pu les comprendre. Tout ce que je sais, c'est qu'Ely était en détresse. Elle affrontait un problème et refusait de m'en parler. Occupé à la baiser, je n'ai pas cherché plus loin. Quelque chose ou quelqu'un la terrorisait, mais elle n'a pas voulu s'ouvrir à moi.

Flash Back

- Je t'ai toujours dit que cette meuf traînait des casseroles plus grosses que le mont Everest.

- Ses disparitions répétées, les appels mystérieux qu'elle recevait, sa sœur qu'elle n'a jamais voulu te présenter… Je me suis sans cesse demandé si tu la connaissais réellement. Il y a certaines choses qu'elle faisait qui étaient très étranges.

- Je ne l'ai jamais appréciée et je ne te l'ai pas caché. Cette fille était un nid à problèmes. Je t'ai prévenu et lors de cette soirée à l'opéra où je t'ai juré l'avoir vue discuter avec ce type étrange. Cette mijaurée t'a mis la tête en vrac. Je ne veux pas que tu passes par les mêmes épreuves avec Ley Carré. C’est une très belle femme, sensuelle et intrigante, mais elle aussi semble être un piège à emmerdes. Sérieusement, tu ne peux pas te permettre de replonger.

Fin de Flash Back

Le souvenir des paroles d'Andres est comme un uppercut.

Ai-je réellement envie de replonger dans cet enfer ?

Dois-je savoir qui était ma maîtresse ? L'espace d'un instant, je souhaite annuler ma rencontre avec Duchemin.

Ely est morte après tout, alors pourquoi dois-je remuer le passé ?

J'hésite et mes yeux se posent sur mon téléphone. Sauf que les doutes me submergent et me paralysent.

Pourquoi être si lâche ?

Pourquoi ne pas achever cette histoire proprement, me souffle ma conscience.

As-tu si peur de ce que tu pourrais découvrir ?

Bordel, je ne sais pas quoi faire. Cinq ans sont passés ! Pourquoi maintenant ? Pourquoi aujourd'hui alors que tout semble aller bien. Tu trouves réellement que tu vas bien, m'interroge pernicieusement ma voix. En plein conflit intérieur, je crie à mon alter ego imaginaire.

- La ferme ! Tu vas la fermer ta gueule!

- Bon sang, Lucas, me dit Moira surprise.

Elle ferme brusquement la porte du bureau entrebâillé au moment où je reprends pied dans la réalité.

Paniquée, Moira s'avance dans ma direction et me demande :

- Putain de merde, Lucas, mais qu'est-ce qui ne va pas chez toi ?

Elle s'approche de moi davantage et me scrute de la tête aux pieds. Assis dans mon fauteuil, en retrait de ma table de travail, je ne me peux pas déroger à son regard scrutateur.

- Mais tu trembles !

Elle me regarde perplexe, en essayant de comprendre pourquoi je suis sur le point de faire une crise de panique.

Putain, moi qui pensais en avoir finis avec ça ! J'espérais être complètement déculpabilisé de ce qui s'était passé avec Ely, il semble que ce ne se soit pas le cas. Je suis encore plus taré qu'il m'est possible de l'être.

Je sers les poings, car personne à part Andres ne m'a jamais vu de la sorte. C'est le seul que j'ai autorisé à être à mes côtés alors que j'étais au fond du précipice. La semaine suivant le décès d'Ely, j'étais au bord du gouffre, mais en recevant une lettre macabre écrite de sa propre main, j'ai pété les plombs. Une présente dans laquelle elle me disait ô combien j'étais responsable.

Non, je ne vais pas pourvoir terminer cette journée. Je ne suis pas un faible, mais actuellement, la seule chose que j'ai envie de faire, c'est de boire. Autant, ma vie professionnelle a toujours été un refuge où je n'ai jamais permis à Ely d’entrer. Autant aujourd'hui, je n'arrive pas à me voler la face. Une bile brûlante me monte à la gorge. J'ai vraiment besoin de dégueuler.

Je me lève d'un bond et ordonne à Moira :

- Annule tous mes rendez-vous. Je vais travailler de mon domicile. Envoie-moi les affaires les plus urgentes, s'il te plaît. Contacte Lewis, dis lui que je souhaite qu'il vienne immédiatement me chercher. Envoie Landry Duchemin chez moi. Préviens-le que nous nous rencontrerons là bas. Appelle Moreau, Dumas et Lovel, fais en sorte qu'ils s'occupent tout de même de mes rendez-vous les plus urgents. Tu demeures ma collaboratrice la plus proche et tu connais parfaitement les dossiers. Je compte sur toi.

Moira me regarde avec étonnement, car c'est la première fois en six ans que je délègue autant de responsabilités. Elle est étonnée, mais contrairement à ses habitudes, elle n’ajoute rien.

- Très bien, Lucas, considère que c'est fait.

Elle sort sans demander son reste. Et moi, complètement lessivé, je m'affale sur le fauteuil de mon bureau, le cerveau en vrac. Je me tourne et admire la merveilleuse vue de Paris qui généralement m'apaise.

Mais là étrangement, elle n'engendre aucun effet bénéfique sur mon humeur. Bien au contraire, je suis mélancolique, détraqué par des pensées dévastatrices. J'entends la porte du bureau s'ouvrir de nouveau et la voix de Moira s'élève à nouveau.

- Lucas, Lewis est en bas, il t'attend. Dois-je exécuter autre chose pour toi ?

- Non, je te remercie. Alors que je me lève et m'apprête à franchir la porte, Moira m'interpelle à nouveau.

- Pardonne-moi, Lucas, je sais très bien que ce n'est pas mon rôle, ni dans mes attributions d'entreprendre ce genre de chose. Mais je me suis permise d'appeler Andres. Il m'a dit qu'il te retrouve à ton domicile d'ici une vingtaine de minutes.

Je me retourne sur elle. Elle ne sourit pas, mais son expression déterminée m'indique : Je l'ai fait pour ton bien!.

- Merci, Moira. Si tu affrontes un problème, n'hésite pas à m'appeler sur mon portable, je serai joignable à tout moment.

- Ne t'inquiète pas. ArchITL & Co est entre de bonnes-mains..

Mutique, je me tourne vers la porte. Puis, à voix basse, je réponds :

- Je le sais.

À peine descendu que Lewis m'ouvre la portière, afin que je m'installe.

- Où dois-je vous conduire, Monsieur ?

- A la maison, s'il vous plaît Lewis !

- Très bien, Monsieur.

Le trafic est dense. Les piétons lamba, les touristes, les habitués courent d'un transport à un autre. Les vélos, les motos, les voitures, toute cette activité, qui forme un joyeux méli-mélo organisé, ralentissent notre progression. Daniil Trifonov jouait Schubert : sonate no. 18 en G Major et mon esprit, quant à lui, continue de partir dans tous les sens.

Après trente-cinq minutes de trajet, nous franchissons enfin le portail de ma charmante demeure pour nous rendre dans le garage avec accès direct de la maison. Lewis déverrouille la porte de la voiture et je me précipite dans l'ascenseur en ayant au préalable tapé le code d'ouverture. Je n'ai jamais été aussi agité qu'aujourd'hui. J'emprunte la direction de mon bureau, m'assois à celui-ci et cherche cette chose obscure qui a failli m'anéantir cinq ans plus tôt.

Lucas,

Au moment où je t'écris, je te regarde dormir avec beaucoup de nostalgie. En te voyant ainsi, je me demande si je serai bientôt aussi paisible que toi aujourd'hui. Peut-être n'ai-je pas compris l'essentiel de notre histoire, mais je n'y arrive plus. Je n'y arrive vraiment plus. À tel point que j'ai l'impression de mourir un peu plus chaque jour. Pourquoi rester si je ne représente rien pour personne ? Durant un infime moment, j'ai bêtement cru que j'étais quelqu'un pour toi, mais ce n'était qu'un leurre. Tu aurais pu être la seule personne à retenir mon geste, malheureusement, tu m'as trahie ! Pourtant, il aurait suffi que tu me dises un mot, et j'aurais été tienne pour la fin des temps. Je t'aime Lucas. De là où je me trouverai, je t'aimerai encore... [...]

Je n'arrive pas à continuer.

Je lève les yeux et Andres se tient face à moi.

- Merde, Lucas, pourquoi te faire du mal comme ça ? Hein ?

Au même moment, mon Iphone émet un tintement. Un message de Moira s'affiche. Je le consulte et mes mains se mettent à trembler.

[ Monsieur Duchemin se présentera à votre porte d'ici dix minutes]

- Que se passe-t-il, bon sang ? Pour que miss assiette m'appelle, c'est qu'il se passe quelque chose de grave ! Ainsi, je t'écoute Lucas.

Je soupire de tristesse et de résignation mêlé. Informe Andres de la visite de Landry Duchemin et du motif.

- Nom de Dieu, Lucas ! Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi maintenant ?

Je secoue la tête, en signe d'exaspération.

- Qu'est-ce que j'en sais.

Alors que nous nous regardons, on toque à la porte.

- Entrez. dis-je. Dina apparaît. Elle s'adresse à moi, mais ne me regarde pas dans les yeux.

- Monsieur Duchemin est là, dois-je le faire entrer ?

- Faite, Mademoiselle Stein. - Monsieur Lambert.

- Monsieur Duchemin.

Nous, nous saluons en nous serrant la main, puis je présente Andres qui se trouve en retrait.

- Désirez-vous boire quelque chose ?

- Non merci.

- Très bien, dans ce cas, vous pouvez disposer, Mademoiselle Stein.

Celle-ci s'empresse donc de sortir sans un mot.

La porte refermée, Duchemin sort de sa serviette un carnet relier en cuir avec les initiales suivant : EEC. Il me le tend et mon cœur est prêt à exploser dans ma poitrine.

- Où avez-vous trouvé ça ?

- C'est une très longue histoire, Monsieur Lambert, mais avant toute chose, il y a deux informations que je dois vous communiquer. La première, il se peut, qu'Ely Eléonor Courcelles soit en vie. Et deuxièmement, le corps sans vie de Monsieur Damian Zielinski a été retrouvé dans sa maison de Nice. Deux avis de recherche ont été demandés. Un pour Ely Eléonor Courcelles et un autre pour Ambre Lea Courcelles.

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