XCI. En apesanteur

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XCI. En apesanteur*

Louka arriva par un affreux mardi plein de vent, de pluie, d’éclairs. La ville semblait sur le point de se noyer, le ciel était noir et jaune comme une mousson effrayante. Je m’étais réfugiée chez moi, scotchée à une série policière particulièrement intense, très concentrée sur le fait de ne surtout pas avoir l’air d'espérer des nouvelles de Louka…

Ce qui ne m’empêcha pas de me ruer sur mon téléphone dès qu’il afficha le texto tant attendu.

Louka K. Dos Santos : “Good evening ! How are you doing ? J’ai dîné chez Mila et son père, c’était sympa… Et pour une fois, ils ne m’ont pas mis derrière les fourneaux ! Thomas me propose de rester dormir chez eux. Any advice about the answer I should give ?

Romy Anderson : “Hi there ! :) Tu n’as qu’à répondre la même chose que d’habitude et dire que tu vas dormir à l’hôtel.”

LK : “OK...

LK : “Really ?”

RA : “Absolutely !”

LK : “:(“

RA : “Et en vrai, tu viens dormir chez moi...“

LK : “I’ll be there in 30 minutes.”

Une heure après, il me faisait l’amour avec appétit sur le canapé. Il était pressant, presque pressé, intense, mes hanches suivaient son rythme pour l’attirer encore plus fort, encore plus profond. Mes doigts caressaient son dos, tiraient sur ce satané t-shirt qu’il n’avait pas enlevé, s’attardaient sur le ferme arrondi de ses fesses, effleuraient la moiteur délicate de sa nuque. Je jouis en le regardant droit dans ses yeux verts, ils étaient mouvants comme l’ombre et la lumière jusqu’à ce qu’il les ferme pour jouir à son tour tout au creux de mes reins.

Il resta ensuite allongé sur moi, il me tenait chaud dans la nuit froide. Il était moite comme une soirée d’été, son visage reposait entre mes seins, ses mains se tenaient à mes hanches. Je lui caressai la nuque, les épaules, les bras, d’abord doucement puis de plus en plus fort. Il finit en étau entre mes doigts. Et quand il s’en étonna, je murmurai dans le noir :

« - J’ai eu peur, Louka. Vraiment.

- …

- J’ai eu peur que tu meures.

- Je vais bien, maintenant.

- Tu me le jures ?

- Oui. »

Je poussai un soupir caricatural, presque ridicule, digne d’un film hollywoodien ou d’un soap opera quelconque. Pour toute réponse, il releva la tête, embrassa lentement mes lèvres, puis mon cou, et sombra dans le sommeil.

Trois jours passèrent ainsi, ou presque. J’avais envie de lui tout le temps, il était délicieux et ne se faisait pas prier. J’ai honte de l’avouer, mais je me fis porter pâle au travail pour profiter encore un peu plus de ses sourires et de sa peau. Nous restâmes ainsi cloîtrés dans mon appartement, nous contentant de dormir, de manger et de faire l’amour. Et de recommencer.

Ensuite, Louka rentra en Europe.

Mais il revint trois semaines plus tard, et sous prétexte de voir Mila, passa quatre jours chez moi. Ce fut simple comme une évidence, nous nous suffisions à nous-mêmes et à nouveau, je me régalai autant du cuisinier que de sa cuisine.

La fois suivante, il resta cinq jours. C’était l’automne, il faisait gris, le ciel était mouillé comme une embrouille. Louka était chaud, moelleux, toujours partant pour un câlin ou un resto. Il ne promettait rien, il ne planifiait rien ; mais il ne fuyait plus.

Je finis par ne plus savoir s’il venait pour voir sa sœur, ou pour me voir, moi. Il n’était plus question d’hôtel, il dormait près de moi, mangeait dans mon frigo, posait sa brosse à dents sur mon étagère... Il cuisinait pour moi, avait un double de mes clés, oubliait ses pulls dans mon placard et télétravaillait dans mon salon. Puis il repartait pour la Corse presque sans un mot, pour mieux revenir quelques jours ou quelques semaines plus tard.

Ainsi survint décembre, ses rues glacées, ses guirlandes, ses sapins, ses bonhommes en rouge... Et mon anniversaire.

C’était un vendredi soir. J’attendais Louka dont l’avion avait eu du retard. J’étais un peu anxieuse, sans trop savoir pourquoi. Pourtant, j’étais loin de me douter de ce qui m’attendait !

*En apesanteur, de Calogero ; in Calogero, 2002.

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