Chapitre 30

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Une pause. Enfin. Quelques heures seulement s'étaient écoulées depuis le début des attaques. Une éternité pour ces combattants aux horreurs toujours imprimées sur l'écran de leurs paupières. Une fois installés dans le magasin réquisitionné, chacun prit ses quartiers sur des canapés voire même sur des lits d'exposition. Par habitude, Olympe chercha un endroit isolé mais fut rattrapée par Hugo qu'elle n'eut pas la force d'ignorer. C'en était trop.

— Hier encore vous vous moquiez de moi et me manquiez de respect en permanence et maintenant ça y est, je suis acceptée parce que j'ai prouvé de quoi j'étais capable ? Va te faire foutre, Hugo.

Loïc intervint. Première victoire pour l'unité, ces choses-là se fêtaient ensemble selon lui. Le revirement d'attitude si brutal de ses coéquipiers, mélangé à l'horreur et l'abomination dont elle avait été témoin, le tout saupoudré d'épuisement fit entrer le fauve dans l'arène.

— Une victoire ? Tu appelles ça une victoire ? Merde Loïc, tu as vu comme moi ce qui se passe dans nos villes, ce que les autres subissent non ? Tu oses appeler ça une victoire ! Et puis tout ça là, c'est facile ! Beaucoup trop facile ! Je mérite des excuses pour ce que vous m'avez fait subir. Vous m'avez jugée sans me connaître. Loïc, tu m'as laissée seule toute cette semaine sans jamais prendre ma défense ! Alors, pour la dernière fois, foutez-moi la paix !

— Warenghem ne gâchez pas tout, il y a une place dans le lit que Berthelot a choisi, allez-y s'il vous plaît.

— Mon lieutenant, sauf votre respect…

— C'est un ordre nom de dieu Warenghem, rejoignez ce lit.

Un ordre ? Non, un conseil résigné plutôt. Son regard ne mentait pas. Ne voulant pas s'attirer les foudres de son supérieur, elle s'exécuta, ôta ses chaussures et chaussettes trempées et se laissa bercer par le débriefing des actions des uns et des autres. L'abattement prenait le relai et les siens devinrent son obsession. 

— Faut quand même avoir une sacrée paire de couilles pour faire ce que t'as fait ! jeta Sven.

Tous se tournèrent vers elle.

— D'autant plus que je ne savais pas si vous alliez me couvrir, lança-t-elle sèchement.

En retour de cette phrase assassine, un "OH !" général inonda la pièce. Les regards devinrent fuyants presque gênés. Parfait. Elle imposa alors le silence, forçant les soldats à réfléchir. Traitée comme une moins que rien depuis la création de cette unité, s'ils avaient été à sa place, auraient-ils été certains que leurs coéquipiers auraient été là pour eux ?

— Je ne connais pas la moitié des prénoms des soldats de ma propre unité, ça ne vous choque pas ?

Elle se tut à nouveau, offrant une chance à la culpabilité de s'installer en chacun d'eux. En vidant ainsi son sac, elle souhaitait qu'ils ressentent ce qu'elle gardait en elle depuis le début de sa sélection sans pour autant que l’ambiance au sein du groupe en pâtisse. Toutes ces personnalités différentes étaient regroupées autour d'un seul et même but : la liberté. Rester soudés en toute circonstances était ainsi une priorité absolue. 

— Sven, reprit-elle plus calmement, il ne fallait pas une sacrée paire de couilles pour faire ce que j'ai fait. Il fallait juste une bonne paire d'ovaires ! Mais ça, tu ne pourras jamais le comprendre mon chou !

L'ironie de sa voix assortie d'un clin d'œil amusé adoucirent l'échange et le temps des présentations débuta. Un à un, Olympe tentait de retenir les prénoms. Baptiste et Adrien puis Alex et Maxime qui étaient restés monter la garde à la mairie avec Hugo. Achille, Marceau, Thomas et Julien, et enfin, Sébastien, le GI Joe en chef dont l'attitude ne changea pas, même devant ses torts. L'homme ne lui serra pas la main, ne s'excusa pas non plus mais lui fit néanmoins un signe de loin.

Se libérer de tous ces non-dits soulagea la jeune combattante. Ne plus rien garder. Tout lâcher. Ces hommes étaient comme elle, inquiets, fatigués, et surtout, ils avaient tué et ne semblaient en éprouver de remords. Ainsi, pour la première fois depuis bien longtemps, elle ne se sentait plus seule. Chacun avec sa personnalité déplacerait des montagnes. Ensemble, cette unité ferait la différence.

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