Partie 2 : Nouvel air 

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Mon parcours scolaire

J’ai 3 ans, la vie reprend son cours, la maladie nous laisse un moment de répit. Je viens d’entrer à l’école maternelle.

Là-bas, je suis une fille timide, réservée, qui reste sous la jupe de la maîtresse. Dès qu’un enfant s’approche, je lui fais comprendre d’aller voir ailleurs. En classe, je suis dans les nuages, j’ai un manque de concentration et déjà un retard dans mes capacités d’apprentissage. Mes parents comprennent très vite que mon avenir scolaire va être compliqué.

Lors de cette année, ils prennent la décision de me retirer de l’école pendant une semaine. Le but est de passer nos premières vacances en famille. Il faut que maman sorte de cette maison, et partir loin de Brest ne nous fera pas de mal. Nous avons besoin de tout recommencer, faire table rase, et profiter de cette deuxième chance que la vie nous donne.

Cette année-là, nous découvrons l'Île de Ré…

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île de ré 

J’y ai cru sincèrement, je n’ai jamais vu maman si épanouie. Une brise légère vient nous réveiller en douceur chaque matin. Jour après jour, nous vivons un rêve éveillé. Le soleil et la chaleur règnent sur l’île et il n’y a pas foule en raison de la période scolaire. Les souvenirs vidéos qu’on en tirera témoigneront de ces instants de joie et de bonheur.  

À chaque voyage, nous vivons un nouveau pèlerinage avec un besoin urgent d’aller bien. Ce lieu, hors du temps, est si reposant. Il  nous marque par l’atmosphère qui s’y dégage. Le sable fin nous donne envie de libérer nos idées créatives, et nous nous laissons porter par nos rêves. Au loin, la mer, parfois déchaînée, nous permet de retrouver notre énergie perdue. Quand nous rentrons au camping après l’une de nos nombreuses balades à vélo, l’agréable odeur de sapins se fait sentir et nous passons un moment de détente. Les problèmes sont rangés au placard et nous profitons de chaque instant comme si c’était le dernier. 

Rien ne pourra égaler ces vacances où chaque année nous retrouvons ces sensations de bonheur. Peu importe le standing, c’est notre petit coin de paradis à tous les trois. Un lieu où nous mettons le temps sur pause quelques jours, la maladie, elle, reste de l’autre côté du pont . Pendant un instant, j’ai l’espoir de retrouver une vie de famille normale et ces moments de joie. De revoir une maman en pleine forme avec qui je partage divers loisirs.  J’ai pris confiance en ce lieu qui ne m’a jamais montré une part d’ombre. Alors, je m’évade pour oublier et m’autorise à espérer. 

Aujourd’hui, quand nous y retournons avec papa, les souvenirs de ces moments vécus nous laissent nostalgique. Les souvenirs refont surface. Nous refaisons les mêmes visites, nous remarchons sur nos pas. Je revois le beau sourire sur le visage de maman, je nous revoie courir sur le sable et dessiner ma future maison où je peux passer à travers les murs. Je revois nos promenades à la Rochelle, une glace à la main. Je me souviens de ces siestes sur les jambes de maman, des repas dans le jardin. Il n’y a que là-bas que je ressens cette plénitude propice à la méditation. Je suis tellement reconnaissante de ce bonheur.

Reprenons l’histoire où elle s’est arrêtée, j’ai maintenant 5 ans, je dois reprendre l’école. Je rentre en grande section. À cette période, j’ai dû commencer des séances d’orthophonie puisque j’ai du mal à me faire comprendre. 

L'école est à la fois synonyme de solitude mais aussi de contraintes ; rester 8h assise derrière une table et apprendre certaines choses qui parfois me semblent sans aucun intérêt. Je n’ai donc pas de facilité pour apprendre et comprendre. Pourtant, je fais partie de ces enfants sages qui ne posent pas de problèmes. Peu de mots dans le carnet, et jamais d’heure de colle. J’essaye de me cacher et d’être oubliée. Inconsciemment, peut-être que je cherche à ne pas causer plus de problèmes à maman. On peut lire sur mes bulletins : « Camille ne participe pas en cours », pour que faire?,  « Camille ne pense qu’à rêver », Est-ce mal de rêver ?« Camille est souvent dans les nuages », pour m’échapper de ces longues journées.

Moi, je veux dessiner, être comédienne au théâtre, danser, chanter, jouer de la harpe celtique; bref, je veux être une artiste, comme maman. Cela me manque à l’école, les matières artistiques ne sont pas mises en avant, elles sont à vrai dire inexistantes. 

C’est vrai, à quoi bon enseigner des matières sans avenir? À quoi bon rendre un enfant épanoui si ce n’est pas pour gagner plus d’un SMIC plus tard. Je sais que maman me soutient car elle aussi voulait faire des études artistiques, en particulier au beaux art. Malheureusement l’influence de son père l’incite à suivre un parcours « viable financièrement ». Mais maman sa respiration, c’est le dessin, la peinture.

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La respiration de Maman 

Maman peut passer des heures à peindre. Elle a des idées bien précises en tête, quelque peu farfelues pour certaines mais c’est ce qui la rend heureuse. Du réaliste au cartoon, en passant par l’aquarelle, elle trouve son style au fil du temps : l’abstrait.

Dans ces tableaux, on peut voir des cailloux trouvés dans le jardin, des petites figurines en verre, ou encore des bulles qu’elle créait en relief. J’aime tant la regarder dessiner, même si elle n’aime pas, car cela la déconcentre. J’ai toujours voulu l’imiter, trouver moi aussi mon style. Plus tard, je me rendrais compte que je ne cherche pas à faire comme elle mais que je désire tout simplement une activité commune pour passer du temps avec elle. 

À l’avenir,  j’essaierais de reprendre le flambeau, pour redonner vie à ses pinceaux dont elle prenait tant soin, mais aussi pour la rendre fière. 

J’aurais toujours cette impression là quand je dessinerai : qu’elle est là près de moi, à m’encourager, je ressentirai les mêmes sensations qu’elle me décrivait quand elle donnait vie à une toile blanche. Ce moment d’évasion où elle oubli un instant la maladie. Ce moment de bonheur quand elle réussi à finir une œuvre. Je n’oublierai jamais ses idées folles. Du jardin artistique avec ses totems, en passant par son arbre intérieur qui trônera dans le salon de notre maison pendant plusieurs années. 

Le jour où je comprends que l’art est important pour elle, c’est lors d’une énième journée d’hôpital dans sa chambre. Elle nous demande d’apporter un carnet de feuilles, un crayon à papier ainsi qu’une gomme. Nous devons trouver une solution pour qu’elle puisse avoir cela, car il est très compliqué de lui apporter quoi que ce soit qui provient de l’extérieur. Malgré tout, nous réussissons, et son sourire à la vue d’un simple crayon à papier me renvoie ce sentiment de joie. Elle n’a peut-être pas réussi à faire les Beaux-Arts ou créer sa propre exposition mais elle a marqué nos esprits avec ses œuvres.  

***

Je suis toujours en maternelle, dans la cour de récréation, où il faut absolument que je me fasse des amis et cela malgré ma timidité. Mon intégration avec les autres élèves est très compliquée. Je ne parle pas, je ne veux pas jouer avec eux et je ne me laisse pas approcher. Mes années de maternelle se passent tant bien que mal. Je n’arrive jamais à finir mon travail à temps et mon manque de concentration ne fait que s’intensifier.

À la fin de l’année scolaire, l’école organise un spectacle de théâtre. Je ne sais pas pourquoi mais je veux absolument qu’on me donne un rôle, peu m’importe ce qu’on m’attribue mais je veux, moi aussi, y participer.

Il ne reste plus qu’un rôle à donner et je suis la dernière à lever la main. Au début, la maîtresse est réticente. Elle a peur que je gâche tout en m’enfuyant au dernier moment. 

Le soir même, j’en parle à maman, qui ne tarde pas à en parler au professeur. Je me souviens encore de ses paroles: « pour une fois que ma fille lève la main, vous n’avez pas le droit de lui refuser le rôle, et puis ce n’est qu’un spectacle d’école ». La maîtresse finit par accepter et je joue donc la maman dans la pièce Le loup vert. Je n’ai qu’une pauvre petite phrase à dire mais j’en suis fière. 

Quand le grand jour arrive, je n’ai qu’une hâte, c’est de montrer à mes parents et à ma famille de quoi je suis capable. Malgré un costume trop grand, j’ai réussi à dire ma phrase avec assurance et conviction. 

Pour la première fois, je vaincs ma timidité. Maman est ravie que j’aime une activité artistique et m'inscris rapidement à des cours de théâtre.

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Le théâtre 

Dans un premier temps, je fais un stage lors des vacances scolaires. Lors de la représentation finale, je réussis à faire rire toute une salle. Pas si compliqué puisqu’à tout juste 5 ans, mon rôle est celui d’une dame de 90 ans qui se nomme Georgette. 

Je rentre l’année suivante dans un programme annuel avec des enfants tous plus âgés que moi, entre un et trois ans d’écart. Je suis donc la benjamine mais, pour la première fois, je m’intègre facilement dans un groupe où la passion commune nous rapproche. « Les P’tits pro » prennent vie. 

L’aventure a duré sept ans. Je me souviens de ces moments partagés tous ensemble, des différents exercices que Fabrice, notre professeur, a pu nous donner. De ces discussions avant de commencer le cours, de ces fous rires pendant les répétitions, de ces délires dans la salle des costumes, de ces pauses chocolatées, de ces repas d’avant représentation, de ce stress avant de monter sur scène. 

Mon professeur est une personne marquante dans ma vie d’enfant. Il change ma façon d’être et d’exister. Pour la première fois, quelqu’un croit en moi et me comprend. Il me pousse sur l’avant-scène pour que je me dépasse, que je sorte de ma zone de confort et pour montrer aux autres et à moi-même de quoi je suis capable. J’ai une voix, une voix qui porte. J’ai une confiance quand je joue, que je n’ai nulle part ailleurs. Pour la première fois, j’ai soif d’apprendre. Fabrice a une façon de travailler avec les enfants, comme avec les adultes, qui est très humaine. Personne n’est laissé sur le côté et il nous pousse  à faire de notre mieux. Il est très apprécié dans notre petite commune. Tout le monde le connait, les petits comme les grands. On peut être fiers d’avoir un professeur comme lui. Il a une telle prestance qu’il est admiré et surtout respecté par tous les enfants, adolescents et adultes qui tapent tous des pieds lorsqu’il montent sur scène. Il marque bon nombre d'entre nous. 

Quand il part du centre , je suis sous le choc. Personne ne réussit à reprendre le flambeau, à faire aussi bien que lui. 

Les larmes coulent, je prend conscience de l’effet qu’il a sur moi. Il me change sur divers points de ma personnalité. Je me suis affirmée, j’ai pris confiance en moi, et je n’ai aucune envie que cela se termine. Je réessaye par la suite au collège, en club sur Guipavas, et même à Gouesnou, dans le même centre qu’à mes débuts. Malgré l’envie de reprendre la comédie, je n’ai jamais réussi à retrouver les mêmes sensations qu’avant. 

À l’avenir, cela me manquera toujours autant et je rêverais de pouvoir reprendre des cours. Remonter sur scène, exprimer des émotions, être moi tout simplement. Je sais que je suis faite pour ça. Un jour peut-être que je remettrais les pieds sur les planches. 

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Les mois passent et me voilà en Primaire. J’ai des professeurs qui me marquent en positif comme en négatif. Je n’arrive toujours pas à m’intégrer dans un groupe d’élèves et par conséquent les premières moqueries arrivent. Je suis la petite fille faible, facile à blesser. Ils trouvent différents prétextes comme mon niveau scolaire, mon poids, car je suis maigre, pour m’attaquer. Je me laisse faire et j’encaisse. Je n’aime pas dire que je subis du harcèlement scolaire, ce terme est bien trop fort à mes yeux pour décrire ce que je vis. Je ne reçois pas d’insultes, ça ne dure pas toute la journée, encore moins le soir quand je rentre chez moi puisqu’il n’y a pas encore tout le cyber-harcèlement que l’on connaîtra dans les années à venir. Il n’y a pas non plus de violence physique. À part quelques bousculades dans les couloirs, quelques lancés de gommes ou quelques tapes sur l’épaule. C’est plus psychologique et subtil mais suffisamment important pour que ça me marque et que je me renferme sur moi. Je n’ai plus confiance en moi. Quand je décide d’ignorer ces moqueries, mon mal-être s’estompe. 

Un jour, je me sens humiliée au point où je décide d’en parler à maman. À l’école, je n’arrive pas à fermer la porte des toilettes à clé et  j’ai peur d’y rester enfermée. Cela finit par se savoir et des filles de ma classe ouvrent la porte pour me rabaisser. Maman voit bien que ça ne va pas. Je me retiens pour ne plus aller aux toilettes à l’école. Je ne bois donc plus d’eau. Je rentre dans un très mauvais engrenage. Maman règle le problème rapidement en allant voir ces filles et en parlant aux différents professionnels de l’établissement. Malheureusement, cela n’arrange pas les choses mais je prends sur moi et je reprends le cours de ma vie. 

Le soir, je partage un moment de lecture avec maman. C’est notre moment à nous. Elle voit bien que mon quotidien n’est pas si facile, alors pour me faire oublier la journée, j’ai le droit - comme beaucoup d'enfants - à ma lecture du soir. Je me souviens d’un livre que papa m'a lu jusqu’au bout . C’est Belle et Sébastien. Papa n’aime pas trop lire des histoires mais, ce livre là, il l’aime bien. Et, chaque soir, il m’en lit un chapitre. 

Mais, en général, les histoires au lit, c'est maman qui s’en occupe. À vrai dire, je ne sais pas trop d’où mon envie de lire est venue puisqu'elle non plus n’aime pas vraiment ça. Son truc à elle c’est de créer, alors elle imagine des dizaines et des dizaines de petites histoires courtes qu’elle improvise sur le moment. Mais, un personnage revient toujours. C’est ainsi que naissent les aventures de la princesse Camille.

***

Les histoires de la princesse Camille 

Je me souviens de toutes ces histoires qu’elle invente . Elle aurait pu écrire un livre là-dessus tellement les histoires coulaient à flots. Cela lui a même traversé l’esprit. Elle veut faire un album jeunesse avec de belles illustrations. Encore une idée qu’elle n’a pas eu le temps de réaliser. 

Malheureusement, je ne me souviendrais pas ou peu de ces histoires excepté l’une d’elles que je garderais en mémoire . Laissez-moi vous la raconter.. 

« Il était une fois, un beau et grand royaume où vivait une jeune princesse qui se nommait Camille. Dans son château, la princesse vivait dans la plus haute tour. Elle adorait passer de tour en tour par un bel escalier et admirait la vue par la fenêtre de chacune de ses tours. Le château arborait un beau et grand jardin toujours bien entretenu par un jardinier. Jour après jour, le jardinier prenait soin de ce parc où chaque plante était arrosée, où chaque fleur était plantée, selon les goûts et les envies de la princesse. Camille lui demandait toujours des choses de plus en plus loufoques, et le jardinier faisait toujours en sorte de réaliser les vœux de la princesse. Les semaines passent et Camille voit le jardin de plus en plus beau, de plus en plus garni. Il y avait une grande piscine, un beau potager, on pouvait même tirer un feu d’artifice à la nuit tombée. 

Un jour, la princesse demande au jardinier de créer un parc de jeux avec une grande tyrolienne et un château gonflable. Malheureusement, le jardinier est tombé malade et il ne pouvait pas réaliser le vœu de la princesse. Camille était très en colère. Ses parents lui expliquent alors que si elle veut son parc de jeux, il fallait qu’elle le fasse elle-même. 

La princesse ne l’entendait pas de cette façon, et elle se mit encore plus en colère. Elle s’enferma dans sa tour et décida de ne plus jamais en sortir. 

Le lendemain, Camille était calme, elle avait hâte de voir l'œuvre du jardinier. Le jardinier, très faible, était au ralentit et, à ce rythme, il ne pourrait bientôt plus rien faire. En voyant ça, Camille prit conscience qu’elle avait mal réagi et elle descendit à toute vitesse de sa tour. Cela faisait très longtemps qu’elle n’avait pas mis le nez dehors. Quand elle retrouva le jardinier dans le potager, elle lui proposa son aide, ce qui lui donna le sourire. Depuis, il ne se passe pas un seul jour sans que Camille n’aille pas dans le jardin . Le jardinier avait retrouvé sa forme et créa un lien d’amitié avec la princesse, ce qui réjouit toute la famille. Ils vécurent donc heureux dans leur royaume. »  

Chaque histoire est courte et, à chaque nouvelle création, je l’aide à la raconter quand elle ne sait plus quoi dire. J’adore ce moment de partage mère et fille; et je suis persuadée que son projet de livre peut se réaliser. Je suis si fière d’elle. 

***

J’ai 11 ans, Bonjour le collège! Je pense sincèrement que ça ira mieux là-bas mais les moqueries reprennent avec la même intensité qu’au primaire et pour les mêmes raisons. 

Je suis en 5ème, mon niveau scolaire est de plus en plus bas, c’est difficile pour moi d’avancer. Je réussi toutefois à me faire de réelles amies avec qui je garderais contact. Malgré tout, je décide de redoubler, de tout recommencer, je ressens le besoin de souffler. Les moqueries cessent, mon ancienne promotion se lasse, ils décident de me laisser tranquille. Tout se termine donc. Mes années collège défilent, je me fais une nouvelle bande d’amies et je mets un point final à ces années compliquées. 

Heureusement, ces années ont aussi été ponctuées par les fêtes de famille qui marquent des moments de joie et nous permettent de faire pause un instant. 

Les fêtes de famille 

Nous passons de si bons moments tous ensemble. Tous ces repas, toutes ces promenades digestives, tous ces fous rires. Ces doux moments que chacun de nous apprécie. 

Nous commençons l’année par la fête la plus importante pour moi : la fête des mères. Allez savoir pourquoi mais j’adore célébrer ce jour pour lui offrir ce petit cadeau symbolique, qui pour moi veut dire beaucoup. Il me permet de lui dire à quel point je l’aime et à quel point je suis admirative de tout ce qu’elle fait pour nous. Avec papa, on a beaucoup de mal à exprimer nos sentiments. On ne se dit pas beaucoup je t’aime, même si nous le savons. Maman a besoin de l’entendre, alors quoi de mieux que la fête des mères pour lui prouver notre amour ?

Pour son dernier cadeau de fête des mères, je lui offre un pendentif en or en forme de cœur à ajouter sur son collier déjà bien rempli de pendentifs. Un cadeau symbolique pour moi car je sais qu’il est important pour elle. Tous les pendentifs qu’elle porte tous les jours signifient quelque chose. Plus tard, elle m’offrira un dessin de ce pendentif. Nous aimons aussi fêter ce moment en famille, avec un bon goûter breton. Plus tard, ça restera une date très compliquée pour moi. On dit qu'il y a certaines dates qui nous marquent plus que d’autres après le décès d’un proche. Pour moi, ce sera la fête des mères. J’ai l’impression que, toute la semaine précédente, je ne vois que des publicités qui nous rappellent cette célébration. Pour moi, c’est comme un coup de couteau à chaque fois. Avec le temps, je finirai par l’accepter même si ça restera la date la plus difficile de l’année. 

Vient le jour de mon anniversaire, nous le fêtons tous les ans à la maison. Maman et papa mettent tout en place la veille. Papa fait le ménage à fond et maman est en cuisine. J’adore regarder papa installer les tables. Mon excitation monte d’un cran. J’ai hâte au lendemain pour voir toute la famille réunie. J’adore souffler sur les bougies de mon gâteau et faire plein de photos. Nous passons toujours de beaux moments. Papa et maman sont très fatigués à chaque fois, mais ça ne les empêche pas de le faire tous les ans.

La dernière fête de famille est célébrée : Noël. Nous alternons, une année avec la famille de papa et l’année suivante avec celle de maman. Je reçois mes premières chaussures à talon, mon tout premier vélo, ou encore mon cheval à bascule en bois fait main par mon parrain. Ce que j’aime le plus, c’est entendre le papier se déchirer et y découvrir le cadeau à l’intérieur. 

Et puis, il y a cette odeur de sapin de noël qui règne dans le salon. Ce beau et grand village de Noël chez Parrain à la crèche en pâte à sel chez Marraine ainsi que les bons petits repas où il y a toujours des restes pour le lendemain. Cette ambiance si joyeuse que l’on ne retrouve qu’à Noël : les illuminations qui éclairent la ville, et le vin chaud réchauffent nos petites mains.

Nous avons aussi nos moments à trois. Avec maman, on adore décorer le sapin. Nous le faisons souvent à la fin du mois de décembre pour l’apprécier encore plus le jour J. Nous sortons notre plus belle tenue pour le réveillon de Noël. Chaque année, j’aime en changer. C’est notre petit plaisir, notre moment de complicité mère-fille si rare. J’ai diverses tenues, dans différents styles parfois un peu farfelus. Mais peu m’importe, le principal est que je me sente bien dedans. 

Pour le repas, il y a toujours des huîtres pour papa : son péché mignon et du foie gras pour maman et moi. Maman prend le temps en cuisine pour que ce moment soit notre moment. On ne meurt jamais de faim. C’est notre repas plaisir, où les jolis couverts et la nappe toute propre sont de sortie. Je vois bien que maman se donne du mal pour que tout soit parfait. ça deviendra important pour moi aussi que ça le soit. 

J’ai systématiquement le droit au coup de fil du Père Noël. Je suis toujours excitée à l’idée de parler à ce personnage si important aux yeux d’un enfant.

Les festivités se terminent, on regarde toujours un bon dessin animé de noël et partons nous coucher. Dans notre famille, on ouvre les cadeaux le matin du 25. J’adore aller au lit en rêvant de ce qu’il y a le lendemain, à côté de mon chausson. L’ouverture des cadeaux est un moment tout aussi important que le reste. Cette magie que j’aime tant retrouver où il y a toujours de la joie sur nos visages. Une année, j’ose déroger à cette règle, je ne referais plus jamais . Je me souviens encore de ces expressions sur leurs visages. Ils étaient si tristes de ne pas avoir pu partager ce moment avec moi. 

Plus tard, j’aimerais toujours autant cette fête, même si j’aurais toujours une pensée pour Maman. J’apprécierais quand Marraine allumera une bougie pour elle, quand je reverrai le village de Noël chez Parrain ou quand les yeux du petit Lilo brilleront à la vue du Père Noël. Pour rien au monde je n'arrêterai de fêter Noël. 

L’année se termine sereinement dans une ambiance chaleureuse où tout le monde est uni. 

Le temps passe, maman s’enferme petit à petit dans sa bulle. Par chance, elle aime y passer du temps.  Un jour d’automne, elle découvre Jamendo, un site de musique libre de droit où chaque artiste peut y partager ses morceaux. Un moment d'aparté qui lui fait du bien. 

Jamendo 

Maman décide de s’inscrire et se lance dans une nouvelle aventure, celle de son premier tchat en ligne qu’elle crée et baptise  “Armen”,  en référence au phare qu’elle apprécie. 

Sur ce tchat, elle fait la rencontre de plusieurs artistes et crée rapidement du lien. Habituellement, maman voit peu ses amis. Avec la maladie, ça n’a pas été simple : certains l'ont oubliée avec les années, d’autres - bien au contraire - sont toujours là pour elle. Malgré tout, elle ressent un vide. Ce tchat lui permet de combler ce manque. Je serais curieuse de retrouver ce tchat pour voir d’où sont nées ces complicités. 

Très vite, maman s’investit pour entretenir ces belles amitiés et tout le monde partage ses idées, ses joies, et autres petits soucis. C’est ce qui donne vie à « Armen ». Elle retrouve sa créativité, le sourire, et des relations sociales. 

Après plusieurs semaines, nous décidons de rencontrer ces différentes personnes, ce qui renforce les amitiés. Nous sommes très proches. Nous découvrons le monde de la musique. Maman se remet à avoir des projets de dessins en créant des jaquettes de CD et se découvre une nouvelle passion pour l’écriture de chansons. Nous avons l’occasion d’enregistrer l’une d’entre elles tous les trois  « Les pas de L'ankou » .

Elle découvre un nouvel art qui la fait sortir de sa zone de confort et de sa bulle. Je découvre moi aussi un nouveau monde. J’ai la chance de pouvoir passer quelques vacances scolaires sur Nantes, avec ces musiciens dans leur univers, où la bière coule à flots au bar extérieur du Caf’art, et où la musique celtique résonne dans les cœurs. Je fais la connaissance d’un groupe de musiciens soudés, où l’amitié prime. Moi aussi je sors de ma bulle. Je m’évade. La musique devient soudain quelque chose de réellement important pour moi. J’essaie de  jouer d’un instrument, en vain. Je n’oublie pas ma harpe celtique. J’essaie de chanter, en vain. Je chante faux, même si cela ne m’empêche pas de finir soliste, dans la petite chorale de mon collège. 

Les parties de jeux de sociétés s'enchaînent à la nuit tombée, j'en perds ma timidité. Je redécouvre mon adolescence loin de chez moi, je m’autorise à faire mes premières bêtises comme celles de fumer ou de boire, je m’ouvre et me découvre. 

Ces personnes marquent notre petite vie de famille. Nous nous retrouvons de temps à autre chez l’un ou chez l’autre,  pour partager un bon repas au soleil, une bonne bière bretonne, ou encore un concert avec nos amis en tête d’affiche. Un moment où le temps s’arrête et où nous profitons de l'instant présent. 

Je garde le souvenir d’une musique créée par Marieva pour maman « A musette pour Christine ». Une belle musique qui lui rend hommage. 

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