Chapitre 7

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Retour au point de départ

La porte de la bibliothèque était plus grande que les autres portes. Plus de deux mètres, je dirais. Elle donnait sur une grande pièce aux murs blancs, ornés de gravures dorées. Les étagères brunes comprenaient plusieurs ouvrages probablement rangés par thèmes et auteurs. Des escaliers sur notre droite donnaient sur les étages supérieurs que l’on voyait depuis les balcons. Devant nous, des tables en bois blanc entourées de chaises. La bibliothèque était vide de monde. J’en fus soulagée. Tout le monde était bien sympathique, mais je préférais me retrouver un instant avec ma meilleure amie.

Nous orientâmes alors nos recherches dans la section revues de presse. Les articles de journaux étaient triés par titres, thématiques, mais surtout par années. Nous cherchâmes les années précédant notre année de naissance, dans la section actualités. Seuls trois malheureux journaux parlaient de nos parents. Le premier parlait des suppositions de la police sur le « mystérieux incendie du manoir Madsen ». Depuis cet incendie, on disait qu’il ne subsistait aucun survivant à l’exception de l’enfant unique des Madsen qui avait passé la nuit à l’hôpital.

Dans le cas de mes parents, on leur offrait le doux surnom de « Bonnie & Clyde ». On racontait qu’ils étaient passés pros dans l’usurpation d’identité, le vol, les trafics d’armes, et même de contrebande. On soupçonnait aussi Sky et Antonia Cooper d’être les responsables du meurtre de Chris et Kirsten Madsen. Bien sûr, ils n’avaient affiché aucune photo. Comme un fait divers quelconque.

Un fait divers qu’on oubliera lors du prochain cocktail.

« C’est fou comme ils brossent un portrait peu flatteur de tes parents, marmonna Cally. De mon côté, ils en parlent comme s’ils étaient des martyrs. »

Derrière sa frange, je croyais presque voir des engrenages tourner à plein régime dans son cerveau.

« Tu penses que ce sont vraiment eux qui ont tués mes parents ? Demanda-t-elle. »

Elle ne les accusait pas, elle attendait simplement mon opinion. En baissant les yeux, je regardai l’article traitant du cas Cooper.

« Je ne sais pas quoi en penser, répondis-je en haussant les épaules. Antonia serait capable de tout accomplir et Sky était probablement prêt à suivre une belle femme n’importe où. Ce n’est qu’une supposition, cela dit.

- Tu n’as pas du tout hérité cela d’eux, pouffa Cally.

- Je suis quand même venue ici, me défendis-je. C’est quand même un acte spontané. »

J’avais probablement hérité de Sky à suivre Cally aux soirées en faisant le mur. Le côté fatal, sexy et intrépide de ma mère ne m’avait pas été légué malheureusement.

Nous rangeâmes alors les journaux à leur place avant de nous attarder sur un autre étalage de livres. Cally s’intéressa aux romans policiers tandis que je me glissai vers la BitLit. En lisant la quatrième de couverture dans mon coin, je pus entendre du grabuge non loin. Un cri – celui de Cally – suivit d’un bruit sourd. En relevant la tête, je vis Chuck rouler jusqu’à mes pieds en grognant de douleur. À sa suite, Cally le rejoint, les poings sur les hanches. Le pauvre homme se redressa en la fusillant du regard.

« Ne me lance pas ce regard, vociféra-t-elle. Tu n’aurais pas dû me faire peur.

- Je voulais t’aider, grogna-t-il en désignant le livre qu’il tenait en main. Est-ce que ça t’arracherait la gueule de me remercier au lieu de m’envoyer ton sort démoniaque ?

- Et ta sœur ? »

Cally lui retira le livre des mains avant de faire volte-face. Elle prit la direction de la sortie en pressant le pas. Pendant ce temps, j’aidai Chuck à se relever. Une fois sur pied, il épousseta ses vêtements.

« Merci de m’avoir aidé, June ! Prononça-t-il fortement à la fin de sa phrase. »

Pour réponse, Cally lui adressa son majeur droit sans même lui adresser un regard. Je gloussai en tapotant doucement l’épaule de Chuck.

« Ne le prend pas mal, elle paraît toujours rabat-joie les premiers jours. »

La colère de son regard s’estompa pour devenir de la curiosité.

« Comment tu peux être amie avec une fille pareille ?

- On me pose souvent la question, avouai-je. Elle a l’air difficile à vivre, mais pas du tout. Disons juste qu’elle a beaucoup de personnalité. En agissant de cette manière, elle s’assure à ce que personne ne lui marche sur les pieds.

- Et ça fonctionne ?

- Je n’en sais rien, répondis-je. Comment se porte ton ego ? »

Ses sourcils se froncèrent face à mon sourire espiègle. Il était sacrément bourru ce Chuck. Dans les jours à venir, je me demandais s'ils finiraient par se taper dessus avec Cally.

Après leur altercation, Cally et moi nous réfugiâmes dans la cuisine désormais vide. Nous prîmes de quoi grignoter avant de nous plonger dans nos lectures respectives. J’étais déjà au chapitre 3 lorsque la cuisine se remplit. Tyson et Mason se jetèrent sur nous afin de nous demander comment nous trouvions l’établissement et ses structures diverses. Cally la jugeait de cool tandis que je lançais la carte du « sympathique ». Je n’avais pas encore pris mes marques. Pour moi, un endroit n’est bien qu’une fois que je m’y sentais à l’aise. Je ne ressentais cette sensation qu’à l’orphelinat.

Jason choisit cet instant pour s’asseoir en face de nous :

« On ouvre la session de développement cet après-midi, nous lança-t-il. Vous souhaitez y participer ?

- Qu’est-ce que c’est ? Risquai-je en enfonçant la main dans mon paquet de chips.

- Session de développement psychique. C’est une réunion d’entraide pour développer nos capacités psychiques et magiques quelles qu’elles soient. Souvent, on nous réunit selon les types de particularités et les besoins de chacun. Je passai les miennes à imiter les gestes des autres ou à retenir des pages entières du dictionnaire.

- Pendant la mienne, renchérit Jason, je devais soulever des charges de plus en plus lourdes afin de développer ma force. Ou alors, je faisais l’inverse et apprenais à contrôler ma force.

- La mienne se résumait à voler les armes des autres pendant les entraînements, ricana Mason. Je manipule les armes par la pensée, ajouta-t-il face à mes sourcils redressés. »

Je savais désormais que si mes armes venaient à disparaître, Mason serait dans les parages.

« Mais pour cette première séance, reprit Jason, nous n’allons qu’échanger sur nos pouvoirs, notre ressenti et répondre aux questions des plus curieux. C’est une session d’échanges pour ceux qui ont besoin de conseils, d’avis ou tout simplement ne pas se sentir exclu. Vous devriez venir. »

Cally m’adressa un regard, tordant ses lèvres dans une question silencieuse. Je haussai les épaules.

« Pourquoi pas ?

- Excellent choix, commenta Will qui s’asseyait à cet instant. On va pouvoir connaître vos malédictions.

- On n’était pas assez maudites par ta présence, marmonna Cally.

- Vous avez de la chance d’avoir du répondant, répliqua Will en ouvrant sa cannette de soda. Il y a longtemps, que je vous aurais écrasées.

- Tu ne peux pas faire ça, enchaîna Joy auprès de lui, on t’a retiré ton permis de conduire il y a une semaine.

- Je n’ai peut-être plus mon permis, mais j’ai encore ma voiture pour te rouler dessus, Joy. »

Malgré les menaces – prononcées sur un ton monocorde, Joy laissa un sourire amusé la trahir.

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