LE CARNET D'AZALÉE, CRUAUTÉ DU DESTIN

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Pistoleta, à voir cet homme rude cacher ses larmes dans la coupe de ses mains, se sentit soudain glacé jusqu'aux os. Il ne savait que dire de plus. La cruauté du destin lui laissait un goût amer. Ils avaient fait les trois-quarts du chemin avant cet accident. Et Azalée était introuvable.

— Est-ce que tu te souviens quand c'était ?

— Il y a assez longtemps...

— Dis-moi depuis combien de temps s'est écoulé.

— C'était l'hiver je pense, l'hiver dernier.

— Quasiment un an...

Guilhem s'était brusquement levé et avait envoyé un coup de pied rageur dans une bûche.

— Un an... on aurait pu se croiser... Il faut que tu me conduises là-bas, à la voiture !

— J'ai vraiment cherché sur tout le versant. J'ai rien vu.

— Tu étais en état de choc, tu as peut-être loupé un indice. Je veux pouvoir « ressentir » cet endroit, je veux voir. Et savoir ce que voulait celui qui conduisait le camion, pourquoi vous a-t-il percutés ? Est-ce qu'il était seul ? Et pourquoi le camion est-il revenu ? Essaie de te rappeler chaque détail, je t'en prie. Tout est important. La couleur du camion, la marque, la forme...

— Ça s'est passé très vite...

— Prends ton temps, réfléchis.

— Le camion était rouge et blanc. Avec un gros pare-chocs devant, comme dans les films.

— C'était à quel moment de la journée ?

— Le matin, on avait mangé un bout vite fait et elle m'avait montré la voiture.

— D'accord. La voiture...

— Elle était garée devant l'auberge, je ne l'avais pas remarquée en arrivant.

— Tu ne l'avais pas vue ?

— Non, mais il y avait du brouillard et on était gelés, j'ai pas fait attention.

— Et Azalée l'avait vue ?

— Je ne sais pas, elle ne m'en a parlé que le matin.

— Et les clés ?

— Sur le tableau de bord.

— Ça ne vous a pas semblé bizarre, trouver un véhicule en état de marche, au milieu de nulle part...

— On en avait déjà trouvé pendant le voyage, on voyait bien qu'ils étaient en bon état. Mais Azalée disait toujours qu'on devait éviter les voitures, rester cachés, qu'on devait se faire invisibles. Quand on est montés dans la voiture, je lui ai rappelé ses paroles, mais elle m'a dit qu'on n'avait plus le temps.

— Pourquoi ?

— Je ne sais pas, elle ne m'a rien précisé. Elle était bizarre parfois. Pardon...

— Pourquoi a-t-elle d'un coup arrêté de suivre le plan que nous avions préparé, pourquoi, s'était écrié Guilhem, envoyant un autre coup de pied dans les bûches. Je connais bien Azalée, et si elle a abandonné le plan, c'est qu'il s'est passé quelque chose. Qu'est-ce que tu te rappelles d'autre ?

Et, là, Pistoleta se rendit compte qu'il avait complètement oublié Boulet, jusqu'à aujourd'hui. Le chien n'était pas dans la carcasse de la voiture. Il ne l'avait pas vu, ni entendu au cours de ses recherches. Il ne pouvait pas affirmer non plus qu'il était dans le véhicule au moment de l'accident. Alors, s'il avait oublié ça, qu'avait-il pu oublier d'autre ? Et qu'avait-il pu se passer le temps qu'il était inconscient ? Mal à l'aise, il fit part de ces réflexions à Guilhem.

Le silence qui suivit dura longtemps. L'homme, enfermé dans ses pensées, marchait de long en large dans la pièce.

Rafaël sortit respirer l'air frais. Il avait perdu sa femme et il savait ce que ressentait Guilhem, cette espèce de rage sourde face au destin, cette douleur terrible.

Mais peut-être retrouveraient-ils Azalée...

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