ROMAN, FORCE ET AMOUR

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Après avoir fini la toilette d'Iléa, Roman avait remis du bois dans la cheminée et s'était assis près d'elle, le regard hypnotisé par son corps martyrisé. Il la revoyait se baignant au lac, rayonnante. Elle gémit et se recroquevilla sur le côté, soulageant son épaule brûlée avec un Soupir. Il se pencha et l'appela à mi-voix. Mais elle était loin, hors de sa portée. De nouveau, il pleura et admit enfin l'attachement qu'il ressentait pour elle.

Quand la porte de la chambre s'ouvrit, il se leva d'un bond, comme arraché à un rêve. Camilion s'avança paisiblement et le serra dans ses bras, dans un geste de réconfort. Il s'approcha du lit, étendit les mains au-dessus du visage d'Iléa et fut violemment projeté contre la porte dans un éclair bleuté. Il y avait dans la pièce comme une odeur d'orage. Roman aida le guérisseur à se relever en demandant :

— C'était quoi ?

— Je ne sais pas vraiment, son système d’auto-défense ou quelque chose comme ça. Elle m'a flambé !

Camilion n'en revenait pas. Il était rouge du bout des mains jusqu'aux coudes, comme après un coup de soleil.

— C'est la première fois que cela m'arrive ! Mais j'ai déjà entendu pas mal d'histoires de ce genre.

— Qu'est-ce que tu vas faire ?

— Ce que j'aurais dû faire, avant toute chose, lui parler.

Il s'était rapproché du lit et avait murmuré d'une voix calme et douce. Après quelques minutes, Roman l'avait regardé d'un air surpris, ne comprenant absolument rien de ce qu'il entendait. Cela lui rappelait un ruisseau qui court, c'était plein du bruissement des feuilles et du souffle du vent dans les grands hêtres. Camilion s'était tourné vers lui et avait dit d'un air complice :

— Tu vois bien que tu comprends ce que je lui dis.

— Mais je ne t'ai rien...

— Non. Ce n'est pas la peine... avait répondu Camilion amicalement moqueur. Tu devrais apprendre à fermer les fenêtres de ton esprit, Homme qui court au milieu des chevaux ! Et, si tu tiens tant à elle, aide-moi à la maintenir parmi nous. Parle lui d'ici, de nous, de la vie, de toi. Dis-lui ce que j'ai entendu dans ton cœur. Et moi, je vais soigner ses blessures. Sois attentif car je vais raviver ses souffrances, hélas...

La gorge serrée, Roman regarda Camilion sortir son matériel d'un sac de cuir : divers fils et aiguilles qui allaient servir à recoudre ses blessures, une courte lame taillée dans une pierre noire. Il posa tout cela sur la tablette près du lit.

— J'ai besoin d'eau chaude et de linges propres. Amène-moi aussi deux verres et de l'huile d'amande, je te prie.

Il sortit ensuite diverses plantes dont il fit un mélange dans un mortier. Il ajouta une poudre ocre et posa le tout sur la poutre de la cheminée. Il déposa une pincée de sel aux quatre coins de la pièce et brûla de la sauge pour purifier les lieux et les êtres. Quand Roman revint, Camilion était debout, face au feu, bras levés au ciel.

— Forces-Bonnes, aidez-moi à guérir cette femme qui se meurt. Donnez-lui l'énergie de se battre. Rappelez-lui que la vie est belle. Entourez-la d'Amour, et soyez-en remerciées.

Il s'inclina pour saluer et revint vers sa patiente.

— Iléa, écoute. C'est Camilion et Roman avec toi.

Elle ouvrit les yeux quelques secondes à l'appel de son nom et soupira en les voyant, rassurée. Ils passèrent deux heures à son chevet, rapprochant les chairs, recousant les plaies. Camilion avait ajouté l'huile d'amande à son mélange de plantes et en badigeonna chaque blessure.

— Cette pommade favorise la cicatrisation. Elle protège des infections et limite les hémorragies. J'y ai ajouté quelque chose pour la douleur. Mais ça ne marche pas toujours... sur les Différents.

Roman parla doucement à son amie, de la forêt, des chevaux sauvages comme les nuages, des cascades si joyeuses. Il épongea les perles de sueur à son front, rafraîchit ses lèvres tuméfiées. Il la laissa planter ses ongles quand elle s'accrocha à sa main, secouée par la douleur. Camilion travaillait avec calme et précision, en silence. Il acheva par son visage et de même recousit la blessure au front de Roman. Ceci fait, il se redressa et s'étira comme un chat. Il nettoya et rangea son matériel puis il magnétisa sa patiente quelques instants. Enfin, il sortit une fiole d'argent délicatement ciselée, portant le signe des Sirius et emplit les deux verres à demi. Ils les vidèrent lentement, en écoutant le feu ronfler.

— Roman, je crois que nous allons vers une période difficile. Ce n'est pas la première, mais nous n'avons pas eu à nous battre depuis longtemps et nous sommes quelque peu divisés. La Milice n'est pas venue faire son tour d'inspection habituel. On les connais. Ils ont piégé Iléa. Quelqu'un l'a dénoncée et le plus grave, c'est que c'est l'un d'entre nous !
— Ce pourrait être Jordan, tout simplement.

— Je ne pense pas. Il aurait pu le faire depuis longtemps, s'il l'avait voulu. Ils nous l'ont envoyé parce qu'il nous connaît.

— Et il connaît bien la région aussi.

— Nous avons un grand souci... Je vais rejoindre les autres à présent et leur donner des nouvelles. Je ne resterai pas absent très longtemps. Veille sur elle.

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