Chapitre 1 trou noir

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Une femme blessée à la tête par un hématome était étendue sur un lit, semblait dormir. Elle portait un chemisier tâché de sang et d’encre noire, gardant dans sa main un couteau long et tranchant.

Dans la cuisine, une femme sur le sol du carrelage se noyait dans une mare rouge. Sur le mur, un message écrit : le démon a pris ton âme. Dans le salon, des verres imprégnés d’alcool laissaient encore échapper des vapeurs de whisky et de Martini. La pièce était désordonnée. Des journaux s’empilaient sur un buffet à côté d’une chaîne Hi-fi et des CD de chanteurs. La table de repas avec les couverts utilisés, mais n’était pas encore débarrassés. Les miettes de pain restaient encore sur le carrelage. Les cadres de photos d’enfants rendaient la pièce joyeuse dans cette pièce si sombre. Sur le canapé, un homme tête baissé se cachant le visage devant ce spectacle horrible, tremblant, comment allait-il sortir de cette situation ? Il devait de se débarrasser de ce corps embarrassant dans la cuisine. Il réfléchissait.

La femme se réveilla et découvrit des tâches sur son chemisier et le couteau de cuisine dans la main. Aucun souvenir de ce qui s’était passé et depuis combien de temps, elle dormait. Elle comprit juste qu’un drame planait dans cet appartement. Paniquée, elle se leva d’un bond du lit. Elle se hâta dans le salon où le silence régnait sans musique. Ce n’était pas l’habitude d’Henri. Sa position repliée indiqua pour elle, qu’un événement devait le toucher. particulièrement, mais quoi ? Aucune trace de sang sur lui, donc ce n’était pas avec lui qu’il se produisit le drame. Avant de poser des questions, elle passa dans la cuisine et là, c’était la stupeur. Elle découvrit avec horreur, une femme morte. Un bruit suspect alerta Henri. Il se précipita dans la cuisine.

— Qui est-ce cette femme ?

— C’est personne en particulier.

— Ta maîtresse peut-être.

— Tu n’as pas besoin de le savoir.

— Ben si, quand même !

Il commença par nettoyer le sang sur le carrelage et sur le corps, puis traîna le cadavre jusqu'au tapis pour l'enrouler. Marion assista à la scène, immobile. Figée, la torpeur la paralysa. Elle transpirait à grosses gouttes, la sueur coulait sur le visage. Elle ne réalisait pas et ne sortait pas de ce sommeil d’horreur. Et pourtant, le résultat fut là. Aucun souvenir ne lui revenait. Persuadée de sa responsabilité, l’évidence ne se cachait pas.

— Je suis désolée Henri de t’entraîner là-dedans, je suis responsable de tout cela et je reste à rien faire. Je suis devenue un monstre à ce point, je suis effrayée de voir ce que je suis devenue depuis de ces derniers mois. Je vois que cela ne s’arrange pas, quand je vois le résultat aujourd’hui.

Henri la regarda durement. Impassible devant elle, il n’exprimait aucun sentiment. Cette indifférence glaça la jeune femme. Il fronça les sourcils, la situation l’embarrassa. Il connaissait ses faiblesses, il pouvait en jouer avec sans même qu'elle ne s'en aperçoive. Son côté grave montrait au contraire qu'il s'impliquait à résoudre ce problème, il prenait tout en main.

— Cette rupture de vingt et un ans, me fait découvrir une autre personne, mais tu n’es pas un monstre pour autant. Je m’occupe de tout, repose-toi en attendant.

— Je dois assumer et me dénoncer à la police.

— Non, non, personne ne doit savoir.

— Tu sais très bien qu’une personne va signaler sa disparition, une enquête va être ouverte.

— On n’est pas encore là, laisse-moi faire.

— Nous ne sommes pas encore là, laisse-moi faire.

— Que s’est-il passé Henri ? Je l’ai tuée, dis- le moi s’il te plaît.

Marion, bouleversée, prête à craquer, les larmes n’allaient pas tarder à venir. Tremblante, elle détourna de son regard la vue du cadavre. C’était trop dur, pour elle. La tête lui tournait, l’émotion fut trop forte. Les jambes de dérobaient, elle tenait à la table de la cuisine. La pâleur de son visage, une angoisse serra sa gorge. Sa respiration s’entendait, elle voulait fuir ce terrible tableau devant elle.

Henri ramassa le couteau. La question l’embarrassa, allait-elle être assez forte pour porter ce crime ? Elle n’avait pas le choix, cependant, il fallait enlever toute trace de cet événement. Séparé de sa compagne, les enfants vivaient avec leur mère. Il était instable, un séducteur dans l’âme, un vrai cœur d’artichaut, avec un certain bagou. Il vit sa décomposition, toutefois, il devait se tenir au plan qu’il avait dans sa tête. D’un côté, tiraillé par son désir de la protégée, et se protéger lui-même, le dilemme était jusqu’où pouvait-il aller ?

— Il faut trouver une solution pour l’enlever de là.

— Tu ne réponds pas à ma question.

— Oui, tu l’as tuée, je te raconterai plus tard. Nous avons une priorité primordiale et il faut agir vite.

— Je ne souviens de rien, pourquoi ?

— Tu as un hématome sur le crâne. Tu es sous le choc. Je suis là, je ne te laisse pas tomber pour autant.

Henri se dirigea vers elle et la prit dans ses bras. C’était un moment agréable pour elle, il la soutenait comme il avait toujours fait. Il ne montrait pas d’insensibilité vis-à-vis d’elle, mais devait mettre une distance entre eux. Les sentiments d’hier n’étaient pas les mêmes aujourd’hui. Ce n’était pas le moment non plus, de se laisser aller à des démonstrations affectueuses. Il gardait toujours en lui, cette attirance du passé.

— Il faut tout nettoyer aussi Marion. Je le ferai, j’ai ce qu’il me faut comme matériel. Je vais enlever ce corps et tu restes ici, pendant ce temps. Fais-moi confiance.

Marion se dégagea de ses bras.

— Qui est-ce cette femme ?

— Moins tu sauras, mieux tu te porteras.

— J’ai le droit de le savoir.

Henri commença par nettoyer le sang sur le carrelage et sur le corps. Puis il traîna le cadavre jusqu’au tapis et l’enroula. Marion assista à la scène, immobile et béate. Elle ne leva pas le petit doigt pour l'aider, prise dans une torture des entrailles qui se nouaient et lui coupaient la respiration. Elle parlait en suffoquant, sa voix se brisa.

— Je suis désolée Henri de t’entraîner là-dedans, je suis responsable de tout cela et je reste à rien faire. Je ne savais que j’étais un monstre à ce point, je suis effrayée de voir ce que je suis devenue depuis de ces derniers mois. Je vois que cela ne s’arrange pas, quand je vois le résultat aujourd’hui.

Henri la regarda, son sang-froid la troublait et l'admirait en même temps, comment pouvait-il se montrer calme ?

— Il se peut qu’on ne connaît plus comme avant, cette rupture de vingt et un ans, me fait découvrir une autre personne, mais tu n’es pas un monstre pour autant. Je m’occupe de tout, repose-toi en attendant.

— Je dois assumer et me dénoncer à la police.

— Non, non, personne ne doit savoir.

Henri embarqua le corps sur son dos, il faisait nuit dehors. Pas de temps à perdre, il devait cacher le cadavre avant le lever du jour. Il prit avec lui, une pelle et des bottes. Direction vers la forêt de Brocéliande. L’idée de cet endroit lui venait naturellement, habitant à une cinquantaine de kilomètres de là, il devait être éloigné du moindre soupçon par rapport à la police. Ce n’était pas le cas de Marion, on verrait un rapprochement avec elle. Au bout d’une heure de route, il arriva à Paimpont Il sortit de sa voiture et enfila ses bottes et creusa un trou profondément. Puis, il transporta le corps et le jeta dans la fosse, le recouvrit. Procédant à un nettoyage minutieux du terrain, effacer toute trace en pleine nuit avec le simple éclairage de sa voiture était un risque. Ne pas tardant pas sur les lieux, il fila chez lui, rejoindre Marion.

La jeune femme encore debout, ne trouvant pas le sommeil, son état d’angoisse grandissait par les questions qui fusionnaient dans sa tête. Toujours vêtue de son chemisier tâché de sang, elle devait s’en débarrasser.

— Je ne vais pas pouvoir le garder, as-tu un vêtement à me prêter ?

— Je vais te prêter ce haut, on va le jeter à la poubelle l’autre.

— Comment ? Je peux le laver.

— Non, si la police le retrouve, elle va trouver la présence de sang dessus.

— Oui, c’est vrai, tu as raison.

Henri lui donna le haut et Marion déboutonna son chemisier devant lui, pour enfiler le nouvel habit. Elle ne réfléchissait même pas qu’il était présent avec elle. Obnubilée et encore sous le choc des derniers événements qu’elle devenait presque une zombie. Elle ne réagissait plus, incapable de rebondir, elle était pétrifiée. Aucun lien amoureux ne les liait ensemble et la situation ne s'y apprêtait pas.

— Je ne comprends pas d’être arrivée jusqu’au meurtre, j’ai touchée le fond. Depuis ces derniers mois, je ne me reconnais plus. L’image de la gentille qu’on me donne, je ne le supporte plus. J’ai fait une chose regrettable qui a coûtée mon amitié avec des personnes. Cette personne m’a dit une phrase : je ne savais pas aussi méchante, je me suis trompé sur toi. J’ai pris conscience de mon acte, mais c’était trop tard, elle ne me pardonnera jamais. Et me voilà aujourd’hui, tueuse. Je ne maîtrise plus rien, je suis habitée par un démon, c’est ce qu’il est écrit sur ton mur. Comment vas-tu enlever ce mot ?

— Je vais arracher la tapisserie.

— Je suis un être méchant, pourquoi restes-tu avec moi ? Le pire, je ne sais pas pourquoi je l’ai tuée, quel est l’événement a pu me pousser à tuer cette personne chez toi ? Pourquoi cet hématome à la tête ?

— Je suis fatigué, il faut essayer de dormir.

— Je ne peux pas, je suis dans un état d’angoisse, je veux comprendre et toi seul a les réponses à mes questions.

— Non, je ne les ai pas, je ne suis pas dans ta tête. Tu perds pied en ce moment. Cela peut expliquer.

— Tu crois que je deviens folle !

— Je n’ai pas dit cela. Nous discuterons de cela demain. Je vais me coucher.

Henri laissa la jeune femme seule. Le chemisier était resté sur le canapé et elle le regarda attentivement.

— Ce n’est pas le mien, pourquoi était-il sur moi ?

Elle se dirigea vers la salle de bains et découvrit l’ampleur de la contusion.

— Tout cela n’a pas de sens. Je vais m’allonger un peu, je trouverai peut-être une explication.

Le lendemain matin, les traces de la veille étaient encore là. Henri retira les cadres du mur et arracha le papier peint. Le mur se retrouva nu. Marion n’avait pas prêté attention aux verres d’alcool.

— J’avais bu hier, l’alcool a peut-être modifié mon comportement hier pour cette femme.

— Marion, tu n’étais pas saoule hier.

— Pourquoi ce trou de mémoire dans ma tête ? J’ai l’impression de ne pas me souvenir de rien et pourquoi je suis chez toi. Pourquoi portai-je ton chemisier ? Avons-nous couchés ensemble avant ?

Ce n’était pas la question à poser, il la regarda en la fixant avec un regard effrayant. Elle savait pour le chemisier. Il ne s’y attendait pas qu’elle le remarquerait aussi vite. Il devait se montrer prudent dans sa réponse. Il restait vague, pour gagner du temps. Il réfléchissait à son avenir, pour chasser tout soupçon sur lui. Il pensait à la gentille jeune fille du passé, dévouée et gentille prête à se donner pour les autres. La question l’embarrassa. Il ne regarda pas en face, baissa la tête et se détourna d’elle. Il ne voulait pas se trahir.

— Je ne peux pas te dire.

La réponse l’étonna. Ses yeux s’ouvraient en grands.

— Si aucun de d’eux ne se souvient, c’est le comble ou nous étions dans un tel état d’ivresse…

— C’est une chose possible.

— Tu te fiches de moi Henri ! Tu m’as dit tout à l’heure que je n’avais pas bu.

— Est-ce si important à tes yeux de le savoir ? Le résultat est que tu as tuée cette femme.

La réponse la déstabilisait, elle ignorait la vérité et ce trou de mémoire l’agaçait, le choc en était -il responsable ? ou sa blessure à la tête ? Les larmes noyaient les yeux de la jeune femme désespérée de son geste. Le plus terrible était de ne pas s'en rappeler, pourquoi aurait-elle tué une femme qu'elle ne connaissait pas ? Que s'était-il passé pour mériter une telle frigidité. D'habitude, il était chaleureux, enjoué, c'était un autre homme marqué par son passé.

Il lui lança cette phrase avec une telle froideur, un ton d’agacement par son insistance, elle devait laisser tomber. Jamais de sa vie il ne lui avait parlé ainsi. Cette attitude la choqua et la paralysa dans toute initiative. Elle ne savait plus quoi dire, n’ajouta rien, préféra se retirer au lieu de lui répondre, se sentit anéantie et assommée. L’angoisse grandissait pour elle, car Henri lui mentait ou cachait la vérité, il se perdait. Il prit le chemisier et le jeta dans un sac plastique. Il sortit de la maison, Marion profita pour regarder dans la penderie. Un porte-manteau était vide, était-ce pour le chemisier ? Les vêtements sales jonchaient sur la moquette à côté du lit, sous le lit, passa dans la salle de bains dans la corbeille à linges. Il ne posséda pas de beaucoup de chemisiers, apparemment c’était le seul qui manqua à l’appel. Il portait plutôt des sweets, les tenues de sport. Sans savoir pourquoi, le chemisier qui était une chemise se retrouva sur elle, l’accuser du crime. Il lui manqua des éléments pour comprendre. Son retour interrompit sa fouille. Tant qu’elle gardait en secret ses soupçons, elle ne courrait aucun risque. Par-contre, elle devait découvrir qui était cette femme.

— Il serait peut-être préférable de rentrer chez moi.

— Il ne faut personne ne s’aperçoive de ta présence ici.

— Ma voiture est là, c’est un peu compromis cette idée.

— Non, elle est à moi à présent.

Henri lui passa ses mains autour du cou et tenta de l’étrangler. Se débattant comme elle pouvait, lui donna des coups de pieds dans ses parties intimes, la lâcha soudainement. Profitant de son état de faiblesse, plus de temps à perdre pour prendre la fuite, heureusement que sa clé de voiture resta dans la poche de son pantalon. Elle ouvrit la porte d’entrée, se précipita pour ouvrir la portière, rentra dans sa voiture.

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