Plus on est de fous

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Samuel s'approcha doucement des deux verres qui étaient présents sur la table de la cuisine. A l'intérieur, du riz cuit avait été placé, puis deux étiquettes avaient été collées sur les verres, "je t'aime pour l'un" et "je te déteste" pour l'autre. En face de lui, sa sœur tenait son portable à la main.

  • T'es prête ?
  • Et comment ! répondit Sara d'un air enjoué en déclenchant la caméra. Salut tout l'monde ! Aujourd'hui, c'est LE grand jour ! Car aujourd'hui, nous allons vérifier la théorie avancée par Sophie.

Samuel ne peut s'empêcher de soupirer. Sa cousine, qui avait des idées pour le moins farfelues, avait un jour entendu parler d'un site web qui parlait de tout et n'importe quoi - surtout n'importe quoi. Sur les réseaux sociaux, son dernier partage concernait une expérience réalisée avec du riz cuit. Pendant plusieurs jours, lui et Sara avaient à tour de rôle insulté le riz sur lequel il y avait marqué "je te déteste" et avait dit des mots doux à celui où il y avait marqué "je t'aime". Le but avait été de démontrer que la pensée avait une forte influence sur la matière.

Sara approcha son téléphone des deux verres pour en filmer le contenu. Dans le verre ou était inscrit "je t'aime", de la moisissure était apparue. En revanche, dans celui qui portait l'inscription "je te déteste", le riz était parfaitement intact.

  • On ne va pas se mentir, continua Samuel je savais déjà que ça allait produire ce résultat. Pourtant j'y ai mis tout mon cœur, hein ! J'ai insulté le riz comme jamais, je lui ai parlé comme s'il s'agissait d'une certaine personne qui se trouvait face à moi, mais... Rien à faire, aucune moisissure de présente.

Sara se rapprocha de son frère et le regarda, toujours face à la caméra.

  • Cela veut-il dire que tu acceptes la théorie partagée par Sophie, selon laquelle l'esprit peut influer sur la matière ? Parce que la moisissure, c'est de la vie, pas vrai ?
  • Pas le moins du monde, affirma Samuel en regardant Sara puis l'objectif du téléphone. Parce qu'il y a plusieurs choses qui ne vont pas dans cette méthode.

« Tout d'abord,outre les nombreux paramètres à prendre en compte - température des lieux, riz trop sec ou trop humide, etc - ça peut tout aussi bien être dû au hasard si le riz avec marqué "je t'aime" est tel qu'il est. De plus, il n'y a que deux bocaux. Même avec trois, ou on n'aurait par exemple rien écrit dessus, cela ne prouverait pas grand chose. C'est même très faible si on veut en tirer une conclusion scientifiquement valide.

De plus, la répartition des bocaux n'a pas été faite au hasard et nous n'avons pas réalisé de procédure en aveugle, c'est à dire que chacun de nous deux savait quel était le verre "je t'aime" et le verre "je te déteste", ce qui a pu nous influencer sans qu'on le sache sur la position du riz dans la pièce et son ensoleillement, par exemple.

Enfin, la durée de l'expérience n'était pas fixée à l'avance. Certains participants ont très bien pu attendre comme nous que de la moisissure apparaisse alors que d'autres ont attendu un peu plus avant de tirer une quelconque conclusion.

Pour cela, Sophie, je te propose de refaire la même expérience, mais dans les conditions de mon choix... Et avec nous. Qu'est-ce que tu en penses ? Parce que pour l'instant, les seules choses que l'on peut en conclure, c'est que la moisissure parle français... Ou que la théorie défendue est fausse. »

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