Sur le champ de bataille

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« Sara vit désormais chez moi depuis trois semaines. Au début ça a été un peu laborieux (qui fait quoi, les trucs à ne pas faire, tout ça), mais chacun de nous a finalement pu (re)prendre ses marques. Entre-temps, il a bien fallu faire quelques courses, histoire de tenir un peu et de s'entendre sur les goûts de chacun. Du coup, direction le supermarché du coin (quoi que "champ de bataille" conviendrait mieux) en sa compagnie. En plus, aujourd'hui, nous avions pour mission de préparer un gâteau pour l'anniversaire d'une cousine.

En chemin, nous avons croisé Vino, un de mes meilleurs amis, qui venait lui aussi faire ses courses.

Nous trois, aventuriers plus ou moins accomplis, avons dû patauger dans la marée humaine infernale du week-end avant d'arriver à destination des ingrédients. Ça, encore, ce n'est pas très difficile avec un peu d'entraînement (suffit de savoir nager, comme le dirait l'autre). Le pire, c'est pour sortir de là. Alors même que la libération est toute proche, il nous faut alors accomplir l'ultime épreuve. Affronter l'émissaire du mal absolu, j'ai nommé : la caissière. Cet être vil et sans cœur ne daignera jamais vous laisser un quelconque instant de répit et, alors que vous essayez de vous organiser, ceux qui sont derrière râlent parce que vous n'allez pas assez vite (je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi pressé d'aller au casse-pipe). D'habitude, c'est un véritable supplice, mais depuis que Laura m'a montré le truc, j'ai reçu l'illumination. Car oui, je sais désormais comment en venir à bout ! Cela ne m'avait pas paru évident, mais à présent que j'y pense... Comment ai-je fait pour ne pas y penser plus tôt ?

Là où je veux en venir ? Ces articles plus ou moins carrés qui s'amoncellent sur le tapis, tels des cubes colorés que l'on doit regrouper le plus vite possible avant que tout ne déraille ... Quelle joie que de terminer avant la caissière et de lui demander la note avec un petit sourire pour bien l'achever (comme quoi, être un geek peut finalement servir) !

Mais ce n'est pas tout...

Selon les cas, il reste un dernier adversaire à éliminer : l'espèce de casse-pied qui nous saute dessus à la sortie du magasin pour vanter les mérites d'un je-ne-sais-quoi dont personne n'a besoin. En ce qui me concerne je dois avoir un mauvais karma avec les vegans (comme si les chiens ne suffisaient pas), parce-que l'un d'eux nous a limite agressé en voyant les packs de lait que nous avions acheté. Tel un inquisiteur accusant sa victime d'être une sorcière ayant passé le plus horrible des pactes avec le diable, il a tenu à nous faire un sermon sur le supplice des animaux enfermés et violés par les hommes tout en nous mettant sous le nez des tracts gores et anthropomorphistes à souhaits (je préfère ne pas détailler, mais c'était pas un truc à donner aux gosses). Quoi qu'il en soit, ce gars-là est tombé sur les mauvaises personnes (la fiente de la blanche colombe n'atteint pas les verts crapauds, comme on dit). Lui qui cherchait le diable en nous, il l'a finalement trouvé. Mais pas comme il le pensait.

De notre côté, nous en avions marre, lassés que tous les vegans du monde nous ressassent les mêmes choses comme s'ils avaient tout appris par cœur (tout en oubliant que certains de leurs arguments sont parfaitement réfutables, voire erronés, mais passons). Déjà que toutes les discussions sur internet qui parlent d'animaux d'élevage finissent en pugilat, si en plus ils attaquent IRL...

J'étais un peu inquiet en voyant que ma sœur commençait à perdre patience, d'autant plus qu'il y a eu un léger attroupement quand le gars a commencé à nous invectiver de toutes sortes de noms pas vraiment flatteurs. Bref, je passe encore les détails là encore, mais le gars, visiblement vexé de ne pas nous voir tomber à genoux en demandant pardon et demander à être convertis (comment ça, j'exagère ?), nous a sorti l'argument ultime : « De toutes façons vous n'êtes pas les petits de la vache, donc vous ne devez pas boire son lait ! Prenez plutôt du lait de soja. »

Erreur fatale. Parce-que quand Sara fâchée...

  • Hé, mon chou, tu crois vraiment qu'on a une gueule de soja ? Va raconter tes salades ailleurs avec ton jus, nous on a des courses à ranger !

Sara toujours faire ça.

On s'était attendu à tout, en fait, mais pas à ça. En tout cas nous sommes repartis hilares, mais intacts. Même les passants aux alentours et le vigile qui était venu voir ce qui se passait étaient morts de rire. Le gars, lui, n'a pas su quoi répondre.

J'en rigole encore. Je crois que j'irai faire les courses plus souvent avec elle, dorénavant... »

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