Chapitre 21 : Je suis foutue

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Un rictus diabolique se dessine sur mes lèvres lorsque je remarque que ma petite manigance fonctionne. Me voir avec un autre homme lui déplaît. Que croyait-il au juste ? Que j’allais venir sans culotte pour qu’il fasse ce qu’il veut de moi ? Eh bien il se trompe de personne ! Au temps du lycée, il est certain que cela ce serait passé comme ça, mais après le mal qu’il m’a fait, comment pouvait-il croire que tout se passerait comme il le désire ? La balle est de mon côté désormais !

Daegan avance à grandes enjambées, les yeux de plus en plus sombres et se plante devant la table que je partage avec mon homme masqué. Mon regard reste bloqué dans ses iris foncés lorsqu’il prononce :

— Salut poupée, je ne savais pas que tu viendrais avec ton chien de garde, fait-il en désignant Gabin d’un geste de la tête.

Mon rencard se lève et tend la main en signe de bienveillance. Il est élégant et il sait bien se comporter, c’est un plus à mes yeux. L’autre le regarde de bas en haut et pouffe, exprimant son dégoût pour un homme si classe, si distingué. Alors, pour lui faire comprendre qu’un concours de celui qui pisse le plus loin est ridicule, je secoue la tête et réplique :

— Bonsoir Daegan, je te présente Gabin, mon petit ami…

Ce dernier avale sa salive de travers et se tourne vers moi, le regard interrogateur. Mais la seconde d’après, il ajoute :

— Je suis content de faire votre connaissance, vous faisiez la manche à l’extérieur il me semble, mais je suis désolé, je n’ai pas de monnaie, je paie toujours avec ma Mastercard Gold…

Et bim ! J’ai une irrésistible envie de m’asseoir et de rigoler jusqu’à me rouler par terre. La soirée s’annonce riche en pique et en fou rire !

Gabin, fier de lui, se tourne et va prendre une chaise supplémentaire à la table derrière nous. Pendant ce court laps de temps, Deagan s’installe à sa place, en face de moi et joins ses deux mains sous son menton, il me fixe intensément. Lorsqu’il revient, Gabin peste et récupère sa veste sur le dossier de sa chaise puis vient s’installer à mes côtés. Là, il pose une paume sur ma cuisse, beaucoup trop près de mon entrejambe et me regarde affectueusement. Je le laisse faire, cela fait partit intégrante du « jeu ». Il tend ensuite sa main droite et me caresse la joue du bout du pouce. Cette sensation est agréable, tellement délicate que je me surprends à fermer les yeux, profitant de cette attention particulière.

Curieusement, il prend plaisir à jouer le jeu que j’ai moi-même imposé et cela, bien que je trouve ça génial, me surprend. Mais ce soir, je n’ai qu’un seul objectif : en faire baver Daegan et tant mieux Gabin m’aide ! Intérieurement, je me dis que tout ça n’est pas que le fruit du hasard ! Cette rencontre avec l’homme masqué suivit par le retour de mon amour de jeunesse. Le Maître, là-haut, à sans doute un message à me faire entendre, mais lequel ?!

La serveuse revient et prend nos commandes. Elle à l’air étonné de voir que nous prenons le repas à trois. À mon avis, cela ne doit ce faire que dans de rares cas, mais qu’elle se rassure ! Je n’ai pas l’intention de me laisser aller au trio ce soir !

Quoi qu’il en soit, l’atmosphère est tendue, l’électricité dans l’air est presque palpable. Gabin se laisse aller aux caresses tandis que Daegan semble être présent pour nous pulvériser du regard, toujours en silence. Moi, je suis là, sereine, j’admire les deux hommes qui se battent silencieusement pour moi, j’attends que l’orage explose et que la pluie tombe…

Alors que je suis dans mes pensées, Daegan daigne enfin ouvrir la bouche :

— Alors comme ça, vous sortez ensemble…

— Oui, répond Gabin, enfin, on ne « sort » pas ensemble, ce mot est adéquat pour les enfants… Nous partageons une histoire d’amour sont les bons mots !

Encore une fois, Deagan se marre et réplique :

— Tu m’en diras tant, beau gosse. Mais dis-moi, ça ne te dérange pas que ta meuf se trémousse à poil devant des gars qui bandent comme des taureaux ? Et qu’elle se laisse tripoter les miches par la même occasion ? Ou bien y’a que les « gosses » qui pensent comme ça et tu es trop « mature » pour te dire que son métier c’est salope ?

Là, c’est trop ! Mes mains se fracassent contre la table et tous les regards se braquent sur moi.

— Daegan, tu fermes ta gueule et tu me suis ! dis-je en me levant de ma place.

— Désolée poupée, c’est ce con, là ! il m’exaspère avec ses attitudes !

Sans le regarder, je l’entraîne avec moi dans le couloir des toilettes puis, le dos collé contre le mur, je lui demande :

— Qu’est-ce que tu fous ? C’est quoi ton problème au juste ?

Il est trop près… beaucoup trop près de moi, mais il faut bien avouer que le couloir n’est pas très grand non plus. Ma respiration est rapide, je triture mes doigts, je ne dois pas céder à son charme légendaire. Il est important que je me concentre davantage sur son attitude irrespectueuse plutôt que sur sa proximité, sa beauté et son parfum enivrant.

— Je n’ai aucun problème particulier, Alicia, mais je pensais qu’on était adulte toi et moi. Tu n’as pas fait preuve d’intelligence en te pointant avec ce bouffon…

— Déjà, je ne suis pas venue ici pour TE voir, mais pour passer du temps avec Gabin !

— Alors pourquoi CE restaurant si tu ne voulais pas me voir ? Je sais que tu es là, avec lui, juste pour me faire chier. Tu devrais avouer, poupée… termine-t-il en s’approchant d’un peu plus près.

Il n’est plus qu’a quelques centimètres de moi et son souffle chaud se répand sur le haut de ma tête, j’en ai des frissons et les papillons dans mon bas ventre ne cessent de voler. Il fait chaud, beaucoup trop chaud dans ce petit espace et je crois même que le rouge me monte au visage. Je sens mes joues s’empourprer et mes oreilles bourdonnent. Sa présence si près de moi me déstabilise.

Est-ce que je dois lui avouer tout ce que je pense ? Tout ce que je ressens ou ce que j’ai pu ressentir pour lui par le passé ? Est-ce que ça me libérerait d’un poids invisible, mais bel est bien présent ?

Non… il ne doit rien savoir, il en jouerait !

— Tout simplement parce que nous voulions un dîner romantique et d’après Gabin, c’est le lieu parfait…

— Je n’y crois pas une seule seconde, Alicia. Je sais pourquoi tu es là. Je sais que je ne te laisse pas indifférente. La vérité se trouve là, elle se lit dans tes magnifiques yeux. Je suis même presque certain que si je fais ça, tu me laisseras faire, dit-il en se baissant juste un peu pour que son visage soit en face du mien.

Les yeux rivés l’un dans l’autre, je suis hypnotisée par ses mots, par le son de sa voix. Ses lèvres s’approchent dangereusement des miennes, mais je suis scotchée, incapable de bouger et d’ailleurs, je n’en ai pas envie. Je ferme les paupières et repense à la sensation de sa langue qui s’envoie en l’air avec la mienne hier durant la photo. Je veux qu’il le refasse, qu’il me charme avec ces lèvres douces et charnues…

Mais Deagan me dépose juste un petit baiser sur les lèvres puis se recule. Un sourire en coin déforme son visage. Il sait. Il a tout compris. Je suis foutue...

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