Chapitre 18- Petit bout de papier

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Alors que Daegan s’approche de moi après avoir fait quelques photos avec mes collègues, je me fige, sa présence me hérisse le poil et me donne des frissons incontrôlables.

— À nous deux, lance-t-il en se plaçant sur ma droite.

Un son étrange s’échappe de mes lèvres lorsqu’il pose sa main sur ma taille et me colle contre lui. Je souris en façade, mais intérieurement, je surchauffe. Son parfum emplit mes narines et son corps musclé me donne envie de le toucher, mais je me ravise, il ne doit en aucun cas savoir qu’il me fait de l’effet.

Il s’éternise à mes côtés, nous en sommes au moins au douzième cliché lorsqu’il annonce :

— Allez, pour la dernière on se roule une pèle !

Mes yeux s’écarquillent et ma respiration se bloque. Je le regarde, Daegan a l’air tout à fait sérieux. Les mots d’Amy me reviennent en tête :

« Tu dois être docile, Alicia, ne refuse rien que tu ne peux accomplir au risque de décevoir tes clients et de ne plus être demandée. Je comprendrais que tu refuses la sodomie si tu n’en es pas adepte, mais tu peux les embrasser, il n’y a rien d’étrange à cela. Au contraire, la plupart de tes clients te le demanderont… »

Je n’ai pas le temps d’hésiter, Daegan s’est déjà tourné vers moi, impatient de goûter à mes lèvres. Sans réfléchir plus longtemps, je pose mes mains sur ses épaules. Les siennes se trouvent de part et d’autre de mes hanches. Si ce n’était pas « forcé », ce serait l’un des plus beaux baisers du monde.

Mes yeux se ferment et je l’embrasse. Sa bouche est charnue, légèrement humide et tellement douce. Sa barbe naissante me caresse. Cette sensation agréable est très vite remplacée par sa langue, chaude, glissante qui tourne autour de la mienne. Contre toute attente, son haleine est fraîche malgré le fait qu’il ait bu de l’alcool. Je ne sais pas pourquoi je m’arrête sur ce détail alors qu’autre chose devrait me perturber. Ces mains descendent sur la cambrure de mes fesses, mais j’aime cet instant, je ne proteste pas et me laisse aller à se baiser qui me faisait rêver lorsque nous étions au lycée. Mes paupières sont toujours closes, je lui mordille la lèvre supérieure, il suçote ma lèvre inférieure, mon corps se colle plus encore sur son torse chaud et dur, puis un détail fait que je reviens à la réalité… Son sexe commence à se dresser.

— Je crois que nous avons assez de clichés maintenant, dis-je en réajustant ma coiffure.

J’avais complètement oublié que j’étais partiellement nue durant ce moment de plaisir partagé. Je me sens mal maintenant, moi qui voulais que rien ne filtre sur mes sentiments, c’est raté ! Il a dû sentir que la passion était là durant ce baiser ! Que je suis faible !

Je m’éloigne de lui, le laissant seul devant l’objectif du photographe. Ses amis sont retournés prendre un verre et les filles sont parties se refaire une beauté avant le second round. Il faut que j’aille les rejoindre, et vite !

À la fin de la soirée, les esprits sont chauds et les cerveaux sont beaucoup trop alcoolisés. Deux des gars dorment, il y en a un qui paraît paisible sur la banquette en cuir, l’autre dort par terre. On dirait qu’il est tombé et que les autres ont décidé de le laisser sur place,

Deux des mecs encore debout tentent de séduire les filles qui ne se laissent absolument pas faire. Et puis il y a moi et Daegan. Nous nous sommes lancé des œillades et des piques verbales tout au long de la soirée et maintenant qu’il est temps de partir, je me sens triste, je serais même capable de lui dire de me rejoindre cette nuit, mais il en est hors de question. Je ravale mon désir et enfile mon trench avant de me diriger vers la sortie. Je fais la bise aux deux garçons qui tiennent encore debout puis ouvre la porte. L’air frais me glace le sang aussitôt.

Dehors, la température est encore plus glaciale qu’en début de soirée et je remarque que ma voiture est totalement gelée. Doucement, j’avance et déverrouille les portes, puis je me faufile rapidement devant le volant et démarre mon véhicule. Au moins, à l’intérieur, je suis à l’abri du vent…

Chauffage à fond, j’attends patiemment que la voiture se dégivre en regardant les notifications sur mon portable. Comme souvent, mon compte Instagram est envahi de message que je ne lis pas. Impossible de répondre à tout le monde, j’y passerai des journées entières, voir des semaines !

En revanche, je réponds à tous les textos reçus. D’ailleurs, il y en a un d’Amy, me demandant de lui briffer la soirée dès que je suis rentrée à l’hôtel. Comme ma voiture n’est pas encore assez chaude, je lui explique immédiatement que tout va bien et que tout s’est déroulé comme sur des roulettes. Je l’informe aussi que je l’appellerais demain, dès que je suis réveillée, histoire de lui donner plus de détail.

Deux coups claquent contre ma vitre. Je sursaute violemment et je pousse même un petit cri de stupéfaction, puis je ne sais pas comment l’idée me vient, mais je verrouille les portières aussitôt. Une fois que je me sens plus en sécurité, même si au fond, c’est ridicule, car il est facile de casser un carreau, je me permets de regarder qui est la personne qui se trouve trop près de moi. J’aurai dû me douter que c’était lui ! Il me suivait lorsque j’ai dit au revoir aux garçons…

Daegan… Il ne me lâche plus d’une semelle !

En tournant la manivelle, car oui, j’ai choisi le modèle bas de gamme alors je n’ai pas de vitres électriques, je demande à travers le carreau :

— J’ai oublié quelque chose à l’intérieur ?

Punaise, ce qu’il est beau dans cette veste noire à capuche ! Une putain de véritable allure de vilain garçon ! Je me régale de le mater, et ce, même si le froid s’infiltre et me glace le corps. Après tout, cette tension palpable, presque électrique entre nous pourrait peut-être me réchauffer ?

Daegan se penche un peu, un bras posé sur le toit de la voiture et m’explique :

— Tu ne m’as pas dit au revoir, les autres sont des chanceux, je viens réclamer mon dû, fait-il, un rictus coquin sur les lèvres.

— Au revoir, dis-je en jouant le jeu et j’ajoute juste pour l’embêter, fais de beaux rêves…

J’allais refermer la vitre lorsqu’il passe son bras pour m’en empêcher. Il attrape ma main et y dépose un morceau de papier, déchiré en vitesse si je ne m’abuse. Mes sourcils se froncent et je le questionne :

— C’est quoi ?

— Tu regarderas plus tard, bonne nuit poupée… Toi aussi fais de beaux rêves, termine-t-il en faisant demi-tour afin de rejoindre la salle.

Une fois la vitre refermée, je mets le chauffage à fond et l’habitacle se réchauffe aussitôt. Le bout de papier est toujours au creux de ma paume, je l’emprisonne fermement comme si j’avais peur qu’il disparaisse. Il m’a appelé poupée. Un sourire niais fend mon visage. Je boucle ma ceinture et enclenche la marche arrière. Cette nuit, je vais véritablement faire de beaux rêves…

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