Chapitre 3 : Alizée...

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Quelques minutes plus tard, Alizée stoppe son véhicule devant les portes de l’hôtel. Sans attendre, elle ouvre sa portière et se précipite du côté passager tandis qu’un homme charmant ouvre la mienne pour que je sorte. J’accepte volontiers la main qu’il me tend alors que ma sœur lui balance ses clés en disant :

— Ne la rayez surtout pas ou je vous fais un procès !

Je pouffe intérieurement et scrute, perplexe, le jeune homme qui ne se démonte pas. Un rictus sur le coin des lèvres, il tente tant bien que mal de la rassurer, en lui disant que tout ira très bien puis, le regard chaleureux, me propose d’entrer pendant qu’il sort les valises du coffre.

— Pareil pour nos affaires, renchérie Alizée en bonne avocate, s’il manque la moindre chose, vous pouvez me croire qu’on se reverra au tribunal !

Cette fois, sa réplique cinglante semble le déstabiliser. Bastien, je le sais, car c’est écrit sur le porte-nom qu’il épingle sur la poche de sa chemise blanche, lui rétorque d’une voix claquante et virile :

— Madame, vous pouvez faire confiance à nos services les yeux fermés ! Vous êtes ici, dans ce superbe hôtel, entourés de professionnel consciencieux. Vous êtes, vous et vos affaires, bien entendu, entre de bonnes mains, ponctue-t-il sa phrase par une œillade à mon encontre.

Quelque peu gênée par l’attitude un peu trop stricte d’Alizée, j’entre et me présente à l’accueil. L’hôtesse m’annonce que ma suite se trouve au quatrième étage, celle de ma sœur, nulle part…

— Désolée, me dit-elle sans l’être vraiment. Il n’y avait plus de chambre, ni d’hôtel libre aux alentours alors, j’ai pensé qu’on pouvait dormir ensemble…

Je souffle de malchance, mais acquiesce, car au fond, je ne peux pas la laisser dormir dehors durant tout un week-end ! Nous nous dirigeons vers l’ascenseur luxueux dans lequel résonne une musique douce lorsque la belle brune de l’accueil nous interpelle en hurlant :

— Attendez mesdames ! J’ai une suite qui pourrait vous satisfaire, termine-t-elle par dire en retournant derrière son ordinateur.

— Tout est bien qui finit bien ! j’annonce en plaisantant. Je me voyais mal rentrer avec un mec avec toi dans les parages, j’ajoute en gloussant comme une ado.

Cette révélation n’était qu’un mensonge pour embêter ma sœur, mais le pire, c’est que ça fonctionne à merveille ! Alizée, les joues rougies de pudeur, s’étrangle presque avec sa salive en récupérant la clé de son nouveau palace. La dame de l’accueil, elle, n’en a que faire de mes remarques déplacées. Elle a dû en voir de toutes les couleurs entre ses murs !

Tandis que j’arrive à destination, mon portable sonne dans mon sac à main. Je le sors en même temps que mon badge et lis le texto tout en cherchant la bonne porte :

« Alizée : 22H31 : Ma chambre est magnifique ! Et la tienne ? »

« Alicia : 22H31 : J’y arrive seulement, rejoins-moi si tu veux ? »

C’est vraiment étrange de recevoir des messages de sa part, d’habitude, c’est moins on se parle et mieux on se porte. Serait-ce le début d’une complicité ? Basée sur la confiance l’une de l’autre ?

« Alizée : 22H32 : Je vais d’abord prendre une douche et je te rejoins ensuite. »

Je lui réponds un simple « OK » et poursuis mon chemin.

Lorsque j’ouvre la porte de ma chambre, je suis heureuse de remarquer qu’elle est super grande et bien décorée. Un spacieux lit aux couleurs beiges trône près d’une baie vitrée ou les lumières de la ville scintillent dans le lointain. De gros bouquets de fleurs blanches, dont je ne saurais dire le nom, sont installés sur la commode ainsi que sur la petite table du coin salon. Il y a une grande télévision, un espace-bar et toute la pièce est peinte d’une jolie teinte jaune pastel. Sur ma droite, une ouverture me donne accès à une salle de bain, sobre, mais chic à la fois. Une large baignoire fait face à un miroir et des dizaines de lampes éclairent la pièce de façon romantique. Tout est blanc, à l’exception du peignoir et des serviettes vermeilles. Sans plus attendre, je me fais couler un bain puis retourne dans la chambre en attendant mes valises.

Trois coups résonnent contre la porte et me font sursauter. Je termine de me déchausser, puis ouvre en pensant que c’est Alizée.

— Tu es vraiment très rapide aujourd’hui !

Le jeune homme me regarde sans comprendre puis bafouille :

— Je… C’est juste moi… Je vous… apporte vos sacs.

— Oh ! Merci Bastien ! dis-je en le gratifiant d’un véritable sourire.

— J’ai demandé un assortiment de nourriture pour vous au room service. Ils vous apportent ça dans une trentaine de minutes.

— C’est très gentil, merci…

Je récupère mes bagages et les étales sur mon lit. Dedans, je sors une robe de pyjama légère et mes pantoufles, ce soir, je n’ai pas l’intention de sortir, j’ai une lecture à finir.

Dans la salle de bain, entièrement nue devant le miroir, j’admire mon corps qui n’est pas sans défaut. Certes, j’ai une jolie poitrine naturelle, des abdominaux dessinés et pas un centimètre de graisse sur mon tour de taille, mais une tout autre blessure me nargue jour après jour…

Mes iris se posent sur cette entaille sur mon bas ventre et de l’index j’en esquisse les contours. Je ne peux retenir les larmes qui dévalent lentement sur mes joues, ces perles salées qui s’échouent à mes pieds, comme à chaque fois que j’y repense.

Alicia et Amour ne font vraiment pas bon ménage…

En essayant de faire abstraction de la douleur que je ressens, je me glisse dans l’eau chaude et arpente les souvenirs de mon passé. Les bons moments, comme les mauvais, mais très vite, je me sens partir. Loin dans mes divagations, je lâche prise et laisse la mélancolie m’envahir. Je suis tellement déçue, de moi-même et de ce que j’étais…

Les trois cent soixante-deux coups qui cognent contre la porte de ma chambre me font revenir à la réalité. Perdu dans les méandres de ce qu’était ma vie, je n’ai pas vu le temps passer et le room service est déjà arrivé. Je sors de l’eau en quatrième vitesse, enfile un peignoir et cours ouvrir en essayant de ne pas tomber.

Malgré mon état psychologique, l’odeur des mignardises me met fait saliver. Je range dans un coin de ma chambre les valises qui trainaient toujours sur mon lit puis retourne dans la salle de bain pour enfiler ma chemise de nuit.

Alizée arrive à son tour :

— Oh ! ça sent bon ici ! Tu es où ? Punaise ! Ta chambre est super grande !

— Je suis une star tu oublies ? dis-je en rigolant avant d’ajouter : installe-toi, j’enfile mon pyjama et j’arrive ! je crie à travers la salle de bain.

Lorsque je reviens dans la chambre, je suis étonnée de voir ma sœur en tenue de nuit, assise en tailleur sur le lit, une coupe de champagne et un magasine de mode en main. Cela fait des années que je ne l’ai pas vu aussi détendu et je dois bien avouer que cela me ravit.

Lorsque je la regarde, à ce moment même, je me dis qu’ensemble, nous avons enfreint tellement de règles ! Peut-être qu’on aurait passé de bons moments en compagnie l’une de l’autre durant notre enfance… Le fait est qu’elle est super stricte et réservée, alors que moi, je suis ouverte à tout est la pudeur ne fait pas partis de mon vocabulaire.

Je suis le jour, elle est la nuit.

Je suis le Yin, elle est le Yang.

Pourtant, là, tout de suite, je me sens bien, je suis sereine et j’espère de toutes mes forces qu’elle est moi, on puisse construise une nouvelle relation, sans préjugé, juste de l’amitié. Comme de vraie sœur…

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