4 - Bruno - Mercredi Midi

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Une petite visite à Dupond & Dupont s’impose. Autant "battre le fer tant qu’il est chaud" dit-on. Et puisqu’il ignore ma présence sur le marché ou sur les pas de Chloé, allons-lui signaler tout « gentiment » ma présence afin qu’il puisse prendre sa retraite. Ou se mettre en retrait…

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Je vous fais grâce des détails de l’entretien. Ils ne font pas honneur à mon amabilité professionnelle et à mon sens développé de la conversation…

Par contre, je peux dire que bavard, il l’a été ! Au début, il s'est montré un peu réticent à se dévoiler. J’ai dû insister un peu, voire fortement, sur mes demandes, mais dès qu'il eût compris que je ne céderais en rien, il fut assez prolixe…

Et me voilà maintenant avec un peu plus de mystères autour de Miss Chloé l’Irlandaise. Qui n’en est pas une au vu du duplicata de son passeport ; copie que j’ai reçue de la Company la nuit passée. Elle est bien française. C’est une manselle ; très exactement originaire d'un petit village à côté du Mans.

Ce Dupond & Dupont – Armand de son petit nom – a reçu instruction d’un certain Ferraille de la suivre et de faire rapport de ses contacts. Il n’a pas su cacher que cette mission faisait partie de tout un dossier ; une quinzaine de personnes sur toute cette dernière décennie ont fait l’objet de ce type de demande. Toutes travaillaient pour la société Vancelor.

Il a bien essayé de nier l’existence de copies des dossiers. Toutefois je n’ai pas dû insister fortement pour qu’il avoue une certaine négligence dans la remise complète des éléments trouvés à son employeur…

Voilà pourquoi j’en suis aujourd’hui l’ultime dépositaire. Je lui ai promis d’en faire bon usage. Il n’a pas su me remercier comme le voudrait l’usage. Il venait juste de tomber de sa chaise et dans les pommes par la même occasion. Une petite nature…

Par contre sur ce Ferraille qui l'avait commandité, il n’a rien su me dire. Tout se passait par courrier et il n’a pas voulu en savoir plus m’a-t-il dit. J’ai des doutes… On en reparlera si nécessaire plus tard.

Mais comme j’ai les copies des dossiers en ma possession, c’est un moindre mal. J'ai l'essentiel pour comprendre me semble t-il.

Je profite de son évanouissement pour quitter les lieux, me disant gagner ainsi un peu de tranquillité et de temps pour m’éclipser.

En reprenant la route, tout guilleret de cette rencontre, je manque ne pas apercevoir ce SUV Peugeot noir effectuant une manœuvre osée pour me suivre. Car je le suis maintenant, suivi !

Après une dizaine de manœuvres et de minutes, j’ai bien la confirmation qu’il y a au moins deux véhicules derrière moi…

Il me faut agir et vite.

Deux sens interdits pris à contre-sens plus loin, et me voilà débarrassé de mes suiveurs. Mon idée de prendre un scooter ce matin tenait du génie !

En observation près de mon véhicule, abandonné à proximité d’une bouche de métro, je vois arriver mes poursuivants dans les minutes qui suivent. Ils avaient donc piégé ou plutôt géolocalisé la moto. Cette efficacité indiquerait-elle des professionnels ? De piètre qualité en tous cas, car s’ils ont mis un mouchard sur le Kymco, pourquoi me coller au train de manière si visible ? Bizarre…

Le nom et l’adresse donnée à la location du véhicule étant fausse, je ne risque rien ; sauf une identité perdue… Quant à mes empreintes, je pense avoir été prudent et compte sur mon expérience en la matière pour éviter ce risque d’identification…

Il ne me reste plus qu’à me fondre dans la foule, me mettre à l’abri des trop nombreuses caméras de sécurité. Faire disparaître le casque, le blouson et revêtir un manteau et une écharpe en échange a été un jeu d’enfant dans un grand magasin proche.

Je sors de cette enseigne avec, sur le nez, des lunettes comme en portaient nos aînés dans les années soixante ; elles me mangent littéralement le visage.

Je regagne, pareillement équipé, mon studio tout en rasant les murs.

Sur place et sans tarder, je vérifie la collecte d’info.

Quatorze dossiers de peu à fort compromettant… Mais pour quel usage ? Qui était Ferraille ?

Par qui étais-je suivi et depuis quand ? Un seul début de réponse : c’est en suivant Armand que je me suis démasqué à leurs yeux. À moins qu’en suivant Chloé ?

Dans tous les cas, mes poursuivants sont équipés et nombreux : danger ! J’ai bien le soupçon d’équipes officielles mais alors, cela ne ferait qu’assombrir la problématique ! Pourquoi ?

Un rapport à la Company me semble nécessaire ! Une fois celui-ci envoyé, je pense aussi à me nourrir et surtout à entretenir mon assurance-vie ; celle que je porte à la cheville.

J’en profite pour vérifier le chargement complet des deux chargeurs. Comme je l’ai déjà pensé, pour un nid de guêpes, c’est une arme suffisante… Mais si je marche dans un nid de frelons, j’aurai intérêt à courir vite et loin !

Sur ces pensées positives, allons dormir…

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Le lendemain matin ressemble à la veille. Étirements, repas de campagne et ordre du jour.

J’ai une réponse de la Company. Le Patron est furieux ! Injonction d’attendre sur place un contact.

En attendant, je fais un peu de ménage et j’en suis aux derniers détails lorsque l’on frappe à ma porte.

Je l’entrebâille tout en la bloquant avec un meuble. Pas question de se faire surprendre. La prudence est mère de le sécurité, dit-on.

La jolie nymphette de l’aéroport me sourit depuis le palier. C’est avec un empressement plus que certain que je lui ouvre la porte. Elle rentre, retire son manteau et apparaît en uniforme de …Police !

Je prends mon temps pour fermer le battant tout en évaluant la situation et sa tenue. Elle me tend une feuille sur laquelle mon faciès prend toute la place. Je suis recherché pour meurtre et signalé comme armé. Dangereux.

Je ne peux m’empêcher de me justifier.

— Tout est faux.

— Ce n’est pas mon problème. Les gens de la Sûreté courent après toi, me répond-t-elle d’un ton impersonnel.

Voilà la confirmation que ce ne sont pas des guêpes mais des frelons qui me tournent autour…

— Je n’ai tué personne.

— Ce n’est pas mon problème, t’ai-je dit. Les ordres sont d’attendre que l’orage passe, ajoute-t-elle en se rhabillant et en enfouissant mon avis de recherche au fond de sa poche.

Elle sort sur ces mots, sans attendre la moindre réaction de ma part. Incroyable. J’ai l’impression de parler dans le vide. Il ne me reste plus qu'à refermer cette porte sur ma solitude.

Huit heures viennent à sonner au carillon du clocher proche. Je décide de rendre une petite visite à cette Chloé. « La meilleure défense, c’est l’attaque ! », selon le Petit Caporal corse. Il me semble avoir lu cela quelque part.

Bref, ce n’est pas en s’enterrant dans ce studio que je pourrai exécuter ma mission. Je décide de me rendre au garage où devrait m’attendre la voiture prévue pour cette mission.

Mais une silhouette se découpe sur le crépi blanc du mur. Mon joli contact, dont j’ignore toujours le prénom, est là, un léger sourire aux lèvres.

— On m’a dit d’attendre ici, car tu allais venir rapidement. On y va ? dit-elle tout en se décollant du mur.

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