Magies

8 minutes de lecture

PL : 4

Affinité Adeline et Elisa : 7/10 - 4/10

"Je me demande ce que père est en train de faire avec la magie trouvée dans les gâteaux. Nous n'avons plus que le résultat à présent, nous ne pouvons accuser le duc et la duchesse de droguer leurs invités. C'est bien pour ça que je dois retourner au manoir."

Assise à mon écritoire, je laissai mes pensées vagabonder, le briquet en main sous la lumière du jour. Je savais qu'Adeline était mécontente de mon état et qu'elle le reprochait beaucoup à mon demi-frère. De surcroît, je n'étais même pas allée voir Elisa depuis mon escapade hier, ce n'était pas du tout raisonnable. J'étais mal à l'aise avec moi-même. En sortant de la salle d'escrime, nous avions croisé Hector et Blanche qui n'avaient pas manqué me lancer un regard de mépris au passage, ainsi qu'une pique cinglante :

"Mauvais sang, mauvais corps ! Toujours à la traîne, Sahara ?"

Je n'avais même pas relevé. Ils ne méritaient pas une once de mon énergie. Toutefois, j'avais besoin d'éclaircir les choses, et Louis détenait les informations dont j'avais besoin. Je tournai une fois de plus le briquet dans ma main, l'ouvrant et l'allumant, l'éteignant, l'allumant encore. Il m'hypnotisait. J'étais à ce point perdue dans mes pensées que je ne remarquai pas, à cause de la lueur du jour, sa lumière apparaître et teindre ma main d'or.

"Bon ! Il est temps d'aller voir Louis", me levai-je brusquement. Lorsque j'ouvris la porte, je tombai sur Elisa. Elle avait une mine chagrine.

"Princesse, s'inclina-t-elle, et je perçus dans ce mouvement l'unique force de l'habitude et non la déférence amicale qu'elle me portait d'ordinaire.

"E-Elisa... Je... (je laissai un vide, ne sachant comment m'exprimer)

- Princesse, désirez-vous quelque chose ?" Le ton, plat, me fit beaucoup de peine.

"Non, je... dois aller voir Louis." Cela m'avait échappé. J'avais beaucoup de mal à lui parler et puis, à cet instant venait d'apparaître une jeune femme élancée que je n'avais encore jamais vu. Elle ne me regarda que brièvement. Elle était très belle et sa robe, d'un bleu pervenche nuancé de mauve, laissait rêveur. Elle continua son chemin et disparut. Elisa ne m'aida pas à sa reconnaissance, aussi soupirai-je, comprenant que je l'avais bien mérité, et la quittai là, amère.

J'avais appris dans quels quartiers il se trouvait, aussi m'y dirigeai-je plus ou moins bien. Enfin, je le trouvai dans un grand salon confortable. Edouard était avec lui, ils discutaient avec animation, en bons termes semblait-il. Toutefois, à mon approche, celui qu'on appelait "traître" (et qui pourtant n'avait rien dit de nos manigances au duc et à la duchesse du Pinson), se releva et salua mon frère - je n'arrivais pas à considérer Edouard comme un frère, d'ailleurs comme le reste des membres de la famille royale - me dépassant en me lançant un unique regard colérique. Mais que lui avais-je fait, bon sang ? Etait-ce à cause du succès de ma mission ? Voyait-il d'un mauvais oeil la possibilité qu'on retire la précieuse liqueur du marché ? Sans doute. Je vins m'asseoir en face de Louis, navrée.

"Bonjour ma princesse, me salua-t-il doucement.

- Oh, que me vaut cette expression ? le taquinai-je.

- De la tendresse, ma chère soeur. Je suppose que tu es venue me voir pour savoir ce que Célébi et moi avons découvert."

Je hochai la tête, très concentrée.

"Bien, comme promis, voici ce qu'il s'est passé : Célébi a découvert de la magie de lune en toi. Il peut te l'enlever, mais il y avait un très haut risque de mortalité... je m'y suis donc opposé. Comme il y a aussi de la magie de lune dans les gâteaux que tu as ramenés, et à la suite de l'apparition d'hier soir, très... "lunaire", je pense que tout ces éléments sonst liés.

- L'apparition..., murmurai-je. Moi aussi, j'ai des choses à raconter.

- Oui, je me doute."

Je lui détaillai la rencontre, soulagée d'enfin pouvoir partager mon fardeau. Je n'en pouvais plus, au moins pouvait-il m'aider, car il était le seul à complètement me supporter, ici.

Plus mon récit avançait, plus Louis était plongé dans une sinistre réflexion. Indubitablement pour lui la créature était un démon de lune, dévoreur d'humains. Devait-il m'en faire part ? Cela n'allait-il pas augmenter mon angoisse ? Une terrible vérité faisait jour en son esprit et il eu soudain peur. Peur pour moi.

"Sahara, finit-il par lâcher à la fin de mon récit.

- Oui ?

- Tu... as bien fait d'accepter son aide. Tu aurais refusé ou tu aurais fui sans répondre, elle aurait trouvé un moyen coercitif pour t'obliger. Elle t'aurait même menacée en utilisant peut-être une personne qui t'est chère. Je connais bien... ah (il soupira) enfin, tu es sauve, et je serai avec toi lors de la fête au manoir. Ne parle de cela à personne, d'accord ?

- Oui. Qui est cette personne, selon toi ?

- Hmm... un magicien de lune, me répondit-il, mentant à moitié. Il ne voulait pas me faire peur et ajouta : Tu n'as pas pu reconnaître, ou voir ton contractant ?

- Non...

- Ce n'est pas très grave. Je pense avoir un moyen pour le ou la reconnaître au manoir, car il est presque évident que cette personne y sera. Et si ce que je pense s'avère juste... tu as besoin de t'entraîner.

- M'entraîner ?! (Je pâlis, songeant immédiatement à ma séance d'escrime ratée.)

- Pas de cette façon-là, rit-il enfin, non, en magie. Tu as besoin de renforcer la magie de lune qui est en toi.

- D'accord, mais... la magie n'est-elle pas mal vue ?

- Je vais demander à père de t'accorder deux heures par jour avec moi pour l'entraînement à l'équitation et la chasse. Nous irons chez Célébi. C'est le meilleur moyen pour que ce contractant ne te trahisse pas, d'une façon ou d'une autre.

- D'accord... oh ! J'ai quelque chose à te montrer." Je sortis le briquet de mon manteau et le lui tendis. Intrigué, il me demanda sa provenance que j'avouai, confuse. Il se mordit la lèvre.

"Voilà qui va compliquer les choses. Ce briquet... est magique, je le sens, à force de cotôyer ce monde. Ils doivent savoir que quelqu'un le leur a volé. Il faudra être très discret... y a-t-il eu quelque chose de bizarre avec ?

- Eh bien... hum, oui, il s'est allumé, hier, à la nuit. C'était une très forte lumière.

- Hmm, je vois. Il s'allume en présence de magie. Ce doit être... un allumeur éternel, ou quelque chose comme ça. Bien sûr, il a réagi à ta magie de lune, Sahara. Quelque part, finalement, c'est bon signe. Cela veut dire qu'elle est déjà forte. (Il me rendit le briquet.) Je vais aller voir père, maintenant, pour que nous puissions avoir ces deux heures. Dissimule bien l'objet.

- Merci, Louis."

Passant une main sur mes cheveux, il me gratifia d'un doux sourire, puis s'en alla. Je retournai vers mes quartiers et vis Adeline, la prenant aussitôt à part.

"Adeline, j'ai une question très importante.

- Bien sûr." Elle était tout ouïe, ce qui me rassura. Au moins n'avais-je pas perdu son attention.

"Votre mère Odiane, est-elle capable d'enlever la magie de quelqu'un ?"

Ma gouvernante ouvrit de grands yeux surpris.

"Non ! Bien sûr que non. Oh, c'est vrai, vous avez oublié beaucoup de choses. La magie naturelle ne peut faire cela. C'est impossible. Seuls les démons sont en vérité doués d'une telle puissance... (elle avait baissé le ton au mot démon) mais ils ne viennent heureusement pas souvent chez les mortels.

À cette précision, mon sang s'était glacé. Je poursuivis, tremblante :

"Quelle... quelle type de magie existe donc ?

- Parmi les humains ?

- Et les démons."

Je voyais bien qu'Adeline était intriguée par mes questions en même temps qu'effrayée. Je n'étais plus moi-même, je réussissais là où les autres avaient échoué, je ne me rappelai de rien, étais-je vraiment humaine encore ?

"Eh bien, il y a deux grandes catégories : la magie naturelle, que ma mère pratique, et la magie démoniaque. Il y a plusieurs types de magies naturelles ; celles des plantes - ma mère la maîtrise très bien -, celle des sables ou encore celle de pierres. Il y en a d'autres, mais je ne les connais pas toutes. Parmi les magies démoniaques, nous les humains connaissons surtout celle de lune et la magie temporelle. La magie de lune est excercée par des démons de lune, dévoreur d'humains...

- Quoi ?! mais alors, dans les gâteaux...

- Eh bien, je ne pense pas que le duc et la duchesse soient des démons, mais... ils ont certainement des affaires louches ! me confia-t-elle, voix basse. Ensuite, continua-t-elle, les démons temporels maîtrisant, donc, la magie temporelle, forment des contrats de vie avec leurs humains, réalisant leur souhait en échange d'un nombre plus ou moins important d'années à vivre.

- Et... les démons de lune... forment-ils des contrats ? posai-je, songeant à l'apparition lunaire de la veille, avec effroi.

- Rarement. En général, ils mangent les humains. Oh et, on dit que le souvenir des êtres mangés disparaît pour toujours de l'esprit de ceux qui les connaissaient, mais ce n'est qu'une légende que l'on n'a jamais pu vérifier, puisque... personne ne se rappelle avoir perdu un être mangé par un démon de lune... Enfin, je ne suis pas la mieux placée pour parler de tout cela. Vous ne devriez pas vous mettre ces idées en tête, surtout après tout ce qu'il s'est passé. Non, ce n'est pas une bonne idée.

- Oui, vous avez raison. Merci pour ces précisions, Adeline. Je mangerai bien quelque chose, maintenant, j'ai très faim...

- En effet, souhaitez-vous manger dans votre chambre, ou à l'extérieur ?

- A l'extérieur me ferait beaucoup de bien, là où j'aime aller, ce serait parfait."

Je réfléchissais profondément. Célébi ne pouvait donc être un manipulateur de magie naturelle, s'il avait eu l'option de m'enlever ma magie. Alors... un démon ! C'était la seule option ! Je ne pensais pas qu'il s'agissait d'un démon de lune, non, pas après la réaction de Louis à ce sujet. Mais comment, moi, pouvais-je avoir de la magie de lune alors que j'étais humaine ? Avais-je formé un contrat avec un démon ? Une apparition lunaire, des menaces, et Louis qui me mentait... On ne pouvait être magicien de lune ! Moi aussi je commençais à percevoir quelque chose de véritablement sinistre là-dedans. Otthild Franchène me revint en esprit. Etais-je la seule à me le rappeler ?

Etourdie par toutes ces interrogations et sans vraiment y songer, je me retrouvai à mon espace "secret" préféré, à la véranda de pierre rose et au petit banc rond. Grand choc : une personne y était déjà assise. La jeune femme inconnue de ce matin.

A. Bonjour, dis-je, allant droit sur elle de façon assurée, ne montrant en aucun cas que je ne me souvenais pas de son prénom, ni qui elle était pour moi (une soeur ?)

B. Je la laissai se présenter en premier, allant m'asseoir au bord de la fontaine.

C. Je fis demi-tour pour éviter toute confrontation, préférant me trouver un autre endroit pour manger. J'étais trop fatiguée par tous les événements pour faire face à quelqu'un d'autre !

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