À ton service, maîtresse

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[Elle est amoureuse, puisqu'elle cherche à faire revenir son amant, qui s'est détourné d'elle]

Les préparatifs, le mariage, ton mariage et ma souffrance. Celle qui me consume de l’intérieur, celle qui nourrit la Canidia et sa noirceur. La violente dès que la nuit tombe.

Mais la journée, je suis la petite esclave docile, celle que tu connais :

Petite, brune, souriante, aux cheveux bien coiffés et à la robe de laine bien tissée. La bonne esclave à son maître.

Je ne dois rien laisser paraître, même si l’envie de la tuer immédiatement me ronge les tripes.

Elle :

La belle rousse, grande aux cheveux si longs que son chignon est juste parfait. Elle n’a aucun défaut, elle est discrète, garde toujours les yeux au sol devant tes parents et ta famille et elle est grande, plus grande que moi… Luccia, fille du très illustre sénateur et orateur : Flavius Lulii, promis à un grand avenir. Donc ce mariage arrange bien tes parents, tu vas gravir les échelons de cette société.

Tu m’as oublié pour elle, pour ses beaux yeux, pour sa fortune, mais tu vas finir par l’oublier. Tu reviendras vers moi, Salone, car cette femme te rendra malheureuse. Elle est bien sous toutes les apparences, mais toute pourrie à l’intérieur, comme un mauvais fruit.

Alors, j’attends, j’attends le moment opportun.

***

Tout sourire, à une semaine de la cérémonie, je me rends dans la chambre de ma meilleure ennemie. Je porte le plateau, transportant les produits de beauté. L’embellir, pour la rendre belle, pour toi ; pour que tu l’aimes et la chérisses toute ta vie. Mais non, elle fanera plus vite que moi, tu vas t’en rendre compte bien assez vite.

Avec Aya, je mets au point une mixture, que j’intégrerai dans la sapo[1], son soin corporel, et au fil des semaines, elle vieillira : sa peau se flétrira et elle aura des taches brunes.

Je frappe. J’attends sa probation et j’entre. Elle est encore en chemise de nuit. Elle me sourit et va s’asseoir devant sa coiffeuse :

Bonjour, madame. Dis-je les yeux baissés sur mon plateau.

Bérénice. Me répond-t-elle en s’observant dans le miroir.

C’est donc le signe que je dois m’affairer à la rendre belle. Je dénoue les ficelles, pour faire glisser sa chemise. Elle se retrouve nue face à moi : sa peau est claire comme du lait. Je mouille un linge, le savonne et lui passe sous les aisselles, dans le dos, sur sa poitrine. Je la rince. Puis, elle se redresse et je continue sa toilette sommaire sur ses attributs féminins. Enfin, je lui enfile sa robe : sa stola et lui ceint la taille avec une ceinture couleur pourpre. Elle s’assoit de nouveau et maintenant, je m’affaire sur la coiffure. Je brosse ses longs cheveux orange et lui fais un chignon de style hellénistique, très à la mode. Je maquille légèrement ses yeux et lui applique un peu de fard.

Madame est prête à descendre maintenant.

Elle se regarde dans le miroir et sans rien me dire, elle sort de sa chambre. Je range les produits, rince mon linge, ramasse la chemise de nuit, nettoie la chambre sommairement tout en observant bien les objets qui s’y trouvent.

Et enfin, une fois ma tâche terminée, je sors de la pièce. Je vais rejoindre mes semblables dans la cuisine, où Aya avec une autre esclave s’affaire à la préparation du repas. Ce soir, il y aura un banquet pour célébrer les fiançailles. Nous avons beaucoup de travail.

Pour ma part, je m’attèle à la préparation de l’atrium : je dois placer correctement les lits de tables : réservés aux hommes, aux patriarches. Puis les tables qui vont servir à poser les plats. Je pose correctement les tissus lorsque j’entends :

Bonjour, petite Bérénice.

Cette voix, si douce, si sensuelle. Immédiatement, mon ventre se tord, mon cœur se met à battre vite, bien trop vite et une douce chaleur m’envahit. Je me sens rougir, mais je dois faire semblant…

[1] Sapo : savon antique d’origine gauloise, c’était une pâte savonneuse destinée à éclaircir la peau et les cheveux. Elle était composée de graisse de chèvre et de cendres de hêtre.

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