Basile : la vraie peur

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Je suis assis à attendre mon tour. La  directrice de casting, une dame plus toute jeune à chignon, a l'air, genre, super sévère. Et on est vachement nombreux à y passer aujourd'hui.

D’après ce que je constate, elle s’occupe de faire passer les auditions toute seul. Je suis assez surpris puisque d’habitude ces « juges » sont plusieurs. En tout cas, je n’ai jamais auditionné sans minimum deux interlocuteurs.

Les passages s’enchaînent, et tous ceux qui ressortent de l’entretien n’arborent pas une mine ravie, preuve que ça n’a pas du très bien marcher pour eux. Ca peut vouloir dire deux choses : soit ils sont tous mauvais, soit madame est vraiment super exigeante. J’espère que c’est la première option. Mais surtout, vu les têtes toutes déçus qui défilent, je suis pratiquement sûr qu’elle vous balance tout de suite si vous êtes pris ou pas. Pas de fameux « on vous écrira » cette fois-ci.

Au moin je poireauterais pas des semaines pour apprendre mon échec.

C'est mon tour. La dame m’indique de la suivre. Je me retrouve donc assis en face d’elle dans son bureau somme toute très coquet bien qu’un peut étroit. Elle se présente et ne perd pas de temps : elle me demande directement de jouer l’effroi.

Pour ce faire, je me remémore tout de suite la fois où j'ai eu la plus grosse frousse de ma vie ; le soir ou Willy a compris qu'Antoine nous avait royalement entubé.

Il était étrangement calme cette nuit-là, et même carrément livide. Le Willy que je connaissais aurait pourtant explosé d'une de ses fameuses rages bien à lui. Mais là, rien. Je lui parlais pourtant, mais il ne répondait pas, je suis même pratiquement sûr qu'il n'entendait rien.

Puis au bout d'une vingtaine de minutes, il lâcha:

  • 'Ai b'soin d'prendre l'air.

Il sortit dans la rue recouverte par le manteau de la nuit. Je le suivis. Il alluma une cigarette, je fis de même.

Le silence était le roi en cette soirée.

C'est à ce moment là qu'un type, qui n' avait rien demandé à personne, passa près de nous, rentrant probablement chez lui ou que sais-je.

Willy attrapa le gars, l'envoya avec une effrayante facilité par terre et le cogna de toute ses forces, et il était costaud le William.

Je l'avais déjà vu coller des branlés, mais jamais comme ça. Cette fois-ci, la victime ne lui avait rien fait, pas un mot de travers, pas une œillade mauvaise, rien.

Et le regard qu'il avait ... Ce n'était plus Willy le teigneux, mais Willy le barge, Willy le fou...

Willy le psychopathe.

Le pauvre homme tenta bien de se défendre, en vain.

Je n'ai rien pu faire, la pétoche m'avait saisi et paralysé. J'avais trop peur que William me fasse la même chose si je tentais de m'interposer.

Ouais, j'étais persuadé que cette colère noire pouvait être redirigée vers n'importe qui, même son vieux pote.

C'est finalement des résidents de l'immeuble, prévenus par le bruit, qui parvinrent, non sans mal, à les séparer.

Le gars qui avait reçu la rage de William était foutrement mal en point. À un pouce d'y passer je dirais. Une ambulance fut appelée, j'appris plus tard qu'il s'en était tiré de justesse. La vie ne serait certainement plus la même pour ce pauvre gars.

Mais le William lui, il prit cinq ans pour coups et blessures.

Je revois le regard qu'il avait ce soir là, et j'ai peur exactement comme quand c'est arrivé. La directrice le voit bien, et elle me lance un:

«Brillant, on a vraiment l'impression que vous avez vu un monstre»

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