Chapitre 6

21 minutes de lecture

~ POINT DE VUE NICOLE ~

Lorsque je sors de la chambre, John est en train de préparer le repas.

— Tu veux que je t’aide ? lui demandais-je.

— Non, c’est bon. Va t’asseoir.

— Je te préviens, je ne vais pas passer les prochains mois assise ou allongée. J’ai besoin de bouger.

— Le médecin a dit que tu devais te reposer et je n’ai vraiment pas envie qu’il t’arrive quelque chose.

— Vous avez discuté de quoi, avec mon père ? demandais-je en changeant de sujet.

Il se stoppe dans sa préparation et se retourne vers moi, hésitant.

— J’ai peur que tout recommence. J’ai peur que tu t’éloignes pour de bon, parce que je ne suis pas à la hauteur et pas assez présent.

— Je comprends parfaitement ta position, mais tu n’as pas à t’en faire. J’ai conscience des efforts que tu fais pour nous. Je sais aussi que c’est très difficile pour toi, mais pour rien au monde, je ne m’éloignerais de toi. J’ai trop besoin de toi et on avait dit que plus rien ne nous séparerait, tu te souviens ?

— Oui, mais...

— Il n’y a pas de « mais » qui tienne, on l’avait dit ou pas ?

— Oui, on l’avait dit.

Il me regarde et sourit. Je m’approche de lui pour l’embrasser, mais il parait encore nerveux.

— Qu’est-ce qu’il y a ?

— Rien.

— Tu fuis.

— Ce n’est pas la question. C’est juste qu’avec le bébé...

— Non, pas le bébé, il y en a deux.

— Justement, tu crois que c’est une bonne idée ?

Au fur et à mesure que j’avance vers lui, il recule en tournant autour de la table. Il semble réfléchir à sa question.

— Ils font la taille d’un petit pois, ils ne ressentent rien. Mais… si tu ne t’en sens pas capable …

Vous allez dire que c’est de la provocation mais j’adore le chercher.

— Je me sens parfaitement capable de faire ce que j’ai à faire avec toi, mais j’ai promis.

— Ah, et tu as promis quoi ?

— D’être sage avec toi tant que la situation ne se serait pas calmée.

Je le regarde dans les yeux et lui réponds.

— Tu es le pire menteur qu’il soit sur cette terre.

— Comment tu sais que je te baratine ?

— Déjà parce que tu viens de te balancer et parce que tu as un regard qui veut tout dire.

— Et qu’est-ce qu’ils ont, mes yeux ?

— Tes yeux sont magnifiques … mais ils trahissent les …

Il ne me laisse pas finir ma phrase et m’embrasse à pleine bouche. Il ne lui a pas fallu longtemps pour se laisser aller.

Une heure plus tard, le téléphone de John sonne. Il le récupère dans une de ses poches de pantalon.

~ POINT DE VUE JOHN ~

— Oui, allô.

— Ça va, tu t’es bien amusé, joli cœur.

— Qu’est-ce que tu veux ? demandais-je en me retournant vers Nicole.

— On a besoin de toi. Nous avons en notre possession un petit quelque chose qui devrait t’intéresser.

— Ça ne peut pas attendre demain comme prévu ?

— J’ai envie que tu viennes me montrer comment tu fais les choses que je viens de voir.

— Va te faire voir.

— Comme tu veux, mais je ne crois pas que ta sœur dirait la même chose.

— Quoi, ma sœur ?

— Tu connais les conditions, joli cœur.

Ok, elle commence à me les briser celle-là.

— J’arrive.

Je raccroche et je parle en langage des signes à Nicole. Vu sa tête, elle a compris qu’il y avait un problème.

Je la laisse se préparer pendant que j’appelle Mark.

Je prends le sac de Nicole, ferme la porte d’entrée à clef. Nous montons dans la voiture et j’ engage de nouveau la conversation.

— Ils nous surveillent.

— Qu’est-ce qui te fait croire ça ?

— Quand je l’ai vu la dernière fois, il m’a fait comprendre qu’il suivait mes moindres faits et gestes.

— Peut-être qu’il joue avec toi.

— Il y arrive parfaitement.

— Attends une minute … ça veut dire qu’ils viennent de nous voir prendre notre pied ?

— Euh, oui…

— Et bah, j’espère qu’il a pris des notes, lui dis-je en rigolant.

La situation semble l’amuser. Moi ça ne me fait pas rigoler. Va falloir la jouer fine.

— Et là, tu nous emmènes où ?

— Ton père nous attend près du magasin d’Erika. Il va te mettre à l’abri jusqu’à ce que j’ai réussi à tasser cette affaire.

Deux minutes plus tard, je m’arrête devant le magasin et fais un appel de phare pour indiquer à Mark que nous sommes là. Il me répond en me lançant également des appels de phare.

— Allez viens, on y va.

Nous sortons de la voiture, je lui donne son sac et je l’accompagne jusqu’à la voiture avec ma main gauche positionnée sur son arme.

— Aucun souci ? Interroge Mark.

— Aucun.

J’ouvre la portière arrière gauche de la voiture.

— Je voudrais que tu fasses attention à toi et que tu ne fasses rien de tordu. OK ?

— Promis.

J’embrasse Nicole et la fais entrer dans la voiture.

— Tu me donnes des nouvelles, me dit Mark.

— Dès que je peux.

Il met le moteur en route et ils partent. Les regarder partir comme ça me fait me sentir étrange. J’ai un mauvais pressentiment.

~ POINT DE VUE NICOLE ~

— J’ai besoin de travailler sur l’ordinateur, dis-je.

— Il vaut mieux éviter d’utiliser ce genre d’engins. Nicole, une planque c’est comme une cavale, faut rester discret.

— Papa, ils ont placé des caméras chez moi et...

— Stéph sait se servir d’un ordinateur ?

— Oui, mais...

— Qu’est-ce que tu comptais en faire, de ces vidéos ?

— Retrouver l’adresse IP de l’utilisateur et remonter jusqu’à lui.

— Il sait faire ce genre de truc ?

— C’est lui qui m’a formée.

— Je lui en parlerai demain matin et il s’en occupera.

— Je ne veux pas qu’il le fasse.

— Pourquoi ?

Je regarde mon père. Faut-il vraiment que je réponde à sa question ? Lequel de nous deux sera le plus gêné ?

— Parce qu’il va regarder la vidéo.

— Y’a quoi de honteux sur cette vidéo ?

— Je ne veux pas qu’il s’en occupe, c’est clair ?

— Mais poussin, est-ce qu’il peut trouver cette adresse sans visionner les vidéos ?

— Oui, mais il va regarder. Je le connais, il va regarder pour chercher des indices.

— Faudrait savoir ce que tu veux alors.

— Je veux avoir accès à un ordinateur et faire le boulot moi-même.

— Je t’ai déjà dit que ce n’était pas possible étant donné que tu es dans une planque.

Quelques instants après, il se gare dans une allée et arrête la voiture.

— C’est ici, ta planque ?

— Ouais. Ton frère et sa petite famille y sont déjà.

— Oh, génial.

De violents maux de ventre me percutent de plein fouet.

— Ça va ?

— J’ai … aaaaaaaah …. mal au ventre.

— Bon, viens t’allonger un peu.

Il m’aide à entrer dans la villa et m’allonge dans la première chambre qu’il trouve.

~ POINT DE VUE MARK ~

— Qu’est-ce qui se passe ? demande David.

— Elle doit être fatiguée, nerveuse avec tout ce qui se passe, lui répond Erika.

— Tu crois que je devrais faire venir le médecin ?

— Elle serait rassurée et nous aussi, me répond Erika.

Je prends mon téléphone et appelle directement le docteur Cruz. C’est le seul en qui j’ai confiance et je connais ma fille, elle n’écoutera que lui.

~ POINT DE VUE JOHN ~

Je suis enfin arrivé à la planque de Chris. Fin’ si on peut appeler ça une planque. C’est vrai que c’est un peu isolé mais bon … y ‘a quand même du passage. Je me suis installé avec les autres et j’attends que Chris et Eva se décident à parler.

— Vous vouliez que je vienne maintenant pour qu’on se regarde dans le blanc des yeux ?

Je dévisage Chris en espérant qu’il me réponde mais non … il a décidé de ne pas parler.

— Où est ma sœur ?

— Pour l’instant, elle va bien.

Ah, il a retrouvé l’usage de la parole.

— Je veux la voir.

— Je crois que tu n’as pas très bien compris les règles du jeu.

— Ah, tu crois que c’est un jeu ? Soit je vois ma sœur, soit vous vous démerdez pour vos projets.

Chris regarde Eva qui comme à son habitude est en train de se goinfrer de gâteau.

— Elle est dans la cave. Tu as cinq minutes.

Sans même prendre le temps de le remercier je descends à la cave. Il me tarde de voir ma sœur pour savoir comment elle va. S’il a osé la toucher je lui ferai mordre la poussière à cet enfoiré. J’ouvre la porte et allume la lumière. Quelques secondes après, j’arrive devant une nouvelle porte. Purée mais il y a combien de porte ? Je l’ouvre et entre.

— Marie ?

Je vois des cartons bouger et ma sœur sortir de sa cachette. Nous nous serrons dans les bras l’un de l’autre.

— Tu vas bien ?

— Moi ça va, mais la mère de Nicole, pas tellement.

— Qu’est-ce qu’elle a ?

— Elle ne me parle pas, alors pour savoir ce qu’elle a, c’est difficile parce que je n’ose pas la toucher. Tout ce que je peux te dire, c’est qu’elle est fatiguée, essoufflée.

Marie m’emmène à l’endroit où était installée la mère de Nicole et je m’agenouille à côté d’elle.

— Mélissa, vous m’entendez ?

Elle ne me répond pas tout de suite. Elle lève les yeux vers moi avec un regard effrayé.

Qu’est-ce qu’ils lui ont fait subir ? La connaissant, elle n’a pas dû se laisser faire. On dirait qu’elle a été droguée et qu’elle en subi encore les effets. Je pars à la recherche de traces de piqûre sur ses bras et en relevant sa manche, j’ai la confirmation de ce que j’avance. Putain !!!!! Si j’informe Mark que sa femme est mal en point, il va se mettre dans une colère …

— Ils surveillent ton téléphone, me dit Marie.

Je reviens à moi quand je sens la main de ma sœur sur mon épaule.

— Quoi ?

— Ton téléphone … démonte-le et tu verras par toi-même.

Je sors le téléphone de ma poche et enlève la batterie. Marie a raison. Je retire le micro et l’écrase avec mon pied par terre. Putain, ils nous écoutent aussi depuis le début !!!

— Tu ferais un bon flic.

— Merci, mais je préfère mon boulot.

— Prends soin d’elle ou Nicole me tuera.

Je souris à ma sœur et sors de la cave. Je reviens dans la pièce principale où les autres m’attendent.

— Ça fait plus de cinq minutes, lance Chris.

Vu sa tête il a l’air furax.

— Vous lui avez fait quoi, à ma belle-mère ?

Je le regarde droit dans les yeux, je sais qu’il n’aime pas qu’on lui tienne tête.

— Tu ne ressembles pas à ton père comme je le croyais.

Tiens donc, il évite de répondre à la question. Je vais le titiller un peu.

— Je vais le prendre pour un compliment.

— Ton père savait faire la différence entre les ordres qu’il recevait et ceux qu’il se donnait. Tandis que toi, tu n’en fais qu’à ta tête et tu le paieras un jour ou l’autre.

— Vous ne me faites pas peur. Et si vous vous avisez de faire du mal aux personnes auxquelles je tiens, je vous promets que je m’occuperai de vous personnellement.

— C’est juste une mise en garde, mais si tu le prends comme une menace... je sais très bien de quoi tu es capable. C’est gravé dans ma tête.

Nous restons là, à nous regarder dans les yeux pendant un moment, lorsqu’Alex se décide enfin à rompre le silence.

— Et si on parlait du plan de demain ?

Chris détourne son regard de moi afin de regarder son fils. C’est plus fort que moi mais un rictus s’étire de mes lèvres.

— On t’écoute.

~ POINT DE VUE MARK ~

Le docteur Cruz est enfin arrivé à la planque . Il va pouvoir examiner Nicole et voir ce qu’elle a. Elle m’inquiète vraiment, j’espère que ça va aller.

Je l’entends poser des questions à Nicole puis il sort de la chambre. Il referme la porte et me suit dans le salon.

— Alors ? interrogeais-je.

— Elle est fatiguée. Il faut qu’elle se repose et surtout qu’elle évite de se surmener.

— Ça ne va pas être possible. Si elle voit qu’on lui cache quelque chose, elle ne nous le pardonnera pas.

— C’est à toi de voir, mais je pense que tu devrais t’abstenir de lui parler de quelque chose qui la contrarie.

— Elle va nous le faire payer.

— Tu préfères qu’elle te fasse la tête ou qu’elle fasse une fausse couche ?

— Elle risque de les perdre ?

— Si elle n’est pas dans un environnement calme, elle risque de les perdre tous les deux. C’est une grande stressée qui garde tout à l’intérieur et ça, ce n’est pas bon du tout pour elle. Et avec les complications que sa première grossesse a engendrées, ça n’arrange rien.

— Comment ça, la première grossesse ? Je croyais que c’était celle-là, la première, demande David, soucieux.

— Pas exactement, lui répondis-je.

— Elle a fait un déni de grossesse il y a quatre ans et elle a perdu le bébé à 8 mois de grossesse.

— Comment ça elle a perdu le bébé ? Qu’est-ce qu’il s’est passé ? interroge Erika, anxieuse.

Avec Nicole, elles ont toujours été très proches comme les deux doigts de la main. J’espère qu’elle pourra faire entendre raison à Nicole.

— Elle était en intervention sur le terrain et elle ne portait pas de gilet. Elle s’est mise à découvert et elle s’est pris une balle de 9 millimètres.

Erika porte sa main sur sa bouche, comme choquée.

— Cette balle lui a abîmé l’utérus.

Ils restent tous sans voix pendant quelques minutes.

— Alors, comment... commence David.

— Le miracle de la vie.

— Je comprends pourquoi elle est fatiguée, dit Erika.

— Il va lui falloir un suivi plus approfondi, ajoute le docteur Cruz.

— C’est-à-dire ? demandais-je.

— Visites médicales plus régulières, un rythme de vie plus simple, beaucoup de repos, de la détente comme par exemple de la marche ou de la gym pour les femmes enceintes. Et le plus important, c’est de ne pas la laisser se replier sur elle-même.

— Ça va poser un problème.

— Je sais que ce n’est pas dans son tempérament, mais elle n’aura pas le choix.

— Elle est sous protection policière et les sorties répétitives peuvent mettre en danger toutes les personnes ici présentes.

— Je peux l’installer dans une chambre à l’hôpital et tu pourras y poster autant de flics et/ou de Marshall que tu voudras.

Je regarde David et Erika, qui acquiescent d’un signe de tête, sans aucune hésitation.

— On fait comme ça. Mais au moindre problème, c’est toi qui ira t’expliquer avec elle.

— J’ai prêté serment et je respecte le règlement. Ta fille a besoin de ces soins et elle les aura… même si elle doit m’arracher la tête.

David m’aide à l’installer dans la voiture. J’ai pris la décision de rester avec ma fille le restant de la nuit.

Le lendemain matin, je décide d’aller au commissariat. À peine arrivé, je croise Laurent qui me fait signe de venir dans son bureau.

— Où est mon témoin ? me demande Laurent, énervé.

— De qui tu parles ?

— De la jeune femme qui était dans mon commissariat, répond Laurent.

— Tu parles de la Müller qui se trouve avec tes amis les Marshall ou bien de celle que j’ai mise en sécurité ?

— Pourquoi tu me parles de la fille du braquage ?

— Ah, tu n’es pas au courant ? La fille du braquage et celle de la boutique de perruque, elles sont sœurs, dis-je, avec le sourire.

— Et tu l’as mise où ?

— En sécurité.

— Tu ne me fais pas confiance ?

— Nous sommes dans un monde où il faut se méfier de tout le monde, lui répondis-je.

— Tu te méfies de moi ?

— J’ai l’impression d’être surveillé comme dans le temps où on enquêtait tous les deux. Alors je préfère garder cette information pour moi.

~ POINT DE VUE JOHN ~

Je viens d’arriver au commissariat vêtu d’une casquette et de lunettes noires. J’essaie de me fondre dans la masse. Il faut que je vois Stéph. J’entre dans son bureau et retire mes lunettes.

— Je peux te parler ?

— Oh euh... oui.

Je ferme la porte et le rejoins.

— J’ai besoin que tu me rendes un service.

— Lequel ?

— Je sais que Nicole et toi, vous êtes entrés dans le système de surveillance de la planque de Chris.

— Non c’est Nicole qui l’a fait.

— C’est pareil.

— Tu as besoin de moi pour quoi ?

— Il a enlevé Marie et Mélissa et je voudrais que tu surveilles ce qu’ils fabriquent.

— Et qu’est-ce que j’y gagne ?

Je plisse les yeux. Je ne comprends pas vraiment sa question. Qu’est-ce qu’il y gagne ? C’est quoi cette question ?

— Pardon ?

— Qu’est-ce que j’y gagne ?

— Mais c’est quoi cette question ? Il t’arrive quoi là ?

— Rien, me répond Stéph.

Il n’est pas vraiment convaincant mais malgré sa réticence, il finit par accepter. Il lui a fallu dix minutes pour entrer dans le système de surveillance au Chemin des Mésanges.

— L’ordinateur est à toi, me dit Stéph.

Il se lève, me laisse la place puis sort de son bureau. Je fronce les sourcils, qu’est-ce qu’il lui arrive ? Il n’est pas comme d’habitude.

~ POINT DE VUE MARK ~

Je sors du bureau de Laurent au moment où je vois Stéph s’asseoir sur une chaise vide. Il faut vraiment qu’on parle tous les deux. Il me doit des explications sur son comportement mais le boulot d’abord.

— Il faut que tu me rendes un service, lui dis-je.

— Encore un ?

— Je voudrais que tu visionnes des vidéos.

— Ah, des vidéos … me dit Stéph, sur un ton sarcastique.

— Il faudrait que tu sois vigilant et que tu n’en parles à personne.

— Pourquoi vigilant ?

— Ces vidéos sont celles de l’appartement de John et de Nicole, lui répondis-je.

— Je vois.

— Il faudrait que tu évites de visionner la bande d’hier soir.

— T’inquiète pas, je ne regarderai pas.

— Ça me fait plaisir que tu aies compris. Nicole avait peur que tu y jettes un œil. Tu peux commencer maintenant ? lui demandais-je.

— Ouais, dès que j’aurais récupéré mon bureau.

— Qu’est-ce qu’il a ton bureau ?

Je vois bien qu’il est embêté.

— John, me répond-t-il.

Je me retourne et vais le voir. Je ne comprends pas ce qu’il fait ici.

— Qu’est-ce que tu fais là ?

— Je bosse, me répond John.

Je contourne le bureau et je jette un œil à ce qu’il fait.

— Tu regardes les vidéos de la planque ?

— Exact … et j’ai vu Mélissa et ça ne va pas du tout.

Je ne réponds pas. Pas besoin d’explications, je sais comment cet enfoiré agit et je connais ma femme … question docilité elle n’est pas la première.

John voit bien que je boue de l’intérieur.

— Et Nicole ? Comment elle va ?

— Elle a eu une autre crise et avec l’accord du médecin, je l’ai faite hospitaliser.

— Comment ça une autre crise ? Il s’est passé quoi ?

— A peine arrivée à la planque, elle a commencé à avoir mal au ventre et avec ses antécédents, on a préféré ne pas prendre de risque pour elle et les bébés.

— Comment elle va ? Je veux aller la voir, interroge John, soudain pris d’angoisse.

— Elle dormait quand je suis parti ce matin, mais je ne sais pas si c’est une bonne idée.

— Pourquoi ?

— Tout simplement parce que tu as besoin de te concentrer sur ton enquête. Ce n’est pas le moment pour toi de te faire coincer par Chris parce que tu pactises avec l’ennemi.

— J’ai besoin de la voir, c’est vital pour moi.

— C’est vital pour elle aussi, mais pas comme ça. Pas au milieu d’une enquête comme celle-là. C’est trop dangereux pour vous.

— Elle m’a sorti de mes emmerdes, je suis en train de replonger pour sauver ce qu’elle a de plus cher au monde alors s’il te plaît, laisse-moi être là pour elle.

— Elle est très bien entourée à l’hôpital. J’ai mis ton ami le Marshall devant sa porte, elle ne risque rien… je sais que ça va être compliqué, mais…

— Qu’est-ce que c’est que ça ? demande John, outré.

Je regarde ce que John voit sur l’ordinateur.

— C’est quoi, ça ?

— Ce sont les vidéos de l’appart. Ne me dis pas que tu as demandé à quelqu’un de les visionner ? me demande-t-il.

— Nicole pensait qu’il y avait des choses importantes dedans.

— Comme quoi ? Nos parties de jambes en l’air ?

Je le vois fulminer puis fermer les yeux pour tenter de se calmer.

— Il m’a dit qu’il ne les regarderait pas.

— Oh … tu as demandé à qui ?

Je sais qu’il va s’énerver quoi que je lui dise, alors je décide de ne pas lui répondre mais apparemment il a quand même compris.

— Oh non.

— C’est Nicole qui me l’a demandé.

John me regarde avec une telle noirceur dans ses yeux.

Tout à coup, l’écran d’ordinateur devient noir.

— Je vais aller voir ce qui se passe, dis-je.

— Si tu ne lui casses pas la gueule c’est moi qui vais le faire, t’entends !!!

Je sors du bureau de Stéph et referme la porte avant que John n’en sorte.

— Qu’est-ce que tu as fait ?

— Il y a eu un bug.

Je colle mon visage au sien. Je le connais depuis qu’il est gosse, je sais quand il ment ou pas. Et en ce moment, il n’est pas en forme et il a tendance à faire des conneries qu’il regrette après.

— J’espère pour toi que ce n’est pas autre chose.

Les collègues de ma fille se mettent à faire des commentaires et ce que j’entends me fait monter la colère.

— Tu as plutôt intérêt à me régler cette affaire vite fait bien fait. T’as compris ? lui dis-je.

— Personne n’a pu les reconnaître.

— Nous on a eu le temps de les reconnaître donc je vais être plus clair. Soit tu fais oublier à tout le monde ce qui vient de se passer, soit... je t’adresse à Nicole.

~ POINT DE VUE JOHN ~

J’entends mon téléphone sonner. Lorsque je vois que c’est Chris qui m’appelle, je n’ai pas la moindre envie de décrocher … Allez pense à la mission et rien qu’à la mission. Tu régleras tes comptes avec Stéph plus tard.

— Quoi ?

— C’est l’heure.

— J’arrive.

Je raccroche, passe mes mains sur mon visage. Je suis fatigué, j’en ai marre de cette enquête et on n’en est qu’au début.

Je replace ces fichues lunettes noires, je me lève et sors du bureau.

Je passe devant Mark et Stéph puis devant les collègues qui s’extasiaient et qui, devant mon passage se taisent.

— Si je vois quelqu’un regarder, rigoler ou encore commenter ce qu’il vient de voir, je l’adresse à ma fille, lance Mark, à haute voix pour que tout le monde puisse l’entendre.

Les sourires s’estompent pendant que les regarde tous.

Dix minutes plus tard, j’arrive au lieu de rendez-vous que Chris m’avait donné. Je ne suis pas d’humeur, j’espère qu’il ne va pas me prendre la tête.

— Tu en as mis du temps, lance-t-il.

Qu’est-ce que je vous disais.

— Je suis là, non ?

— Ton père...

— Alors on va mettre les choses au clair … vous allez arrêter de me comparer à mon père. Je ne suis pas et je ne serai jamais comme lui. C’est clair ?

— Tu n’es pas comme ton père c’est certain, mais tu restes sous mes ordres. Alors tu fais ce que je te dis et tu la fermes.

Je m’apprête à lui répondre, mais Alex me fait signe de laisser tomber. Il me donne mes affaires et je me prépare. Dix minutes plus tard, tout le monde est prêt à partir.

Nous montons en voiture et nous nous en allons. Je ne sais toujours pas où nous allons. Je ne la sens pas cette histoire.

— Où va-t-on ? demandais-je.

— Tu n’as pas à le savoir, pour le moment.

— Je vois que la confiance règne.

— Tu dois savoir que ma confiance est à gagner.

— Qu’est-ce qu’il faut que je fasse pour la gagner ?

— Tu vas entrer dans une galerie, cagoulé, et nous allons la braquer afin de récupérer un tableau.

— Et il ressemble à quoi ce tableau ?

— C’est un personnage voilé avec un cœur dans la main droite.

— Ah … c’est votre signature.

— Et ce sera celle de mon fils quand il reprendra le flambeau.

Ah mon dieu. Ne me dites pas qu’à son âge il croit encore au Père noël … faudrait lui dire la vérité et qu’il ouvre les yeux.

— Il a dit qu’il suivrait votre voie ?

— Il n’a pas besoin de le dire, ça se voit.

Ou alors, on devrait lui payer un bon ophtalmo parce que là, il ne voit absolument rien.

— Si vous le dites, lui dis-je.

Arrivés devant la galerie de la rue Saint-Martin, Chris gare la voiture.

— Tu prends ce dont tu as besoin et on y va.

— Vous venez avec moi ?

— Je veux être aux premières loges pour voir ce que tu as dans le ventre.

Ah tu veux voir ce que j’ai dans le ventre ? Tu ne vas pas être déçu, mon pote.

Je prends l’arme dont j’ai besoin et referme le coffre de la voiture. Chris et Eva me suivent comme mon ombre. On dirait que je risque de m’enfuir tellement ils me collent aux basques. Nous enfilons nos cagoules et entrons dans la galerie, armes à la main.

Chris attend qu’ avec Eva nous soyons entrés dans la galerie pour sortir son téléphone et je le vois appeler la police afin de les prévenir qu’un cambriolage était en cours. J’y crois pas … c’est vraiment un enfoiré. Mark et les autres vont se ramener vite fait bien fait maintenant.

Quand il raccroche, il jette son téléphone à terre et entre dans la galerie.

Tout le monde est allongé à terre, les mains sur la tête.

— Alors, le tableau ?

— Vous voulez aller plus vite que la musique ? lui demandais-je.

— Où est le tableau ? redemande-t-il, sans m’avoir écouté.

Eva prend la vendeuse par le col et la relève d’un coup.

— Où est le tableau ? lui demande-t-elle.

— Quel tableau ?

— Le cœur volé. Où est-il ?

— Il a été vendu.

— À qui ?

— Je ne sais pas. Ce n’est pas moi qui me suis occupée de la vente.

— Vous avez bien un cahier des ventes ?

La vendeuse est tellement terrorisée qu’elle dirait n’importe quoi pour éviter de se prendre un coup. Je la vois hocher la tête pour donner raison à Eva.

— Alors donnez-moi ce fichu nom.

La vendeuse tourne sa tête vers le comptoir. Eva la lâche et elle va au comptoir. Elle prend le cahier des ventes et cherche le nom du tableau.

— Alors ? Quel nom ?

La vendeuse ne veut pas lui donner le nom de l’acheteuse. Elle reste silencieuse un court instant.

— Qu’est-ce que vous allez lui faire ?

Chris pointe son arme sur la vendeuse.

— Donnez-moi le nom et l’adresse.

Il enlève la sécurité de son arme. Elle est toujours prête à garder le silence. Il se tourne vers moi et je sais qu’il sourit sous sa cagoule. Ce genre de situation l’amuse ou même pire.

— Tu vas pouvoir ouvrir le bal.

Voyant qu’elle ne veut toujours pas répondre, Chris me fait signe de descendre le premier otage.

Je vise le bras et le premier coup de feu part quelques secondes après.

— Vous me donnez cette adresse ou bien la prochaine fois qu’un coup de feu retentira ce sera pour vous.

Tout à coup, des sirènes de voiture retentissent.

Je vais à l’entrée et retire ma cagoule. Ouais je sais que c’est une erreur mais je m’en fiche. Au point où j’en suis hein …

— La cavalerie est là.

Chris se met à parler d’une façon assez sèche à la vendeuse, mais elle se révèle être assez têtue.

Il la pousse et regarde sur le cahier avec Eva et lui murmure quelque chose à l’oreille.

Il faut que je profite de ce moment-là pour mettre mon plan en action. Je les rejoins au niveau du comptoir et je regarde vite fait ce cahier des ventes et signe l’adresse en langage des signes de façon à ce que la caméra de surveillance puisse bien la remarquer. Je réitère l’opération une deuxième fois en espérant être assez clair.

— Ici la police. Le bâtiment est cerné, rendez-vous.

Nous nous regardons. Bon ok, va falloir bouger.

— Levez-vous, tous, lançais-je.

Tout le monde s’exécute. J’en prends trois au hasard.

— Vous pouvez sortir, sauf vous trois, dis-je en pointant mon arme sur les personnes que j’avais devant moi.

Ils sortent tous dans le calme et ils sont accueillis par les policiers à l’extérieur.

Je prends la vendeuse par le bras tandis que Chris et Eva prennent les deux autres.

Je m’excuse auprès de la vendeuse et elle me regarde. Elle est toujours effrayée mais la surprise vient s’accaparer de son faciès.

Ouais je sais, aucun braqueur ne s’excuse après avoir merdé. J’espère que Mark comprendra.

Je pointe mon arme en direction de sa nuque et commence à avancer vers la sortie. Je suis suivi de près par Chris et par Eva.

En quelques secondes, nous sommes dehors.

~ POINT DE VUE GREG ~

Non mais c’est une blague hein ? Qu’est-ce que le commandant Matthews fait avec les braqueurs ?

Je crois que je suis le premier à le reconnaître.

— C’est une blague ? demandais-je à Stéph.

Après avoir bien regardé, Stéph le reconnait également.

— Qu’est-ce qu’il fait là ?

— Espérons qu’il n’a pas retourné sa veste, dit Matt.

— Il doit avoir un plan ce n’est pas possible autrement, dit Greg.

Je regarde Stéph qui n’en croit pas ses yeux non plus. J’espère que le patron à un plan parce que là, ça va être compliqué à expliquer.

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