Pauvre, pauvre roi

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Je n'ai pas les mots. J'ai tout perdu. O fatale destinée ! Vous vous demandez sûrement comment un personnage aussi important que moi a pu en arriver là. Laissez-moi vous conter ma triste et tragique histoire.

Mon nom ne vous apporterait rien, mais sachez que fut un temps, j'étais le roi d'un royaume immense et prospère. Il s'étendait sur toutes sortes de territoires, des vallées, des forêts, des déserts et des montagnes. Mon royaume était riche ; il suffisait de se promener quelques minutes pour obtenir de l'argent et d'un léger voyage pour devenir riche. Soucieux de la sécurité de mon peuple, j'avais érigé de nombreuses fortifications, gardées par de fidèles chefs militaires locaux et pour certaines, par mes propres enfants. Les réserves naturelles étaient légion dans mon royaume, car j'avais toujours été soucieux de préserver l'environnement et la biodiversité si riche dont jouissait mon magnifique royaume. Cela ne l'empêchait pas d'être à la pointe de la technologie, avec un réseau des eaux extrêmement développé et de nombreux chemins reliant chaque recoin de mon royaume, prunelle de mes yeux et réussite de ma vie.

Le comble de mon bonheur arriva quand je fus sur le point d'épouser une princesse étrangère. Son charmant royaume n'avait pas ma richesse et se concentrait davantage sur la ségrégation, réservant toutes les fonctions importantes à une seule et même catégorie de la population. Mais ça n'avait pas d'importance. Je l'aimais. Et j'étais prêt à la rendre heureuse. Il est vrai que la princesse ne voulait pas de moi. Mais je savais que le temps aidant, la jeune femme apprendrait à m'apprécier et à me chérir comme je la chérissais.

Las, c'est alors qu'il fit son apparition.

C'était un homme du peuple, venu du royaume de la princesse. Il n'était même pas noble, mais réclamait que la princesse l'aimait et que seul lui avait le droit de l'épouser. Sans attendre, il se mit à envahir mon royaume, à l'aide de certains de ses amis peu recommandables. Vous vous direz peut-être que s'il prétendait être le grand amour de la princesse, j'aurais dû la laisser aller à lui et renoncer à mon mariage avec elle. A ceci je vous répondrais qu'un monarque doit savoir faire ce qui est le mieux pour son pays et pour ceux qui l'aiment. Or, outre le destin grandiose et plus qu'enviable que ma dulcinée allait obtenir à mes côtés, permettez-moi de vous prévenir que cet amant populaire n'aurait apporté que tourments à cette délicieuse créature. Il consommait pour ainsi dire de la drogue régulièrement, et faisait preuve de violence et d'insouciance dans des proportions qui m'effrayaient. Si ma mie ne tenait certes pas particulièrement à moi actuellement, je savais que tomber dans les bras de ce plébéien serait sans aucun doute la pire chose qui puisse lui arriver.

Fidèle à sa réputation impulsive, ce paysan se lança à la conquête de sa princesse comme s'il s'agissait d'une récompense personnelle. Vous me direz sans doute qu'il ne s'agissait pas d'une menace sérieuse. Détrompez-vous. Ce roturier n'avait pour limites à son audace démentielle que celles de son imagination. Il ne reculait devant rien pour venir ravir ma bien-aimée. Et en quelques mois, mon royaume était devenu méconnaissable.

Les réserves d'argent disponibles publiquement furent pillées sans vergogne. Mes habitants furent persécutés et massacrés au nom de ce soi-disant grand amour qui se construisait sur des morts innombrables. Non content de ce résultat, le prolétaire qu'était cet idividu ravagea mes réserves naturelles et détruisit par ses compétences d'athlète (je ne puis lui enlever cette qualité qu'il utilisa de manière si funeste) une faune et une flore autrefois aussi variées que ne l'étaient les terres de mon royaume. Les provinces de ce dernier tombèrent les unes après les autres, et les forteresses que j'avais pourtant admirablement placées n'échappèrent pas au courroux maudit de ce manant infernal.

Incendiaire, il brûla un nombre incalculable de lieux et (j'en frémis) d'habitants de mon royaume désormais en proie à l'instabilité et au chaos. Utilisant tous les moyens pour parvenir jusqu'à moi, il continua sa tuerie et sa quête mortelle, allant jusqu'à passer par les réseaux d'égoût pour me rencontrer (quand je vous disais qu'il était dérangé !) et, exalté par sa consommation affolante de substances illicites, arriva jusqu'à ma salle du trône. Le combat fut épique, mais je n'étais pas aussi jeune que mon furieux adversaire, et je n'avais pas la moindre chance. Je fus rapidement blessé mortellement, et parvînt miraculeusement à survivre et à m'échapper. Pour mon plus grand malheur, ma princesse ne put m'accompagner.

Et c'est ainsi que se termine mon histoire. Je suis seul. Mon peuple, mon royaume, mes enfants ne sont plus. Il me faudra tout reconstruire si je veux un jour trouver le repos. Ma bien-aimée n'a pas épousé son sauveur factice. Comme je l'avais pressenti, elle ne peut se résoudre à s'unir à lui et à sa folie. Mais tout n'est pas perdu. Je reviendrai.

Et cette fois, ce satané plombier italien moustachu à salopette et à la casquette rouge ne m'arrêtera pas.

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