Chapitre 21

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8 avril 2010, milieu de matinée

Cynthia arriva dans une petite ville. Il ne s'agissait pas de Wattrem. Mais elle devait quand même s'y arrêter. Elle avait faim et soif. Elle vadrouilla en ville à la recherche d'un endroit où elle pourrait trouver de quoi se nourrir.

Sur sa route, elle croisa les regards de nombreuses personnes. Toutes se demandaient ce que faisait une petite fille de son âge seule dans la rue. Elle avait également conscience que ses vêtements étaient sales, notamment à cause de sa récente chute dans les bois, mais aussi à cause de la pluie qui venait de faire son apparition. Les passants devaient certainement la prendre pour une sans abri.

Cythia était impressionnée par la ville. C'était la première fois qu'elle se retrouvait en milieu urbain, au milieu des bruits de la ville : les moteurs des voitures, les personnes qui discutaient entre-elles, les coups de klaxon, les rires des enfants et bien d'autres choses. Elle sursauta même lorsqu'elle entendit et vit pour la première fois de sa vie, une moto. L'engin contrastait énormément avec le vélo qui était plus lent mais silencieux. Elle connaissait très bien le vélo pour en avoir fait au Refuge.

La petite fille vit une devanture de magasin à travers laquelle elle aperçut des boîtes de conserves et des bouteilles. Elle entra alors dans cette petite épicerie. Elle n'avait rien avalé ou bu depuis sa sortie du Refuge. Elle était affamée et assoiffée. Le souçi, c'est qu'elle n'avait aucun argent sur elle.

—Bonjour, lui dit le caissier, un homme d'une quarantaine d'années, les cheveux noirs, le sommet du crane dégarni, tout en encaissant l'unique client qui se trouvait alors dans la boutique.

La petite fille lui adressa un regard des plus terrifiants avant d'aller déhambuler dans les rayons à la recherche de nourriture. Le caissier n'avait jamais vu un tel regard chez une petite fille. Il aurait dit qu'elle allait lui planter un pieux en plein cœur.

—Les enfants de nos jours, dit-il à son client, un homme d'environ soixante-dix ans.

—Oh... ne m'en parlez pas, répondit ce dernier avant de payer et sortir de l'épicerie.

Cynthia finit par trouver l'emplacement où était posées les bouteilles d'eau. Elle en prit deux petites avant de se diriger vers une étagère sur laquelle étaient entreposés des paquets de cookies. Elle adorait les cookies. Surtout ceux au chocolat. Elle en prit deux boîtes avant de quitter le rayon.

—Eh bien, dit une voix provenant de derrière elle. Ça en fait des cookies.

La petite fille se retourna et vit un jeune homme agé de vingt à trente ans, les cheveux noirs, assez longs, ébourifés. Il était vêtu d'un jean, d'une veste marron foncé qu'il portait au dessus d'un T-Shirt rouge. Il avait également une plaque métalique jaune à sa ceinture. La même que portaient les agents de Police qu'elle avait vu la veille.

—Tu es toute seule ?

Cynthia en avait marre d'entendre cette question. Question à laquelle elle n'apportait jamais de réponse. Elle décida d'ignorer le policier et se dirigea vers la sortie.

—Tu sais que si tu franchis les portiques sans payer tu seras une voleuse ?

Les paroles du policier arrêtèrent la petite fille qui se retourna vers lui.

—Allez ça va... viens avec moi, je vais payer.

La paranormale suivit le policier jusqu'à la caisse, sans dire un mot. Ce dernier tendit un billet rougeâtre au caissier qui lui rendit aussitôt la monnaie. Après quoi la petite fille récupéra ses articles et quitta la boutique sans se soucier du policier qui la suivait.

—Tu ne vas pas manger dehors sous la pluie, si ? lui demanda-t-il.

Cynthia s'arrêta. Il avait raison. Elle ne pouvait pas rester là sous la pluie. Mais elle ne savait pas si elle pouvait faire confiance à cet homme. Il venait toutefois de lui offrir les biscuits et l'eau, ce qui faisait pencher la balance en sa faveur. Et puis de toute manière, si ça dégénérait, elle avait ses dons.

—Si tu veux, tu peux venir dans ma voiture. Tu y seras à l'abris, reprit le jeune homme.

La petite fille acquiesa de la tête et suivit le policier jusque dans sa voiture. Il s'agissait du véhicule personnel du jeune homme, un pick-up gris.

Le policier laissa la petite fille s'installer, côté passager, et attendit quelques minutes avant de briser le silence.

—Tu es la petite fille que mes collègues recherchent, pas vrai ? Celle qui s'était perdue dans la forêt.

Cynthia dévorait ses cookies sans répondre à la question. Elle se doutait bien que s'il lui avait offert ces cookies et cette eau, c'était parce qu'il l'avait reconnu. Peut-être même que c'était l'une des personnes qu'elle avait croisé dans la rue tout à l'heure qui avait téléphoné à la Police pour signaler la présence d'une enfant seule, vadrouillant dans la rue.

—Ça t'arrive de parler ? Depuis notre rencontre dans le magasin, tu n'as pas prononcé un seul mot.

Face au silence de la filette, le policier décida de changer de méthode.

—Je vois... tu es muette. Tu ne sais pas parler.

—Si je sais parler, répondit enfin la petite fille.

Le policier sourit, satisfait de voir que sa tactique avait payé.

—Je vois. Comment tu t'appelles ?

Cynthia replongea dans son silence, ignorant une fois de plus la question qui lui avait été posée.

—Moi c'est Matthias.

Le prénom fit réagir la petite fille qui tourna la tête vers lui.

—"Matthias", dit-elle. J'ai entendu un policier dire ce prénom.

—C'était sûrement de moi qu'il parlait. Je suis le seul Matthias du département de Police.

—Il disait que tu serais intéressé par l'histoire des deux personnes de la route.

—Je m'intéresse à toutes ces histoires oui. Je m'intéresse au paranormal. C'est tout le temps moi qui enquête sur les trucs étranges qui se passent dans le coin.

Cynthia ouvrit une bouteille d'eau et en but une gorgée.

—Il parait que tu as poussé une femme et arrêté une voiture par la pensée...

La petite paranormale esquiva une nouvelle fois la question puis tourna la tête vers l'extérieur de la voiture.

—Bon d'accord, reprit Matthias. Je ne t'embête plus avec cette histoire, c'est vrai qu'elle est dingue.

—Tu as déjà vu des trucs bizarres ? lui demanda-t-elle sans dévier le regard de ce qu'il se passait dehors. Dans tes enquêtes...

—Souvent il s'agissait de choses tout à fait ordinaires que les gens avaient surinterprêtées. Mais oui, j'ai déjà vu des choses insolites.

—Comme quoi ? demanda la fillette en tournant la tête vers Matthias.

—Eh bien... Des objets volants non identifiés par exemple, qu'on soupçonne parfois être des visiteurs utopiens. Des portes qui s'ouvrent et qui se referment toutes seules, une créature inconnue, des objets qui se déplacent tout seul, une fille à la peau bleue... très gentille d'ailleurs.

—Et un garçon en armure ? le coupa Cynthia.

—Un garç... non ça non. Et puis c'est pas bizarre ça.

—Pourtant regarde, fit la jeune fille en incitant le policier à observer dehors. Personne ne porte d'armure.

—Oui, tu as raison... Du coup un garçon qui se baladerait en armure, oui ça serait étrange.

Matthias sourit de constater que la petite fille semblait s'ouvrir à lui.

—Tu ne veux toujours pas me dire ton prénom ? tenta-t-il.

—Cynthia.

—Et... d'où tu viens ? Où sont tes parents ?

Cynthia leva les yeux avant de détourner une nouvelle fois le regard vers l'extérieur de la voiture.

—Il faut que je te ramène au poste. On va y aller dès que...

—Non ! cria la petite fille, faisant sursauter Matthias. Non !

—Ok... Ok, très bien. Alors où dois-je te déposer ? Tu as un chez toi ?

—Je dois aller à Wattrem.

—À Wattrem ? répéta l'agent, étonné. C'est la ville d'à côté... Pourquoi tu veux y aller ?

—Je dois retrouver quelqu'un. Et c'est là-bas qu'il est.

Matthias réfléchit un instant. Normalement, il devait amener cette fille au comissariat. Mais la façon dont elle avait réagit l'en avait dissuadé. Et puis il ne voulait pas pousser trop loin la colère de la petite fille. Il avait bien compris qu'elle avait quelque chose de spécial. Même s'il n'en avait pour le moment pas eu la preuve, il croyait au témoignage relayé par ses collègues.

De son côté, Cynthia souhaitait accorder sa confiance à cet homme. Il disait s'intéresser à l'étrange. Un peu comme son père en quelque sorte. Sauf qu'elle ressentait quelque chose de rassurant chez Matthias. Il ne semblait pas menaçant.

—Tu peux me conduire là-bas ? lui demanda-t-elle.

—Euh... Eh bien... oui, pourquoi pas. Mais Wattrem c'est assez grand tu sais... Tu as un endroit précis ?

—Celui que je recherche, je crois qu'il est en train de se cacher.

—Se cacher, tu dis ? Et tu parles de Wattrem ? Tu parlerais pas de l'incident de Wattrem par hasard ?

Matthias avait entendu parler de choses étranges qui se seraient passées dans la forêt de Wattrem quelques années avant.

—Ok. Tu ne va certainement pas me croire, mais il y a quelques années, il se serait passé quelque chose dans la forêt de Wattrem. On raconte que des enfants... Des adolescents plus précisement se seraient battus contre quelque chose. Je crois qu'il est possible, si toutefois tout cela est bien réel, que tu recherches l'une de ces personnes.

Cynthia lui esquissa un petit sourire. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle était sûre que Jo faisait partie de ces adolescents. Pour elle, ça valait le coup d'essayer.

—Oui, lui répondit-elle. Je crois que c'est là-bas qu'il faut que j'aille.

—Ok... Mais avant il faut que tu te changes et... que tu te laves. Je te jure... tu as une mine affreuse.

La paranormale effaça son sourire et fixa le policier du regard, sans dire le moindre mot.

—Et... j'imagine que tu n'as aucun endroit où aller, c'est ça ? reprit Matthias. Ok. On n'a qu'à passer chez moi alors. Ensuite on ira à Wattrem.

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