Chapitre 27

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Chapitre 27

  Je me retrouve au pied du mur, et Léonor attend une réponse. Je ne me sens pourtant ni menacé ni en danger, mais parler de Louis, c'est comme parler d'un secret dont j'ai terriblement honte.

  Léonor m'observe silencieusement, un sourire bienveillant aux lèvres. J'ai honte mais ça me ferait tellement de bien d'en parler. Je vais y aller en douceur. J'ose lui répondre un peu hésitant :

– Pourquoi tu me demandes ça, Léo ?

– Nate, on est amis, et tu peux te confier à moi. Après je ne veux pas te forcer la main, mais je suis convaincue que tu as des choses sur le cœur, et ça te ferait du bien d'en parler. Et puis… je suis pas aveugle.

  Je suis tellement focalisé sur le choix de mes mots que je ne prête même pas attention à la fin de la phrase de Léonor.

  Il m'est encore difficile de faire pleinement confiance à quelqu'un, notamment à une fille, après ce qui est arrivé avec Abigail. Cependant, Léonor me prouve à nouveau qu'elle est une amie et une confidente hors pair, elle est prête à m'écouter mais seulement si j'ai envie d'en parler. Oh puis j'en ai marre de toujours tout garder en moi !

– Oh Léo… je ne sais pas vraiment par où commencer. Déjà… excuse-moi d'être si méfiant, je te fais confiance mais j'ai du mal à exprimer ce que je ressens, c'est si soudain et je n'en suis pas fier. D'ailleurs je ne sais même pas exactement ce que je ressens.

– Vas-y tranquille, Nate. Je suis là pour t'écouter.

  Elle me regarde intensément, son visage est paré d'un sourire empli d'affection, je baisse les yeux puis regarde mes mains qui tremblent légèrement.

– Voilà Léo, je… je pense avoir des sentiments pour Louis.

– J'avais remarqué merci, dit-elle en souriant, ce qui a le don de dédramatiser la situation.

– Comment ça ? lâche-je les yeux écarquillés.

– Non plus sérieusement, je ne savais pas que tu avais des sentiments, mais je vois bien qu'il ne te laisse pas indifférent. En fait j'ai commencé à le remarquer à la cantine, tu as une façon particulière de le regarder. En plus lorsqu'il parle ton visage change, tu ne sembles plus si renfermé, tu serais presque… souriant. Et puis, mon impression a été confirmée à la fête, tu n’arrêtais pas de jeter des coups d’œil dans sa direction.

  Léonor s’arrête de parler et je réfléchis à ce qu'elle vient de me dire. Je suis bien loin des clichés sur les anglais, je suis incapable de dissimuler ce que je ressens. Elle a remarqué toutes ces choses alors que je pensais avoir fait attention.

  Je lève les yeux et Léonor me regarde, toujours en souriant.

– Léo, je ne sais pas quoi te dire. Je… Louis occupe beaucoup mes pensées en ce moment. Même si je sais que…

– Oui ?

– … que je n'ai aucune chance, il n'est pas comme moi.

– Ah, répond Léonor en baissant les yeux.

  Je ressens comme de l'approbation dans son geste, comme si elle confirmait ce que je redoutais. Léonor poursuit en faisant une petite moue :

– Bon… Louis a déjà eu une copine c'est vrai. C'était l'année dernière, une fille de notre classe. Mais ça n'a pas duré.

  Face à l'implacable vérité, je vois bien que Léonor essaie d'atténuer la douleur que cela vient de me causer. Je m'y étais forcément préparé, et pourtant je ressens une irrépressible envie de pleurer, comme si je venais d'apprendre une nouvelle tragique.

– De toute façon je m’en doutais, quand je vois Marie avec lui… dis-je, jalousement.

– Ah mais si ça peut te rassurer, elle n'a aucune chance avec Louis.

  Nous continuons de discuter, Léonor est très précautionneuse dans le choix de ses réponses concernant Louis, elle me fait comprendre avec beaucoup de douceur de ne pas me bercer d'illusions, sans pour autant nier mes sentiments. Ça me parait tellement contradictoire que je désire changer de sujet, et dans un sursaut, je m'empresse de lui demander, la peur au ventre :


– Est-ce que quelqu'un à l'école a remarqué que…?

– Non t'en fais pas, personne ne sait pour toi ou n'a de soupçon. J'ai juste entendu des rumeurs comme quoi toi et moi on serait ensemble, mais alors je ne suis pas au courant !

  Ce bruit qui court nous fait sourire tous les deux, mais je trouve cela également effrayant : les choses peuvent aller très vite, tout comme ce qu'il s'est passé avec Abigail. Dans un sens, si les autres pensent que je suis en couple avec Léonor, je me sentirais alors un peu plus en sécurité.

– Et ça ne te gêne pas Léo qu'on imagine ça de toi et moi ?

– Oh tu sais je m'en fous complètement. Les gens raconteront toujours des choses dans ton dos, surtout qu'à Sainte Marthe c'est tellement petit, ça arrive vite aux oreilles des personnes concernées. Non vraiment, c'est même plutôt amusant. Et puis grâce à toi je me suis fait une amie à la fête de Louis, tu te rappelles, Lisa ? dit-elle en me faisant un clin d’œil.

  Je me souviens très bien comment Léonor est venue à mon aide alors que Lisa se montrait très collante tandis que nous dansions ; enfin que je subissais cette danse. C'est clair que Lisa a dû se sentir vexée lorsque Léonor s’est immiscée entre nous pour l'écarter. Il n'y a pas de doute, Léonor est vraiment une amie.

– Bon sinon Nate, parlons de choses sérieuses… tu veux du panettone ?

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