• Mais c'est n'importe quoi ! Il y a pleins de manières de faire ça sans que son dos soit appuyé quelque part ! Un peu d'imagination, bon sang ! Par exemple, si vous vous mettez en ...
• Finis ta phrase, et je te fais boire mon café par les narines.

Quentin était tout énervé. Et comme à chaque fois qu'il était énervé, il lâchait chaque bétise qui traversait son esprit.

• De toute façon, ça nous avait coupé toute envie, argumentais-je devant son silence.
• N'empêche qu'il y a des solutions de secours, murmurait-il pour ne rien lâcher. Bon, laissons de côté ton artiste binoclarde tatouée. Et avec ta serveuse, ça avance bien aussi ?
• Tu sais, elle a un nom, elle s'appelle Claire. C'est plus simple, non ?
• M'en fout. Je préfère "artiste binoclarde tatouée", on sait de qui on parle. Quand on cumule les conquêtes, on a vite fait de se tromper. Sur l'oreiller, tu te trompes de prénom, tu es mort. Alors, ta serveuse ? Vous avez enfin conclu, depuis la fois où elle était à moitié à poil dans son costume de sorcière lubrique ?
• Je ne l'ai pas revue depuis la dernière fois. On doit se voir au plus tard à Halloween, elle organise une soirée.
• Et si les deux t'invitent, qu'est-ce que tu fais ?
• Laura m'a déjà invitée, je ne vais pas me décommander. Le lendemain est férié, je peux proposer à Claire de passer la journée avec elle. C'est juste une question d'organisation, après tout.

Quentin semblait pensif. Il regardait le fond de sa tasse avec insistance. Je connais mon frère, je sais quand quelque chose le tracasse.

• Tu vas me dire ce qui ne va pas ? C'est parce que Sarah est partie voir sa famille que tu fais cette tête ?
• Non, pas du tout. Il faut bien qu'elle passe du temps avec sa famille. Je repensais à ta serveuse. Un détail m'avait marqué, mais je n'ai pas voulu en parler. Je ne voulais pas que tu remettes tes plans en question pour une supposition. Et regarde où ça te mène, je n'aurais jamais pensé que tu irais si loin ! Tu imaginais, toi, aller jusque là dans cette relation double ?
• Accouche, dis-moi ce que tu as vu.
• Je pense qu'elle est mariée.

Un silence de plomb tomba. Je ne le quittais pas des yeux. J'étais suspendu à ses lèvres, je voulais une suite.

• C'est tout ? Tu penses qu'elle est mariée ? Tu me balances ça comme ça, sans t'expliquer ? Mais donnes-moi des détails, enfin ! Quest-ce qui te fait penser ça ? C'est une idée stupide !
• Dès le premier jour, j'ai remarqué qu'elle avait une marque de bronzage à son annulaire gauche. Juste à l'emplacement d'une alliance. C'est qu'elle l'a retirée récemment. Soit elle retire son alliance pour travailler, ce qui lui permet peut-être d'attirer plus de pourboires, ou pour des questions d'hygiène ; soit elle est libertine et retire son alliance en l'absence de son mari pour draguer librement ; soit elle est fraîchement divorcée ou séparée. J'ai peur que tu sois embarqué dans une histoire qui te dépasse.
• Elle n'est pas mariée, elle vit avec sa coloc' depuis le début de ses études. Elle vivrait avec son mari si elle en avait un, assurais-je.
• Elle s'est peut-être mariée pendant les vacances et son mari va la rejoindre un peu plus tard.

Je réfléchissais en silence. J'étais énervé de ne pas avoir vu ce détail. Pourquoi ne l'avais-je pas remarqué ? En même temps, j'ai bien trop occupé à regarder autre chose que ses mains...