Arrivés au comptoir, Claire me devança pour commander.

• David, deux cafés citrouille, s'il te plaît.
• Et deux citrouilles pour ma brunette préférée. Dont un avec…, commença le barman.
• Supplément crème et graines de courge, tu le sais bien, l'interrompit-elle avec un sourire généreux.
• Je t'apporte ça quand c'est prêt.

Nous allions nous installer à un table vide. Assis face a face, j'avais peur de manquer de conversation. Je repensais à la soirée de la veille ou j'avais surtout écouté Laura parler. Je ne voulais pas débuter cette relation de la même manière.

• Qu'est-ce que tu lisais, cette fois-ci ?
• Oh, c'est une fan fiction écrite par un ami en fac de lettres. Une version alternative de Harry Potter où le Choixpeau Magique n'en fait qu'à sa tête et où il finit a Serpentard. Et attention spoiler, on découvre qu'il est le fils caché de Voldemort et de Lily Evans, suite à un sortilège Inseminare.
• Mais c'est horrible. Il détruit l'histoire de mon enfance.
• J'ai eu la même réaction que toi au début. Ça fait partie de mes classiques intouchables, mais ce type est plutôt doué, c'est presque agréable à lire, riait-elle.

On nous apporta nos boissons. Le café citrouille était plutôt goûteux, très agréable. C'était comme boire une courge énergisante.

• C'est très bon. Je suppose que sans toi, je ne l'aurais sûrement pas goûté.
• C'est le boisson idéale par ce temps. Le café, c'est un classique, un intemporel, et a quinze jours d'Halloween, quoi de mieux que la citrouille pour rester dans le thème.

J'aimais cette verve, cette assurance qui se dégageait d'elle. Je voulais en savoir plus et renchérissais d'un air malin :

• Et sinon, tu as d'autres hobbies que lire des fan fictions qui détruisent les classiques de notre enfance ?
• Bien sûr, riait elle, je ne me satisfais pas de critiquer le travail des autres. Je sculpte pendant mon temps libre.
• Tu sculptes ? Je t'imaginais plutôt pâtissière créative ou lectrice assidue.
• Et bien, non. Je sculpte des corps avec du plâtre. Je réalise mes mélanges, je façonne le plâtre avec les mains, je le taille, le biseaute, le râpe, le rainure.

Elle sortit son téléphone afin de me montrer quelques photographies de ses derniers travaux, dont une assez perturbante, où des corps s'entremêlaient.

• Celle-ci est en cours, expliquait elle. Je l'appelle "les amants", tu dois comprendre pourquoi.
• Pas tout à fait. J'ai du mal à distinguer le dessus du dessous.
• Moque toi, je t'en prie, riait-elle.

Elle me désignait les différents membres que l'on percevait, désignant tout à tour une jambe, un bras, une main, tantôt masculine, tantôt féminine.

J'admirais cette imagination, cette vision de corps enlacés jusqu'à ne faire qu'un. Je regardais le détail de cette matière élastique, pétrie et façonnée de ses doigts, aux marques du travail encore visibles a même la matière. Quelque chose chez cette fille m'attirait au plus haut point. J'avais envie d'être sa statue de plâtre, je voulais qu'elle me façonne, qu'elle dessine mes contours avec ses mains.

Je lui proposais qu'elle me montre ses sculptures, comme une tentative d'approche, mais elle déclina.

Elle avait apparemment un cours de dessin ce samedi après midi. Du dessin de nu. Je lui proposais de lui servir de modèle. Elle ria, mais cette fois ci ne déclina pas mon offre. Elle me donna rendez vous le samedi suivant dans ce café pour 17h. Elle me promit de bloquer sa soirée.

Décidément, cette fille me plaisait de plus en plus.