18. Lune Croissante

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Je tourne en rond dans ce club, depuis presque une heure. La Pleine Lune. Poétique comme nom, n'est-ce pas ? Dommage que l'astre ne soit qu'un croissant voilé derrière la pollution parisienne, ce soir. J'ai cru capter un signal en passant devant l'établissement tout à l'heure. Mes sens se sont mis en alerte. Les bonnes vieilles habitudes de la Traque, réactivées. Puis, le signal s'est volatilisé.

Trop de monde, trop de brouhaha. Ce n'est pas un environnement dans lequel il est facile d'évoluer. Les flux de pensées se mélangent et deviennent vite impossibles à décortiquer. Aux informations psychiques déjà conséquentes, se superposent les sens physiques surstimulés par la musique trop forte et la lumière stroboscopique. Même surévolué, un cerveau de mateur reste un cerveau humain. Je sens la migraine poindre. Tant pis, je rentrerai bredouille ce soir. Après une dernière cigarette...

Je repose ma vigilance et mes connectiques neuro bien trop éprouvées par cette chasse infructueuse, avant de pousser la porte du fumoir. La stimulation auditive cède le pas à la stimulation olfactive. Je regrette déjà l'initiative. L'odeur oppressante du tabac en suspension manque de me filer la nausée. Je ne sais pas si je vais pouvoir tenir jusqu'au filtre. Je risque probablement de lâcher l'affaire à la moitié de ma cigarette et d'en rallumer une autre dehors.

— Excusez-moi, je peux vous emprunter votre feu, s'il vous plaît ?

Je sursaute. Je ne l'ai pas senti arriver. Mes sens sont-ils éprouvés et épuisés au point de me laisser surprendre par un contact humain ? Je le dévisage de haut en bas.

Asiatique ? Métis ? Dur à déterminer dans l'obscurité relative du fumoir de laquelle se démarque à peine sa peau sombre. Ses deux guiboles semblent le tenir avec l'assurance d'un roseau en pleine tempête. Son corps est petit, mais fin, affalé sur le mur écorché et gondolé qui paraît alors ne plus tenir que grâce à lui. Posée sur deux épaules frêles, sa tête penche gracieusement sur le côté pour attraper entre deux lèvres espiègles la cigarette encore éteinte. Encadré de mèches d'un noir encore plus sombre que son teint, les traits fins et harmonieux de son visage pourraient se fondre dans le décor, si ces derniers n'étaient pas soulignés par les jeux de la lumière rouge du fumoir.

— Alors ?

Je mets quelques secondes avant de me détourner de mon introspection. L'évidence éclate en moi. C'est lui. C'est son écho que j'ai ressenti tout à l'heure. Si tassée, si étouffée – un autre que moi ne l'aurait jamais perçu – et pourtant, cette vibration résonne en lui avec force.

Je secoue la tête et lui renvoie un de ces sourires séducteurs dont j'ai le secret.

— Excuse-moi, j'étais dans la lune. Tu disais ?

Je n'ai pas besoin de le voir pour savoir qu'il rougit. Il est gay et je lui fais déjà de l'effet. Parfait. Cela n'en sera que plus simple. Il balbutie pour relancer sa demande.

— Je peux vous emprunter votre feu ?

Je lui tends de bonne grâce mon Zippo gravé d'une colombe. Un des rares objets auxquels je tiens. Un des rares objets que je possède. Alors qu'il allume sa cigarette, j'observe le reflet de la flamme danser dans ses pupilles sombres. Envoûtant. Je sais déjà de quelle manière je procèderai avec lui. Ce sera loin d'être une corvée.

Quand il me rend le briquet, je n'hésite pas à attaquer directement, quitte à faire fi de la subtilité ou de la prudence. De toute façon, il ne croit pas aux Alters.

Salamat, lui dis-je en remettant l'objet dans ma poche.

Ses yeux fins s'écarquillent dans un large cercle et il éclate d'un rire tiède.

— Tu as cru que j'étais Philippin ?

— Ce n'est pas le cas ?

Comme si je ne connaissais pas déjà la réponse... Mais cela m'amuse de jouer les taquins. On pourrait croire qu'au bout de vingt-cinq ans avec le don de décortiquer l'esprit des gens, je finirais par me lasser de ce petit jeu. Je reste un grand enfant.

— Si, admet-il. Tu es plutôt fort aux devinettes. Où est-ce que tu as appris le tagalog ?

Il n'en fallait pas plus pour me donner l'occasion de sortir l'artillerie. J'exerce mon « métier » depuis si longtemps que j'en suis venu à parfaire une indéboulonnable panoplie de mensonges. À lui, je sors le grand classique : une vie itinérante dans le monde du cinéma, à parcourir, entre autres, les Philippines pour des tournages. J'ai emprunté mon nom à un producteur de séries pour Binge Freak bien réel, afin de rendre mes scénarios crédibles. Le mensonge n’en est d’ailleurs pas complètement un. Mon job implique réellement de voyager à travers le monde, après tout. Et de faire du cinéma.

Une fois la base posée, je n'ai plus qu'à saupoudrer mes récits au gré des croyances et fantasmes que je lis dans l'esprit de mes cibles. Appelons ça un talent pour l'interaction sociale ou de la manipulation, voire de l'influence mentale quand j'y mêle mon don particulier. Je ne fais plus bien la différence. Seul compte le résultat. Et tant que cela ne fait de mal à personne...

J'ai parlé pendant près de dix minutes, le laissant rebondir avec ses questions ou l'interrogeant à mon tour.

— Je n'avais pas prévu de tenir une conversation si palpitante dans un fumoir, finit-il par conclure.

Je devine qu'il ne comptait pas s'attarder à La Pleine Lune. Moi non plus, je ne souhaite nullement m’attarder ici plus que nécessaire, mais je ne peux pas le laisser repartir seul.

— On peut aussi la tenir ailleurs.

Je tente l'esquisse d'un nouveau sourire charmeur. Ça ne prend pas. Peut-être à cause de l'obscurité.

— Désolé, je pensais rentrer. C'était sympa comme discussion. C'est rare de rencontrer quelqu'un qui connaît les Philippines. Merci pour le feu.

Il tourne les talons. J'en suis surpris. Même si je le savais déprimé et épris d'un besoin de solitude pour ce soir, j'espérais avoir suffisamment douché ces états. Ils s'accrochaient avec ténacité.

— Je ne peux pas t'offrir un dernier verre avant que tu partes ?

Il soupire, s'arrête, mais ne se retourne pas pour autant. Il hésite. Même s'il me trouve charmant, il n'est pas prêt pour autant à perdre son temps gratuitement avec un inconnu. Un rire navré s'évade d'entre ses lèvres.

— Tu devrais essayer d'autres clubs si tu espères brancher des mecs. C'est pas franchement le lieu ici.

— Vraiment ? Dois-je comprendre que je n'ai aucune chance avec toi ?

Il se retourne. Un rictus amer barre sa figure. Je ne peux pas m'empêcher de le trouver séduisant avec son air nonchalant et ses mains distraitement rangées dans ses poches ; en proie à son dilemme mental entre ses besoins charnels qu'il ne parvient plus à combler depuis sa rupture amoureuse et ses problèmes financiers qui l'assaillent. Ces derniers tuent tout espoir de lâcher-prise le temps d'une nuit avec un inconnu. Est-ce que j'aurais eu envie de le séduire sans mon objectif ? Je ne sais pas. De la même manière que ce garçon baise rarement sans compensation financière, cela fait, moi aussi, des lustres que je n'ai pas eu de sexe sans arrière-pensée.

— Franchement, j'aurais du mal à croire qu'un homme comme toi ne puisse pas trouver mieux, dit-il.

— Pourquoi m'embêterais-je à chercher mieux alors que j'ai ce qu'il me faut sous les yeux ?

Il pouffe de dépit. Il ne gobe pas un seul instant mon baratin. Pourtant, je ne mens pas. Pas tout à fait.

— Parce que je ne passerais pas la nuit avec toi si c'est ce que tu escomptes, bel inconnu. Donc, cherche-toi un autre garçon facile, d'accord ?

— Que faudrait-il pour te convaincre ?

Je connais parfaitement la réponse, mais je ne suis pas bourrin au point de lui tendre tout de suite une liasse de billets. Mon approche est déjà suffisamment brusque. Lui-même n'en revient pas. Il ouvre la bouche, atterré par la goujaterie que je lui déballe. Pourquoi tant d'empressement de ma part ? Je n'agis jamais dans la précipitation avec une cible. Je suis patient. Très patient. Même s'il me faut des semaines pour obtenir un rencard. Cela ne me pose pas de problème, je peux travailler plusieurs autres cibles au corps en parallèle. À la rigueur, cela exaspère Maze et les autres Traqueurs, mais je les conchie respectueusement. Je fais les choses à ma façon.

Pourtant, avec ce Philippin, c'est un autre besoin qui me tiraille que la simple envie d'accomplir ma tâche. Pour parler crûment, je crois que j'aimerais tout simplement tirer mon coup ce soir. Cela me manque de faire ce genre de choses par envie. Ce garçon perdu, son côté mystique, sa sensualité involontaire et sa tiédeur mélancolique suscitent en moi des pulsions perverses que je pensais matées après un parcours de vie aussi tumultueux que le mien. Surtout, je sens quelque chose palpiter en lui, dans les strates profondes et verrouillées de son être. Quelque chose au-delà du simple don d'Alter. Tel un fruit à l'apparence succulente, j'ai hâte d'en peler l'écorce pour m'abreuver des saveurs sucrées que je flaire.

À ma question culottée, sa mâchoire s'est encore décrochée d'un centimètre. Il croise les bras en signe de défi.

— De l'argent.

Son sourire mutin annonce qu'il espère me choquer et détourner mes ardeurs. Au lieu de cela, je sors mon portefeuille et commence à trier mes coupures. Il troque bien vite son air narquois contre une nouvelle expression de stupéfaction.

— Combien ? lui demandé-je.

— Tu n'es pas sérieux !

— On ne peut plus. Combien alors ?

Il secoue lentement la tête, la bouche toujours grande ouverte à gober les volutes nauséabondes du fumoir. Il n'a pas l'habitude de proposer ses services de prostitué à un inconnu.

— Combien de temps ? finit-il par demander.

— Toute la nuit.

Il rigole. Il ne comprend pas. Il cherche où est le traquenard. Il ne sait même pas quel prix donner. Il compte ses rendez-vous à l'heure et ses clients en demandent rarement plus de trois.

Je reconnais tricher un peu à ce moment-là. Je ne veux pas le voir fuir. Alors je m'immisce dans sa tête, débusque ses doutes et les apaise, je titille sa rationalité pécuniaire et j'appuie sur le désir que je lui fais éprouver. Est-ce que c'est déloyal ? Est-ce que c'est de la manipulation ? Je ne suis pas en train de lui faire changer radicalement d'avis. Je fais juste pencher la balance en ma faveur.

Il finit par donner un prix. Loin d'être élevé. Preuve qu'il désire autant cette nuit que moi.

— Trois cents euros.

Je sors l'argent sous ses yeux ébahis – discrètement et à l'abri des caméras, tout de même. Suspicieux, il ne peut s'empêcher de gratter son ongle pour vérifier la présence des reliefs spécifiques. On lui a déjà fait le coup des faux billets. Ce n'est pas le cas ici. Je pourrais tiquer face à la somme d'argent que je me retrouve à devoir sortir, mais l'Arche me rembourse sans sourciller ce genre de menues dépenses. Oui, même un rendez-vous de prostitution passe en note de frais. Il n'y a pas grand-chose que Maze est en mesure de me refuser.

— Je ne sais pas d'où tu sors, mais bienvenue sur notre planète... je suppose. Comment puis-je t'appeler ?

— Aedhan.

— Enchanté Aedhan. Moi, c'est Ejay.

*

Une demi-heure plus tard, il m'entraîne dans son sillage. Heureusement, il n'a pas choisi un hôtel du quartier des Champs, plutôt un établissement modeste, dans le centre. Je préfère aussi. Moins de regards appuyés lorsqu'on a le malheur d'afficher un couple aussi détonant.

Il ôte sa veste avec une grâce dégingandée et la laisse pendre sur le dossier d'une chaise en aggloméré. Il virevolte vers moi et s'approche avec la nonchalance d'une biche qui ne reconnait pas son prédateur.

Il pose ses mains sur ma chemise avec un ersatz d'assurance qui tente de masquer son trouble.

— Qu'est-ce qui te ferait plaisir, Aedhan ?

Je m'empare de ses mains pour les décrocher aimablement. J'aime comme mes doigts encadrent parfaitement ses poignets fins. J'imagine déjà les tenir enserrés dans son dos. J'accroche un sourire d'ange à mes lèvres.

— Que tu me laisses m'occuper de toi.

Son visage s'assombrit. Ce n'est pas le genre d'aventures qu'on aime se voir proposer par un inconnu.

— Ne va non plus t'imaginer que tu peux faire tout et n'importe quoi parce que tu payes, hein ? Si je te dis d'arrêter, tu t'arrêtes.

— Cela me semble être le respect le plus élémentaire.

Il sourit, à moitié rasséréné. Il s'extirpe de mes mains et retire son haut.

— Je vais prendre une douche. Mets-toi à l'aise. Ou viens me rejoindre sous l'eau.

Je commence à me sentir à l'étroit dans mon pantalon. Je passe ma langue sur mes babines et ne tarde pas à m'engouffrer à sa suite dans la vasque à l'italienne. Nu et de dos, j'observe les gracieux contours de son corps hâlé. J’envahis l'espace sans me presser d'initier le contact. Passant seulement un doigt dans le creux de ses reins, je remonte jusqu'à la courbe de ses omoplates. Il frémit, mais ne se retourne pas. Il craint de me faire face avec ses joues en feu. Je jouis déjà de la gêne que je suscite en lui. Oui, ce job sera très plaisant, j'en suis certain.

Je finis par rompre la distance qui nous séparait encore. Ma queue est dure quand elle s'aplatit dans son dos. Mes mains agrippent ses hanches, sa nuque tombe à portée de mes lèvres. J'en profite pour embrasser son cou, chaque contact l'électrise, l'envahit de frissons.

Il doit se faire violence pour s'obliger à prendre le savon et faire ce qu'il est censé faire sous une douche. Je me fais aussi envahir par la mousse et profite de devoir frotter nos corps pour approfondir mes caresses. Il s'efforce de me les rendre, de bonne grâce, même si elles manquent de conviction du fait de sa gêne.

Je le plaque contre le mur de carrelage pour pouvoir profiter de sa croupe cambrée. Il est délicieusement doux et au gémissement qu'il laisse échapper quand je passe mes doigts dans sa raie, je devine qu'il sera très sensible. Je mets à genoux et écarte la chair de ses fesses pour lécher cet orifice intime. Il glapit sous le coup de la surprise, mais ne cherche pas à s'esquiver, au contraire, il tend d'autant plus son postérieur vers moi.

Ma trique commence sérieusement à me déranger. J'aimerais pouvoir la soulager en le prenant sur place, mais les préservatifs sont trop loin. Je finis par ancrer mes doigts en lui pour jouer avec sa glande. Il geint, se tord et halète. Je me masturbe, excité par son plaisir, et lui ordonne de faire de même.

— Branle-toi.

Il s'exécute avec joie. Pour une fois, je tente l'expérience de me recentrer sur mon propre plaisir. Des années que j'en suis pourvoyeur pour les autres, que je prends mon pied à travers le bienfait que je leur apporte. Ce soir, je sens que je n'ai pas besoin d'intermédiaire. Ce garçon suffit à enthousiasmer ma libido. Je plante un coup de dent dans son épaule. Sec, brut, instinctif. Il gémit et jouit. J'asperge sa croupe de ma semence dans le même temps.

*

Penché à la fenêtre, il observe les rues de Paris encore voilée dans la nuit. Les lumières des lampadaires, les myriades de spots publicitaires et la guirlande du réseau de satellites du ciel pourraient presque se substituer au soleil. Je le sens chamboulé.

On a baisé pendant des heures. Même si je me considère d'ordinaire comme particulièrement endurant, je me retrouve étalé sur le lit, les bras en croix, contraint à reprendre mon souffle. Je n'avais pas besoin d'en faire des caisses. Il fallait juste que je me concentre sur la mission.

J'ai échoué. Ou plutôt, j'ai perdu l'objectif de vue.

Cela ne m'était pas arrivé depuis longtemps : faire passer mes besoins charnels égoïstes avant la cause. Et pourtant, pendant ces heures, je voulais juste jouir encore et encore en lui. Chercher à gratter son esprit alors qu'il était vulnérable entre mes bras aurait simplement gâché cette conjoncture de complicité. Tant pis. Je trouverai un autre moment.

Et lui dans tout ça ? Lui, il est perturbé. Il ne comprend pas cette extase que je lui ai fait ressentir. Même avec son ex ou son meilleur ami, il n'avait jamais connu de communion sexuelle aussi parfaite. Ça le fait flipper parce que je suis un inconnu. Il ne voudrait pas m'accorder sa confiance sur la base d'un plaisir partagé, si doux fût-il. Il a raison de se méfier. Je ne lui dis pas tout.

— Tu aurais une cigarette pour moi, s'il te plaît ?

Sa voix transperçant le silence me fait sursauter. Je sursaute rarement. Je ne suis pas quelqu'un qu'on peut facilement surprendre. Je bascule ma carcasse épuisée par l'effort et pars en spéléologie dans mon tas de vêtements pour en tirer mon paquet de cigarettes. En bon valet, je rapporte le présent au petit prince roulé en boule sur sa chaise et la lui allume, même.

Il me remercie d'un sourire vague avant de me souffler sa fumée au visage. Je le lève de son siège pour prendre sa place et le faire basculer sur mes genoux. Il est aussi épuisé que moi par nos cabrioles, il n'a pas la force de m'opposer la moindre résistance. Il ne l'aurait pas voulu de toute façon.

J'enfouis ma joue entre ses omoplates pendant qu'il consume sa cigarette à la fenêtre. On est nus tous les deux, mais la chaleur des ébats nous a tant dévorés que l'air froid du dehors nous aère tout juste. J'accueille le silence comme une oasis, un répit idéal pour partir en plus ample exploration dans ses dédales cérébraux.

Je ne comprends pas bien l'agencement de ses souvenirs ni la manière dont se sont terrés ses dons d'Alters. D'habitude, chez mes cibles, ils gisent à la surface, ne demandent qu'un léger coup de pouce, un simple lâcher-prise. Je les pêche au premier lancer d'épuisette. Chez Ejay, ils sont noués dans une ribambelle de strates mémorielles dont la logique m'échappe complètement.

C'est comme s'ils avaient été scellés en lui. Les a-t-il déjà utilisés par le passé ? Pourquoi n'en garde-t-il aucun souvenir dans ce cas ? Dire que j'imaginais que la complicité que j'ai eu facilité à tisser avec lui me rendrait la tâche simple. Je réalise qu'il est un cas plus compliqué qu'il n'y paraît. Il me faut plus de temps.

— Je vais devoir rentrer, lâche-t-il.

— Ne t'ai-je pas payé pour toute la nuit ?

Même de dos, je peux le sentir esquisser un sourire aussi amusé qu'épuisé.

— Tu as encore la force de le refaire ?

— Honnêtement, non, pas ce soir. Mais dormons. On a la chambre jusqu'à onze heures. Ce sera plus facile pour toi de rentrer demain matin, non ?

Mais je n'ai aucune envie qu'il rentre et lui non plus. Sauf qu'il ne se risquera pas à l'admettre. Alors je tente.

— Sauf si tu veux qu'on prolonge demain...

Il rit nerveusement. Il en crève d'envie, mais il aurait l'impression d'afficher sa vulnérabilité en acceptant.

— Ce ne sera pas gratuit.

— Combien ?

— Deux cents ?

À moi de rigoler. C'en est presque absurde.

— Trois cents pour une nuit, deux cents pour une journée... Tu calques tes prix sur le cours de la bourse ? me moqué-je.

— Le travail de nuit est majoré, je te signale. Après je reconnais que le fait de savoir baiser comme un dieu t'octroie une sacrée réduction.

Cette fois, c'est en chœur qu'on éclate de rire. Je lui pique une latte de sa cigarette et embrasse sa bouche au goût âcre. Je m'en fiche, je la trouve quand même délicieuse. Je l'enlace et le ramène jusqu'au lit.

— D'accord, demain tu seras à moi jusqu'au coucher du soleil et je ferais en sorte de rentabiliser mon argent.

Pour illustrer mon propos, je l'allonge sur le dos, descends sur ses hanches engloutis sa verge qui parvient quand même à redevenir dure. Finalement, je le reprends une dernière fois avant que l'on finisse par tomber d'épuisement entre les draps.

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