Sotchi

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Si j’étais de plus en plus à l’aise dans les allées du journal, que le prestige de ce dernier ne me submergeait plus comme à mes premiers jours et que les ténors de la rédaction ne me paraissaient plus tant inaccessibles, je gardais un indéniable retard question publications. C’était déjà le trente mai, le climat s’adoucissait agréablement, et en dehors des coutumières moqueries du rédacteur en chef Reus, rien ne sortait de l’ordinaire.

Ce matin-là, quelqu’un attira mon attention. D’abord, parce que le parfum de cette personne, délicieusement sucré ne me sortait plus de la tête. Ensuite, en me retournant, je constatai la grande taille et la silhouette svelte de cette femme qui venait de passer juste derrière moi. De plus, les vêtements lumineux qu’elle portait, sa robe rouge moulante enveloppée par une veste blanche, la rendaient tel un phare au milieu des collègues en habits de tous les jours.

Ses cheveux soyeux étaient brun foncé, sa peau pâle éclairait son visage doux et ses lèvres d’un rouge intense opéraient un charme hypnotique. D’autres arguments peu discrets comblaient également les attentes les plus folles par leur abondance. J’ignorais qui elle était ni ne me rappelais l’avoir déjà vue auparavant. La raison de sa présence m’échappait tout autant, mais au fur et à mesure que je l’observais, la curiosité ne faisait que monter en intensité.

Sa démarche était hésitante ou pour le moins effacée. Elle se faisait discrète. Assez ironique au vu de la tenue exubérante dans laquelle elle s'exhibait. Le fait que personne ne lui adressait la parole suscita d’autant plus mon intérêt. L’envie ne manquait pas de m’approcher d’elle, mine de rien, et de découvrir le mystère qui l’entourait.

Alors qu’elle patientait en marchant dans les couloirs du journal, nous nous trouvâmes inopinément dans le chemin l’une de l’autre. De façon inattendue, une grande surprise s’afficha sur son visage, les yeux grands ouverts, la bouche entrouverte par tant de bouleversement. « Désolée, je ne voulais pas vous faire peur, » confiai-je à la ravissante femme. Agitée, interposant ses mains entre nous comme pour m’éloigner d’elle, je n’entendis d’abord que des bruits indistincts semblables à des gémissements sortir de sa bouche.

« Non… moi désolée, » dit-elle d’une voix angélique. « Je attends quelqu’un, » explique-t-elle dans ce même accent aux sonorités slaves que je connaissais pour avoir appris l’une de ces langues. « Vous attendez quelqu’un ? », répétai-je en russe, langue qu’elle connaissait manifestement aussi à sa réaction enthousiaste. Nous continuâmes ainsi notre échange dans cet idiome :

« Oui ! Vous parlez russe ?

— Je l’ai appris à l’école.

— Magnifique ! Vous parlez très bien !

— Merci. Vous voulez que je vous tienne compagnie en attendant ?

— Non, je ne devrais pas être là. Je vais avoir des ennuis. »

Croyant avoir mal compris, je n’insistai pas sur ce point que je trouvais toutefois étrange. J’ignorai ses réticences et fit diversion pour la garder près de moi :

« Je m’appelle Eleanor.

— Je m’appelle Irina. Enchantée.

— Je suis curieuse, d’où venez-vous ?

— Je suis Russe. J’ai déménagé il y a un mois. J’habitais à Sotchi avant. »

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